Avec la mise au point vers la fin des années 1970 des fibres monomodes, dont la dispersion chromatique était considérablement plus faible que la dispersion modale des fibres multimodes utilisées jusque-là, c’est l’atténuation qui était devenue la principale limitation à la portée des systèmes terrestres ou sous-marins : une simple amplification, sans nécessaire remise en forme du signal, pouvait simplifier considérablement les répéteurs. Le concept d’amplification optique directe semblait donc une alternative envisageable aux complexes répéteurs optoélectroniques, et les premiers travaux expérimentaux sur les amplificateurs optiques à semi-conducteurs (SOA) ont été publiés au début des années 1980. Mais ce n’est qu’à la fin de ces années 1980 que la recherche sur les amplificateurs optiques directs connaît une réelle accélération. En effet, jusque-là les systèmes de transmission optique n’utilisaient qu’une seule porteuse. Or, pour faire face à la demande sans cesse croissante de capacité de transmission à longue distance, il sembla judicieux de juxtaposer plusieurs porteuses modulées dans la fibre, par un multiplexage spectral permettant d’exploiter la bande passante phénoménale des fibres optiques (plusieurs dizaines de térahertz). Cependant, la nécessité d’amplifier périodiquement ce multiplex de canaux optiques avec des répéteurs optoélectroniques pose un énorme problème de coût. En effet, ces répéteurs n’étant capables de traiter qu’un seul canal à la fois, il était indispensable d’installer dans chaque poste de régénération autant de répéteurs que de canaux présents dans le multiplex. En revanche, un seul amplificateur optique direct fonctionnant sur le principe de l’émission stimulée, et doté d’une largeur de raie de fluorescence de quelques térahertz, permettrait d’amplifier simultanément tout le multiplex de canaux optiques.
C’est cette perspective qui accéléra la recherche sur les amplificateurs optiques. Deux techniques différentes d’amplificateurs optiques directs furent étudiées et développées à la fin des années 1980 : le SOA, objet de cet article, et l’amplificateur à fibre dopée à l’erbium (EDFA). L’objectif prioritaire était de mettre au point un amplificateur en ligne capable d’amplifier simultanément plusieurs canaux. Assez rapidement, c’est l’EDFA qui présenta les meilleures performances sur des points essentiels : une indépendance totale à l’état de polarisation du signal, due à la géométrie constitutive de la fibre, un facteur de bruit faible, des pertes d’insertion en ligne négligeables, et une absence totale de distorsion des signaux pour des fréquences de modulation supérieures au MHz.
Du côté du SOA, en dépit de nombreux efforts technologiques visant à améliorer sa sensibilité à la polarisation, celle-ci reste encore actuellement de l’ordre de 1 dB, valeur trop importante pour envisager une mise en cascade de nombreux composants dans un système à très longue distance. De plus, le SOA distord le signal dès que sa puissance atteint le seuil de saturation, qui est relativement bas pour l’application mentionnée. Toutefois, ces non-linéarités peuvent être exploitées pour réaliser des fonctions de traitement du signal (mentionnées plus loin) que ne permet pas l’EDFA. Par ailleurs, en jouant sur la composition des semi-conducteurs, il est possible de couvrir l’ensemble des fenêtres spectrales des systèmes de communication par fibre optique, ce que ne font pas pour l’instant les amplificateurs à fibre dopée. Enfin, leur compacité ainsi que leur fort rendement énergétique permettent d’intégrer les SOA dans les circuits optiques intégrés sur silicium en cours de développement.
Cet article est donc consacré à la présentation du SOA et à ses applications. La partie 1 développe la physique du fonctionnement d’un SOA, que ce soit en régime linéaire ou non linéaire. Les caractéristiques essentielles comme la bande passante, le facteur de bruit, la sensibilité à la polarisation, les non linéarités utilisées en traitement du signal optique sont présentées et discutées. Pour chacune d’entre elles, l’influence des différents paramètres est analysée afin de montrer sur lesquels il faut jouer pour obtenir des caractéristiques appropriées à telle ou telle application : puissance de saturation élevée, facteur de bruit faible.
Les applications des SOA sont développées en partie 2 : la conversion de longueur d’onde est expliquée et discutée, mais d’autres applications sont traitées comme la régénération optique, le démultiplexage temporel, la récupération d’horloge, la compensation de dispersion chromatique, et enfin l’amplificateur réflectif (RSOA) qui est un composant utilisé dans les réseaux d’accès optiques. Cette section met en évidence le rôle du SOA dans le traitement du signal optique.
Les différences entre le SOA et l’amplificateur à fibre dopée (EDFA) seront abordées, ainsi que leurs domaines d’application différents.
Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire et un tableau des symboles utilisés.