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RÉSUMÉ
Cet article traite des machines polyphasées à plus de deux courants indépendants en mode sain. Les courants de phase sont périodiques et identiques, mais déphasés d’un même angle entre deux phases consécutives. Le nombre de phases est défini selon les perceptions des concepteurs de la machine, du convertisseur ou du contrôleur.
Par approche vectorielle, une machine à bobinage symétrique et saillance rotorique négligeable se comporte comme plusieurs machines fictives monophasées ou diphasées, magnétiquement découplées mais mécaniquement couplées, chacune sensible à une famille d’harmoniques temporels spécifique.
Cette approche est une base pour le contrôle vectoriel des entraînements polyphasés, avec courant sinusoïdal ou non, autorisant des performances supérieures aux systèmes triphasés.
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Lire l’articleAuteur(s)
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Éric SEMAIL : Professeur des universités - ENSAM (Laboratoire d’électrotechnique et d’électronique de puissance, Lille, France)
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Franck SCUILLER : Maître de conférences (HDR) - École Navale, ENSAM (Institut de recherche et d’études navales, Brest, France)
INTRODUCTION
Contexte « historique » et économique : le nombre de phases comme paramètre de conception
Historiquement, le transport de l’énergie électrique économiquement efficace a conduit à l’adoption des systèmes triphasés à courant alternatif sinusoïdal. Les bobinages des machines électriques à courant alternatif, directement connectées au réseau, se devaient alors d’être triphasés et optimisés pour des grandeurs alternatives à formes sinusoïdales. Pour les applications nécessitant des entraînements performants à vitesse et couple variables, l’électronique de puissance et le contrôle vectoriel numérique ont permis naturellement et progressivement (de 1970 à 2010) à ces mêmes machines triphasées à grandeurs alternatives sinusoïdales de s’imposer par rapport aux machines à courant continu.
Avec l’électrification massive des transports et dans un contexte de transition énergétique, les machines électriques doivent idéalement être moins gourmandes en matières premières et leurs procédés de fabrication moins complexes, notamment pour l’étape de réalisation du bobinage : se doter de plus de paramètres de conception est bienvenu. Or, pour une machine alimentée par un onduleur, un nombre de trois phases n’est absolument plus une nécessité. Augmenter le nombre de phases devient un paramètre de conception. Il apparaît alors judicieux de maîtriser non seulement la conception des bobinages pour ces machines à plus de trois phases, mais aussi le contrôle de leurs courants qui ne sont plus, dans le principe, assujettis à la forme sinusoïdale.
Contexte « fonctionnel » : tolérance à défaillance et même qualité du couple avec moins de contraintes
Les bobinages des machines électriques dont la fonction est la création d’un champ magnétique tournant au sein de l’entrefer à partir de courants alternatifs, constituent la pierre angulaire des machines électriques.
Avec deux courants indépendants et 3 fils à connecter, les machines triphasées classiques constituent la solution minimale pour atteindre cet objectif. La solution la plus simple pour garantir par contrôle vectoriel un couple sans pulsation réside alors dans l’alimentation par des courants sinusoïdaux d’un bobinage caractérisé par une fonction de bobinage elle-même sinusoïdale, mais dans l’espace.
Avec une machine triphasée, il y a donc contrainte tant lors de l’alimentation que lors de l’étape de conception. Avec l’augmentation du nombre de phases, la même qualité de couple pourra être obtenue par contrôle vectoriel avec plusieurs harmoniques présents temporellement et spatialement, le nombre autorisé d’harmoniques augmentant avec le nombre de phases. De ce fait, les contraintes diminuent tant lors de l’alimentation (courants non sinusoïdaux) que lors de la conception (fonction de bobinage non sinusoïdale). Les libertés apportées peuvent être utilisées pour simplifier le processus de fabrication du bobinage (bobinage concentrique dentaire ou « phases juxtaposées » par exemple) ou pour réaliser de nouvelles fonctionnalités comme le changement de polarité de la machine sans modification d’aucune connexion.
Enfin, avec un nombre de courants supérieur au minimum nécessaire pour la création d’un champ tournant, une fonctionnalité supplémentaire de tolérance à la défaillance « ouverture d’une phase » est obtenue.
