Les polymères thermoplastiques et les matières plastiques (polymères une fois renforcés, formulés et/ou chargés) dont ils sont la base, comme tout matériau de structure, doivent présenter des caractéristiques mécaniques conformes à un cahier des charges, lui-même dicté par les conditions d’utilisation de la structure.
Ces caractéristiques peuvent se décliner en termes de ce qu’il est traditionnel de définir comme des « propriétés mécaniques » – telles un module d’élasticité, un seuil apparent de plasticité ou des grandeurs à rupture – ou en termes de modèle (ou de paramètres de modèle) de comportement – élastique, élasto-plastique etc. – utilisés dans les logiciels de calcul de structure.
Ces deux niveaux de conceptualisation ne sont pas disjoints, et dans les deux cas, l’utilisateur se place implicitement dans le cadre de la mécanique des milieux continus. Il cherche, ainsi, à représenter les relations existant entre la déformation d’un milieu continu, supposé représenter le matériau, et la contrainte développée dans celui-ci.
Pourtant, les processus physiques impliqués dans la déformation dépendent, bien sûr, de la nature du matériau et de sa microstructure (organisation des éléments constitutifs du matériau, cristallisation et/ou morphologie des mélanges). Ainsi, la représentativité des grandeurs mesurées peut dépendre du matériau et l’analyse associée devrait être adaptée aux matières plastiques et à leurs spécificités.
Malgré une apparente plus grande simplicité, et l’existence rassurante de normes d’identification, les notions de « propriétés mécaniques » font, elles aussi, une hypothèse a priori quant à la nature du comportement. Ainsi, identifier un module d’élasticité (ou d’Young) présuppose que les processus élémentaires de déformation confèrent au matériau un comportement élastique linéaire et déterminer un seuil de plasticité apparent (ou limite d’élasticité) n’a son sens physique plein que si les processus de déformation irréversible sont gouvernés par un seuil de contrainte.
En parallèle, le comportement mécanique des matières plastiques est caractérisé par une très grande diversité. En effet, dans cette famille de matériaux, coexistent un grand nombre de types de comportement que l’on qualifie, par habitude souvent, de viscoélastique, viscoplastique, hyperélastique, durcissant, adoucissant ou endommageable. Les spécialistes accordent à ces termes des définitions parfois plus précises mais leur sens « commun », adopté dans cet article, est rappelé dans le glossaire (§ 6). De ce fait, et d’un point de vue technologique, on peut trouver, pour les mêmes conditions d’utilisation, des matières plastiques soit rigides fragiles, soit ductiles, soit caoutchoutiques. C’est ce qui en fait leur richesse.
Cette diversité se retrouve, pour un même polymère, si l’on fait varier certaines de ses caractéristiques, sa formulation ou simplement ses conditions d’utilisation. Il peut, ainsi, être rigide fragile, ductile ou élastique suivant le cas. Cela ne veut pas dire que le comportement du polymère est variable, voire incontrôlé, mais cela illustre que les paramètres contrôlant ses propriétés mécaniques ainsi que les processus élémentaires de déformation envisageables sont nombreux. En conséquence, le dimensionnement de pièces plastiques peut être à la fois riche en solutions et difficile à contrôler avec précision.
Sur la base d’exemples de caractérisations expérimentales, cet article vise à illustrer ces diversités : notamment les transitions de comportement associées à la nature macromoléculaire des polymères et leurs impacts technologiques ainsi que, à l’occasion, les hypothèses sous-jacentes à ce type de caractérisation et les précautions indispensables à l’ingénieur pour aborder sainement la caractérisation et la modélisation du comportement mécanique de matières plastiques. La description de quelques-uns des modèles de comportement les plus simples permet d’introduire les voies de modélisation actuelles.