L’étude de la dynamique des fluides réels a mis en évidence la complexité du traitement des écoulements de tels fluides, en particulier lorsque les écoulements sont turbulents, c'est-à-dire dans la quasi-totalité des cas industriels. La résolution par les équations locales de bilans de ces écoulements nécessite l'utilisation de modèles de comportement et de méthodes numériques de résolution. Si ce type de résolution est riche en renseignements sur les champs des paramètres (vitesse, pression, température, masse volumique, etc.), il est lourd à mettre en œuvre et parfois inutile. En effet, l'ingénieur n'a pas, dans tous les cas d'études, un besoin de la connaissance absolue de tous ces champs à tout instant, mais a simplement la nécessité de connaître des valeurs moyennes pour un espace donné ou dans une zone particulière pour des écoulements qui souvent en pratique sont permanents, au moins en moyenne.
Cette situation est notamment celle des écoulements des fluides dans les canalisations droites ou présentant des singularités comme des coudes, des changements de sections, des vannes, etc. Dans la plupart de ces canalisations industrielles, les fluides s'écoulent en régime permanent ou pseudo-permanent avec, souvent, des variations faibles, sinon nulles, de leur masse volumique. On a alors affaire aux « écoulements permanents des fluides incompressibles dans les conduites » qui sont extrêmement fréquents dans un très grand nombre de situations industrielles, notamment du secteur de l'énergétique.
C'est l'étude en moyenne de ces écoulements particuliers et notamment celle des pertes de charge qui fait l'objet de cet article. Dans cette étude, qui correspond à ce que l'on appelle aussi l'hydraulique en conduites, on traitera tout d'abord de l'écoulement d'un fluide dans les conduites cylindriques longues, c'est-à-dire dont la longueur dépasse 30 à 50 fois le diamètre, et dont la section d'entrée considérée est située à une distance d'au moins 20 fois le diamètre à l'aval de toute singularité. Les pertes de charge déterminées dans de telles conditions sont dites régulières ou réparties. Dans une deuxième partie, l'étude sera relative aux écoulements dans les singularités ou « accidents » existant dans les conduites (coudes, changements de section, branchements, vannes, etc.). Les pertes de charge correspondantes sont dites singulières. La dernière partie est réservée à l'étude des réseaux de canalisation et à la résolution des problèmes qui y sont attachés.
Bien qu'applicables, en toute rigueur, aux seuls fluides incompressibles en écoulement isotherme, les résultats de cet article pourront être étendus aux fluides compressibles à condition que, dans ce cas, les variations de pression d'un point à l'autre de la canalisation considérée soient relativement faibles (inférieures à 50 % environ).