Voitures partagées, trottinettes électriques, BHNS (bus à haut niveau de service), pistes cyclables, congestion automobile, aménagement du territoire, autant de termes qui se retrouvent régulièrement dans l’actualité et dans les débats politiques. Pourquoi la mobilité est-elle au centre des préoccupations contemporaines ?
La source principale de la mise sous projecteur de la mobilité est le changement de paradigme du « Tout à la voiture » vers une utilisation multimodale des modes de transport. La voiture est considérée depuis les fameuses « Golden Sixties » comme un élément essentiel du développement économique. Sa démocratisation à travers les différentes classes sociales est une preuve de son expansion. L’infrastructure routière s’est aussi fortement développée afin de faciliter l’accès aux agglomérations pour les automobilistes. Les traces de ce développement sont encore nettement visibles à l’heure actuelle avec de nombreuses autoroutes urbaines qui pénètrent dans le tissu fortement urbanisé des villes.
Dans le contexte belge, il est aussi à noter que les autorités ont largement favorisé cette expansion par la mise en place du système fiscal des voitures de société qui permet l’octroi par les entreprises d’une voiture à certain de leurs employés. Dans ce contexte, la voiture représente bien plus qu’un simple moyen de locomotion. En effet, elle représente la réussite professionnelle et a élevé la voiture de fonction au rang de croyance sociale. Pourtant cet octroi ne prouve en rien la détention de compétences remarquables, elle prouve seulement une évolution dans la hiérarchie dans laquelle l’individu travaille.
Au tournant des années 2000, les pouvoirs publics ont pris conscience de la nécessité d’inverser la tendance et ont mis en place des politiques de mobilité plus ou moins volontaristes visant à promouvoir le transport public par des investissements parfois massifs et, dans un second temps, par un rééquilibrage, souvent timide, de l’espace public au profit de la marche et du vélo. Ces dernières années ont vu fleurir une kyrielle de nouveaux modes de transport et de nouveaux services qui ont partiellement transformé les villes et la relation au déplacement. Toutefois, les chiffres démontrent que malgré le développement d’une offre de transport pléthorique, la demande de déplacements évolue très lentement et que les usages se modifient peu. En effet, malgré la congestion galopante, la voiture procure encore une série d’avantages perçus qui rendent complexe le changement de comportement.
Dès lors, est-il possible d’initier une transition vers l’utilisation multimodale des différents modes de transport en Belgique ou ailleurs ? Cet article visera à présenter une série d’initiatives d’expérimentation développées par le laboratoire Maestromobile pour accompagner le changement de comportement en matière de mobilité. À l’aube du Mobility as a Service (MaaS), l’ambition est de démontrer que le seul développement d’une offre de mobilité alternative et d’outils digitaux de planification des déplacements n’est pas suffisante pour enclencher des changements profonds dans la manière de se déplacer. Des dispositifs innovants seront présentés et analysés au regard des théories comportementales de Prochaska et Di Clemente et le modèle comportemental Octalysis de Yu-Kai Chou. Enfin, les résultats de ces expérimentations et leur impact environnemental seront présentés pour dégager des recommandations en vue d’une meilleure prise en compte de la gestion de la demande dans les politiques de mobilité, tant à l’échelle des territoires que des entreprises.