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Quels effets agronomiques et environnementaux d’épandages issus de résidus ?

Posté le par La rédaction dans Environnement

A la demande des ministères en charge de l’agriculture et de l’écologie, l’Inra, le CNRS et Irstea ont mené une Expertise scientifique collective (ESCo) sur les effets agronomiques et environnementaux de l’épandage des matières fertilisantes d’origine résiduaire (effluents d’élevage, composts, boues…). Un colloque de restitution des résultats de l’expertise a eu lieu le 3 juillet 2014 à Paris.

Si  l’épandage  des  déjections  animales  est  une  pratique  multiséculaire,  ce  mode  de  fertilisation organique a évolué avec l’intensification des systèmes et la spécialisation des exploitations et des territoires. Au  cours du 20e siècle,  les engrais minéraux de synthèse sont  venus compléter  voire supplanter la fertilisation organique, en permettant une gestion plus aisée des principaux éléments fertilisants que sont l’azote (N), le phosphore (P) et le potassium (K). Plus récemment, le réemploi en agriculture de matières provenant de diverses filières de traitement des déchets domestiques et industriels (eaux usées, ordures ménagères, effluents industriels…) s’est développé. Il répond à des enjeux  d’amélioration  du recyclage  des  déchets,  de raréfaction  à terme  de  certaines ressources (comme le phosphore) et de dégradation du taux de matière organique de certains sols cultivés.  

Afin de maîtriser au mieux et de réguler, si nécessaire, l’utilisation de matières fertilisantes d’origine résiduaire (Mafor), les ministères français en charge de l’agriculture et de l’écologie ont demandé à l’Inra, au CNRS et à Irstea de réaliser une Expertise scientifique collective (ESCo) sur les bénéfices agronomiques  des  Mafor  et  les  impacts  environnementaux  de  leur  épandage  (incluant  les contaminations  potentielles),  en  tenant  compte  des  intérêts,  contraintes  et  conséquences économiques et sociales de cette pratique.

Une répartition hétérogène des ressources en Mafor 

Aujourd’hui,  l’épandage de Mafor, principalement des effluents d’élevage,  concerne  le quart des surfaces cultivées en France et 30% des surfaces en prairies, inégalement réparties sur le territoire. Ainsi,  la  concentration  des  Mafor sur  certains territoires se traduit  par  l’existence  de zones  en surcapacité par rapport aux apports maximum en azote définis par la directive européenne Nitrates. Cette disparité territoriale de la disponibilité des Mafor est un enjeu fort, auquel peuvent répondre certains traitements qui en réduisent les volumes et en facilitent ainsi le transport. Des analyses complémentaires  sont  nécessaires  pour  appréhender  les  conditions  d’acceptabilité  sociale  du transport de Mafor sur de longues distances et leur compatibilité avec les cadres juridiques actuels.  

Un pouvoir fertilisant variable selon l’origine 

La plupart des Mafor présentent la particularité de contenir les trois principaux éléments fertilisants (N, P et K) pour partie sous forme organique. Si la gestion de la fertilisation par épandage de Mafor est moins aisée que le recours aux engrais minéraux, les Mafor présentent l’avantage agronomique de  constituer une voie d’apport de matière organique au sol, et la seule source renouvelable de phosphore.  Les  modalités  d’apport  des  Mafor  peuvent  cependant  être  à  l’origine  de  pertesnotamment d’azote dans l’atmosphère ou les eaux, causant une diminution de la valeur fertilisante et desimpacts environnementaux. Un apport d’agents biologiques pathogènes maîtrisable  Les  effluents  d’élevage  et  les  boues  d’épuration  urbaines,  du  fait  de  leur  origine  fécale, sont susceptibles de véhiculer des agents biologiques pathogènes, tels que bactéries, virus,  parasites, et peuvent participer à la dissémination de l’antibiorésistance. A ce jour, aucune étude publiée n’établit de lien causal entre épandage de Mafor et transmission de maladie animale, les voies multiples de contamination possible rendant difficile l’appréciation de ce lien causal. Sur la base de la littérature scientifique existante, il est en outre difficile d’évaluer la contribution des Mafor à la dissémination de l’antibiorésistance des bactéries pathogènes. Même si les travaux sont rares, certains traitements permettent  de  diminuer  fortement  la  prévalence  des  agents  pathogènes  dans  les  Mafor, sans toutefois les éliminer. Une part variable de contaminants chimiques dans les sols La majorité des contaminants (organiques ou minéraux) susceptibles d’être apportés par les Mafor le sont  également  par  d’autres  voies  de  contamination :  retombées  atmosphériques,  traitements phytosanitaires,  irrigation…  Si  les  teneurs  des  Mafor  actuellement  épandues  en  France  sont inférieures aux seuils réglementaires pour les contaminants réglementés, la lente accumulation dans les sols  de  contaminants  difficilement  dégradables  pourrait, sur  le  long terme,  conduire  à  une contamination des sols difficile à maitriser. En particulier, les comportements complexes et difficiles à évaluer des contaminants organiques dans les Mafor, les sols et l’environnement nécessitent que se poursuivent les recherches en cours dans ce domaine.  

L’optimisation de l’usage des Mafor en agriculture et leur contribution à une économie du recyclage nécessitent une bonne maîtrise des  caractéristiques des matières résiduaires « primaires » et des traitements qui leur sont appliqués. De même, les outils d’aide à la décision à la disposition des agriculteurs peuvent améliorer les pratiques d’épandage et de fertilisation et leur intégration dans les systèmes de production agricoles.  

 

Source : L’ESCo (L’expertise scientifique collective)

L’ESCo  est  une  activité  d’expertise  institutionnelle, régie  par  la  charte  nationale  de  l’expertise  à laquelle l’Inra, le CNRS et Irstea ont adhéré en 2011. Elle se définit comme une activité d’analyse et d’assemblage de connaissances produites dans des champs très divers du savoir, et pertinentes pour éclairer l’action publique. Cet état des connaissances le plus complet possible, et son analyse, ne fournit ni avis, ni recommandations, ni réponses opérationnelles aux questions qui se posent aux gestionnaires.  Dans  la  présente  expertise,  le travail s’est  appuyé sur  un  corpus  bibliographique d’environ 3 000 références, composées essentiellement d’articles scientifiques. 

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