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Bruxelles dote l’Europe d’une stratégie hydrogène propre et d’une « alliance »

Posté le par Joël Spaes dans Énergie

La Commission européenne (CE) a annoncé le 8 juillet une stratégie pour développer la production d'hydrogène propre dans l’Union européenne (UE). Objectif : favoriser la décarbonation des secteurs les plus difficiles à faire basculer vers l’électrification et parvenir à la neutralité climatique en 2050.

Bruxelles couple cette stratégie hydrogène propre à celle en faveur de l’intégration du système énergétique, cadrant la transition vers une énergie verte. Une stratégie d’intégration qui vise à mettre en œuvre « une planification et une exploitation globales du système, associant différents vecteurs énergétiques, infrastructures et secteurs de consommation. Un tel système, connecté et flexible, sera plus efficace et permettra de réduire les coûts supportés par la société », indique la CE.

La CE estime qu’il « faut changer de paradigme pour atteindre les objectifs de 2030 et 2050 » en termes d’émissions de CO2. Et la production d’énergie, qui représente 75 % des rejets de gaz à effet de serre, est largement appelée à se transformer.

L’exécutif européen indique notamment que « l’électricité alimentant les voitures en Europe pourrait provenir des panneaux solaires se trouvant sur nos toits, tandis que nos bâtiments pourraient être chauffés en utilisant la chaleur produite par une usine voisine, laquelle pourrait être approvisionnée en hydrogène propre produit à partir d’énergie éolienne en mer. »

Un système énergétique mieux intégré

Pour la commissaire européenne à l’Energie, Kadri Simson : « Le système énergétique de l’UE doit être mieux intégré, plus flexible et capable d’accueillir les solutions les plus propres et les plus rentables. L’hydrogène jouera un rôle clé à cet égard, car la baisse des prix des énergies renouvelables et l’innovation continue en font une solution viable pour une économie climatiquement neutre ».

La stratégie promeut des combustibles plus propres, notamment de l’hydrogène renouvelable ainsi que des biocarburants et biogaz durables. La Commission proposera un nouveau système de classification et de certification des combustibles renouvelables à faible teneur en carbone.

L’hydrogène, un vecteur énergétique

Comme l’électricité, l’hydrogène est un vecteur énergétique, et non directement une source d’énergie provenant de la nature. Pour miser sur ce vecteur, il faut donc qu’il soit lui-même produit à partir de sources d’énergie décarbonées. À ce jour, l’hydrogène utilisé majoritairement dans l’industrie est produit à partir de composés carbonés. Avantage du vecteur hydrogène, il n’émet pas de CO2 et ne pollue pas l’atmosphère. En outre, l’hydrogène peut servir de matière première, de carburant et de solution de stockage.

Ainsi, l’hydrogène peut alimenter des secteurs qui ne se prêtent pas à l’électrification, comme certains process industriels (fabrication de l’acier notamment), ou encore les transports (poids lourds, navire, voire aviation surtout), la production d’électricité (pour autant que l’hydrogène soit issu de sources renouvelables) et même la construction.

L’hydrogène peut notamment offrir des possibilités de stockage pour compenser les variations des flux d’énergies renouvelables, « mais cela requiert une action coordonnée entre les secteurs public et privé, au niveau de l’UE », insiste la CE.

La priorité est de développer l’hydrogène renouvelable, produit principalement à partir des énergies éolienne et solaire. « Toutefois, à court et à moyen terme, d’autres formes d’hydrogène bas carbone seront nécessaires pour réduire rapidement les émissions et soutenir le développement d’un marché viable  », indique l’exécutif européen. Ce qui ouvre la voie à la production d’hydrogène via le nucléaire et via le biogaz, avec stockage et capture du carbone émis. L’objectif est de parvenir à porter la part de l’hydrogène à 13 %-14 % d’ici 2050, alors que ce vecteur ne représente aujourd’hui que moins de 2 % du mix énergétique européen.

D’où une stratégie par étapes. D’abord, de 2020 à 2024, un soutien de Bruxelles à l’installation d’une capacité d’au moins 6 GW (gigawatts) d’électrolyseurs pour la production d’hydrogène renouvelable dans l’UE, soit six fois plus qu’aujourd’hui, avec l’objectif de produire jusqu’à un million de tonnes d’hydrogène renouvelable par an en fin de période. Ensuite, de 2025 à 2030, « l’hydrogène devra faire partie intégrante de notre système énergétique intégré, avec une capacité d’au moins 40 GW d’électrolyseurs pour la production d’hydrogène renouvelable et une production allant jusqu’à 10 millions de tonnes d’hydrogène renouvelable dans l’UE ». Enfin, de 2030 à 2050, Bruxelles estime que « les technologies utilisant l’hydrogène renouvelable devraient atteindre leur maturité et être déployées à grande échelle dans tous les secteurs difficiles à décarboner. »

Une alliance européenne pour l’hydrogène propre

Afin de contribuer à la réalisation de cette stratégie, la CE lance, en parallèle, une « alliance européenne pour un hydrogène propre » avec des acteurs de premier plan du secteur, la société civile, des ministres nationaux et régionaux et la Banque européenne d’investissement. Thierry Breton, commissaire au marché intérieur, cité par la CE, précise : « L’alliance européenne pour un hydrogène propre (…) permettra d’orienter les investissements vers la production d’hydrogène. Elle constituera une réserve de projets concrets destinés à soutenir les efforts de décarbonation des industries européennes à forte intensité énergétique, telles que les industries sidérurgique et chimique. Cette alliance revêt une importance stratégique pour la réalisation des ambitions que nous nourrissons dans le cadre de notre pacte vert et pour la résilience de notre industrie. »

La Commission proposera par ailleurs des mesures stratégiques et réglementaires visant à assurer la sécurité des investisseurs, à faciliter l’utilisation de l’hydrogène, à promouvoir les infrastructures et réseaux logistiques nécessaires, à adapter les outils de planification des infrastructures et à soutenir les investissements, notamment dans le cadre du plan de relance « Next Generation EU ».

Un tel développement de l’hydrogène « propre » aura néanmoins un coût. La CE l’évalue entre 180 et 470 milliards d’euros d’ici 2050 à la fois pour la mise en œuvre des électrolyseurs (10 % environ de ce coût) mais aussi pour raccorder ceux-ci aux renouvelables. En outre, il s’agit aussi de créer les infrastructures de distribution et de stockage, sans oublier les systèmes de capture du CO2 (dans le cas de recours au biogaz).

Pour l’heure, 14 États membres de l’UE ont inclus dans leurs propres plans de relance une stratégie pour l’hydrogène ; le but est désormais de créer un effet de levier pour le secteur privé, en alliant financements nationaux et européens. L’Allemagne vient de mettre sur la table quelque 9 milliards pour développer une telle filière. Dans l’attente du plan de relance français, le seul chiffre mis en avant est celui du « plan hydrogène » présenté par l’alors ministre chargé de l’écologie, Nicolas Hulot, avec 100 millions d’euros à la clé. Dans les starting-blocks, la filière française représentée par l’Aphypac attend ainsi beaucoup des annonces du gouvernement à venir.

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Posté le par Joël Spaes


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