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Progestatifs: des patientes atteintes de méningiomes demandent réparation à l’Etat

Posté le par AFP

Des patientes atteintes de méningiomes (tumeurs cérébrales) après la prise du progestatif Androcur demandent réparation pour le préjudice qu’elles ont subi, par une action en justice qui vise à engager la responsabilité de l’Etat.

Deux requêtes ont été enregistrées au tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis) le 7 mars, selon le récépissé consulté vendredi par l’AFP, confirmant une information du quotidien Le Monde.

Elles « visent à faire reconnaître la faute de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), donc de l’Etat, dans ce scandale de santé publique majeure » et obtenir « une indemnisation respectivement de 748.777 euros et 361.515 euros », a expliqué à l’AFP Charles Joseph-Oudin, avocat de la partie requérante.

« Trois autres requêtes seront déposées d’ici à la fin de la semaine prochaine » et d’autres suivront, a-t-il ajouté.

Son cabinet détient 450 dossiers concernant des femmes qui ont consommé de l’Androcur et d’autres progestatifs, Lutéran et Lutényl, autorisés sur le marché française en 1974 et 1983 respectivement, selon l’avocat.

« Cinquante expertises judiciaires individuelles ont déjà été ordonnées » et « les vingt expertises terminées retiennent toutes le lien de causalité entre ces méningiomes et la prise des médicaments », a-t-il affirmé.

– « Défaut d’information » –

Ces expertises pointent « surtout, un défaut d’information » sur les risques connus de ces traitements, défaut dont « la responsabilité première est celle de l’Etat (ANSM) en concours avec la responsabilité des laboratoires », a-t-il souligné.

Contactée par l’AFP, l’ANSM ne commente pas la procédure en cours.

Me Joseph-Oudin et l’association Amavea, qui regroupe 900 patientes atteintes de méningiomes après la prise de progestatifs, cherchent à discuter avec le ministère de la Santé pour que soit mis en place « un dispositif d’indemnisation comme cela a été fait pour le Médiator et la Dépakine », deux scandales sanitaires ayant entraîné la création de fonds d’indemnisation pour les victimes.

L’association Amavea espère « que le maximum de personnes qui ont eu des préjudices graves pour avoir consommé l’Androcur » seront dédommagées « à hauteur du préjudice subi », a indiqué à l’AFP, sa présidente Emmanuelle Huet-Mignaton.

« Beaucoup de femmes dans l’association » n’ont « pas les moyens financiers de lancer ce genre de procédure », certaines vivant du RSA après une opération et des séquelles physiques et/ou cognitives, a-t-elle souligné. D’autres « attendent de voir si cela va aboutir ».

Les progestatifs sont des médicaments utilisés en contraception, dans le traitement de certaines pathologies gynécologiques (saignements utérins, endométriose…), ou le traitement hormonal substitutif de la ménopause et les parcours de procréation médicalement assistée.

Les méningiomes sont des tumeurs des membranes qui entourent le cerveau. Elles sont parfois qualifiées de « bénignes », non susceptibles de dégénérer en cancers mortels, mais peuvent provoquer de graves handicaps neurologiques.

– Beaucoup moins de prescriptions –

Depuis les années 2010, certains progestatifs se sont révélés favoriser l’apparition de ces méningiomes.

« Les neurochirurgiens savaient cela depuis longtemps mais pour eux, c’était une sorte de fatalité », glisse Mme Huet-Mignaton.

Le médicament Androcur (acétate de cyprotérone) a été le premier identifié à risque, par une étude du professeur Sébastien Froelich en 2007.

Théoriquement indiqué contre une pilosité excessive, mais prescrit pendant des décennies par de nombreux médecins bien au-delà de ces indications – par exemple contre l’endométriose -, le lien d’Androcur avec les méningiomes a été clairement établi en 2018.

« Dix ans ont été perdus », avant que les prescripteurs ne soient correctement informés des risques, selon Mme Huet-Mignaton. « Ce retard dans la délivrance d’une information précise et circonstanciée constitue une faute de l’Autorité de santé », abonde Me Joseph-Oudin.

Des études menées par l’Assurance maladie et le groupement d’intérêt scientifique Epi-Phare ont démontré que les traitements Androcur, Lutéran et Lutenyl augmentent fortement le risque de méningiome.

Ces résultats ont donné lieu à des recommandations d’utilisation et de surveillance par imagerie cérébrale chez les personnes utilisant ces médicaments, rappelle l’ANSM.

Les prescriptions d’Androcur ont reculé de près de 90% entre janvier 2018 et décembre 2023, selon l’agence. Fin novembre 2023, moins de 10.000 patientes étaient traitées par Androcur contre environ 90.000 fin 2017.

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