Le transport de marchandises opère le déplacement des biens dans l'espace et, nécessairement, dans le temps (car cette opération n'est pas instantanée, à la différence du transport des informations par les télécommunications auquel on la compare parfois). C'est une fonction technique et économique qui recoupe toutes les autres. Elle est le support indispensable à l'ensemble du système productif, de l'amont à l'aval : des approvisionnements en matières premières à la fabrication et à la distribution des produits finaux, puis au soutien d'après-vente qui accompagne toute leur durée d'utilisation. Le transport contribue, en outre, au circuit de retour des produits après leur consommation, pour leur récupération et le recyclage des déchets. Cette omniprésence, et ce caractère nécessaire du transport, en font une composante majeure de toutes les étapes du développement d'un pays, depuis les stades initiaux jusqu'aux évolutions récentes des économies les plus prospères.
D'un point de vue technique, le transport a les caractéristiques d'une activité industrielle. D'un point de vue organisationnel et juridique, quand il est exécuté par une entreprise spécialisée pour le compte d'un client, il revêt les caractères d'un service : c'est-à-dire d'une relation entre deux parties. Les divers sens du mot fret reflètent bien la diversité des acteurs qui participent au transport et leurs rôles respectifs, dans un fonctionnement de système. Selon le Dictionnaire historique de la langue française d'Alain Rey (Paris, Dictionnaires Le Robert, 1992, 2 vol.), « fret désigne le prix du transport par mer de marchandises (XIIIe s.) – aujourd'hui aussi par route, par avion –, par métonymie et couramment la cargaison elle-même (1596), le prix de location d'un navire (1606) et le louage d'un bateau de transport utilisé au transport de marchandises (1681, à fret), puis s'applique à tout moyen de transport ».
Le double aspect d'autonomie et de dépendance du transport à l'égard des autres activités concerne aussi l'innovation technique, organisationnelle et sociale. Le transport est mû par sa propre dynamique, avec des progrès constants dans les infrastructures, dans les matériels roulants et dans les systèmes d'information pilotant les flux physiques comme les relations commerciales. En même temps, il reçoit directement les effets de l'innovation des autres branches, dans le fonctionnement desquelles il s'insère. Dans le présent article, le transport est envisagé comme un process industriel. Dans l'article suivant [AG 8 006], on examinera comment il s'intègre dans des organisations logistiques plus larges et comment, par ses effets externes, il a une forte dimension politique et sociale.