L’article se positionne classiquement sur le cas où les machines polyphasées comportent plus de deux courants indépendants, critère souvent considéré afin de tolérer la perte d’une phase tout en conservant un champ tournant. Néanmoins, d’autres raisons intégrant une approche système telles que le coût de fabrication de l’entraînement (machine/onduleur), la densité de couple en régime transitoire, une plage de vitesse étendue, etc., peuvent à eux seuls justifier le choix de machines polyphasées. Ainsi, sera t-il mis en évidence que les harmoniques (de courants et de forces électromotrices) peuvent améliorer les performances globales sous condition d’une alimentation électrique adaptée et cela, avec moins de contraintes au niveau de la conception qu’une machine triphasée. Ce dernier élément est favorable à une écoconception et à une réduction des coûts de fabrication de la machine. De même, la possibilité de fonctionnement avec une phase en moins peut-être vue comme celle de réduire les marges de sécurité (et donc les coûts) dans le dimensionnement des composants de puissance actifs type transistor et passifs type condensateur.
MOTS-CLÉS
machines polyphasées transformée de Concordia/Clarke machines fictives pôles lisses bobinage symétrique contrôle vectoriel
DOI (Digital Object Identifier)
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1. Appellation polyphasée, définitions et classification
L’appellation de machine électrique polyphasée requiert en premier lieu une précision selon que l’on se place du côté :
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de l’utilisateur de la machine qui voit le nombre de fils qu’il faut pour l’alimenter ;
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du concepteur de la machine qui considère le nombre de bobines électriques que l’on installe et que l’on connecte entre elles ;
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du concepteur de l’entraînement qui doit intégrer le convertisseur statique et le contrôle ;
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du modélisateur qui envisage le nombre de variables indépendantes qu’il est judicieux de considérer pour décrire et commander correctement la machine.
Ces différentes approches mènent parfois à des confusions pour la définition du nombre de phases, mais se justifient toutes de leur propre point de vue. Ce premier chapitre y sera consacré.
Dans la littérature (académique et brevet), l’appellation générique « Machine polyphasée » concernait initialement, par opposition aux machines à courant continu, avant tout les machines à courants alternatifs qui comportaient au moins deux phases au stator, afin de pouvoir réaliser un champ tournant. En effet, un minimum de deux courants indépendants est alors nécessaire : les machines triphasées couplées en étoile ou en triangle permettent d’atteindre cet objectif avec uniquement trois fils à connecter alors qu’une machine comportant deux phases non connectées entre elles nécessite déjà quatre connexions avec quatre fils en sortie.
Les machines triphasées classiquement couplées représentent donc un optimum du point de vue connexion avec l’environnement électrique, mais au prix d’une incapacité à maintenir un champ tournant si une phase n’est plus alimentée. Avec l’alimentation des machines par des convertisseurs d’électronique de puissance pour permettre un fonctionnement efficient à vitesse/couple variable, cette faiblesse nécessite un dimensionnement des interrupteurs avec marge de sécurité suffisante pour permettre de garantir un taux de défaillance en accord avec le cahier des charges de l’entraînement.
Dans la suite du paragraphe sont présentés trois critères différents utilisés pour définir un nombre de phases d’une machine :
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selon le nombre de connexions de sortie cs ;
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selon le nombre de phases angulaires...
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BIBLIOGRAPHIE
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(1) - LETELLIER (P.) - Machines à aimants permanents de forte puissance dans les systèmes de propulsion électriques. - Dans Revue d’Électricité et d’Électronique, REE 9 (2000).
-
(2) - MARTIN (J.-Ph.) - Contribution à l’alimentation en tension de machines synchrones à aimants permanents à nombre de phases élevé : fonctionnement normal et degradé. - Texte intégral accessible uniquement aux membres de l’université de Lorraine. Thèses, Institut National Polytechnique de Lorraine (2003). https://hal.univ-lorraine.fr/tel-01750171
-
(3) - FORTESCUE (C.L.) - Method of Symmetrical Coordinates Applied to the Solution of olyphase Networks. - Dans American Institute of Electrical Engineers, Transactions of the XXXVII.2, pp. 1027-1140 (1918).
-
(4) - SEMAIL (E.), LOUIS (J.-P.), FELD (G.) - Propriétés vectorielles des systèmes électriques triphasés, chapitre 4. Dans Traité de Modélisation des machines électriques. - Hermès, pp. 181-245 (2004).
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