En une heure, la Terre reçoit du soleil une quantité d’énergie supérieure à la consommation annuelle de l’humanité entière. Cependant, la nature intermittente de cette ressource a limité la part qu’elle occupe dans le mix énergétique. Une approche prometteuse consiste à stocker cette énergie renouvelable, mais discontinue, sous forme de combustibles. Ces composés étant produits à partir de l’énergie solaire, on parle de carburants solaires (ou solar fuel). En 1972, il a été démontré qu’il était possible de produire du dihydrogène et du dioxygène par photodissociation de l’eau sur une électrode d’oxyde de titane sous éclairage solaire. Cette découverte a ouvert des perspectives prometteuses pour la production durable de dihydrogène. Comme ce procédé présente de nombreuses similitudes avec la photosynthèse, on parle parfois de photosynthèse artificielle. Il existe d’autres molécules pouvant être utilisées comme carburants solaires (par exemple, le méthanol, l’acide formique ou le formaldéhyde) mais nous allons focaliser cet article sur le dihydrogène car il est le plus prometteur et donc le plus étudié à l’heure actuel avec son comburant, le dioxygène. Le H2 présente, en effet, une forte densité d’énergie (33 kWh·kg-1), il n’est pas toxique et ne participe pas au réchauffement climatique puisque sa combustion n’engendre pas de la formation de CO2. Il est encore peu utilisé car il est majoritairement extrait à partir des ressources fossiles. Cependant, lorsqu’il est produit par dissociation photoélectrochimique de l’eau, il est suffisamment pur pour être directement employé dans les piles à combustible. Afin de rendre commercialement viables les procédés de photodissociation de l’eau, il est nécessaire d’optimiser le rendement des cellules photoélectrochimiques, d’augmenter leur stabilité et de diminuer le coût de production global de dihydrogène (entre 2 et 4 $ par kg de H2).
De nos jours, le rendement des cellules photoélectrochimiques varie entre 12 et 18 % en fonction de la nature du matériau composant la photoélectrode et de l’architecture de la cellule (simple ou multi-jonction) alors que les valeurs limites théoriques se situent respectivement à 24,4 et 30 % pour les cellules tandem et multijonctions. Des dispositifs à haut rendement et coût élevé ont déjà été mis en œuvre dans les années 2000 mais, depuis, les améliorations nécessaires à la fabrication de systèmes efficaces et compatibles avec les contraintes du marché n’ont pas été réalisées. Il est donc indispensable de réduire significativement les coûts, d’accroître fortement l’efficacité de photoconversion et d’assurer la longévité des dispositifs. Pour répondre à ce défi, on doit, évidemment, sélectionner un matériau photosensible efficace et peu onéreux mais il est aussi envisageable d’optimiser la géométrie de la photoélectrode. Des études récentes ont montré que la structuration des électrodes aux échelles micro et nanométrique ainsi que leur fonctionnalisation pouvaient déboucher sur une augmentation notable des performances des cellules.
Parmi les nombreuses approches proposées et les techniques disponibles depuis l’apparition des nanosciences et nanotechnologies, le dépôt de couche atomique (Atomic Layer Deposition : ALD) a montré son fort potentiel pour élaborer des micro et nanostructures planes ou tridimensionnelles. Ainsi dans les domaines de la production et du stockage de l’énergie, cette méthode de synthèse s’est révélée être très prometteuse. L’objectif de cet article est donc d’exposer comment, durant ces dernières années, l’ALD a été intégrée dans les diverses stratégies de fabrication de photoélectrodes afin d’améliorer leurs performances.
Nous ne visons pas, ici, la description du principe de la méthode ALD. Le lecteur est invité à se référer à l’article dédié [RE253]. La première section est consacrée à la description rapide du principe de fonctionnement d’une cellule photoélectrochimique, à l’inventaire des principaux matériaux d’électrodes ainsi qu’aux récentes pistes envisagées pour l’amélioration des systèmes. La seconde section, plus détaillée, est dédiée à la description des différents usages de l’ALD pour l’amélioration des performances et de la stabilité des photoélectrodes pour la production de H2 et de O2.