Le risque d'accident de plain-pied (APP) est présent dans toutes les activités de la vie quotidienne et en particulier au cours de l'activité professionnelle. Cet article traite spécifiquement des accidents de plain-pied qui se produisent en situation de travail et de leur prévention. Pour cela, il semble utile d'éclairer préalablement ce que peuvent être les APP en situation de travail. En France et dans le monde du travail, le terme « accident de plain-pied » est utilisé pour évoquer une classe d'accidents du travail parmi les quarante-deux classes selon lesquelles ces accidents sont répertoriés (tableau 1). La représentation commune de ces accidents qui sont souvent appelés également « chutes de plain-pied » est une personne qui chute pendant un déplacement. De fait, les données statistiques nationales relatives aux accidents du travail ne permettent pas de connaître les circonstances de survenue des accidents répertoriés comme des APP. Des travaux ponctuels portant sur plusieurs centaines d'accidents de plain-pied survenus en entreprise ont mis en évidence que la plupart des accidents avec arrêt de travail répertoriés comme accidents de plain-pied sont des accidents déclenchés par une perturbation de l'équilibre corporel de la victime (glissade, trébuchement, heurt, faux-pas...). Ces accidents ne se produisent pas nécessairement pendant la seule activité de déplacement et ne conduisent pas forcément à la chute de la victime. Plus précisément, ces travaux semblent montrer que les APP conduisent moins souvent à la chute de la victime qu'à une lésion sans qu'il y ait chute. Une personne peut, par exemple, poser le pied sur une surface irrégulière, subir une entorse et ne pas chuter ou alors heurter un objet, subir une contusion et ne pas chuter et . Les quelques récits d'APP particulièrement graves qui seront présentés dans ce texte illustrent ce fait.
Bien que le terme « plain-pied » évoque une surface plane, on propose de considérer comme des accidents de plain-pied les accidents déclenchés par une perturbation d'équilibre de la victime et survenus sur des surfaces ne présentant aucune rupture de niveau ou présentant des ruptures de niveau telles qu'un trottoir, des marches, un plan incliné, etc.
Dans la littérature, d'autres termes sont utilisés pour évoquer un ensemble d'accidents qui comprend une partie des accidents de plain-pied, tels que définis ci-dessus, ou bien qui est inclut dans ces accidents ; par exemple les glissades , les glissades, trébuchements et chutes , les chutes ou encore les chutes de plain-pied . À notre connaissance, seuls les « underfoot accidents » font l'objet d'une définition. Il s'agit des accidents pour lesquels le premier événement imprévu se produit entre le pied de la victime et le sol. D'autres auteurs catégorisent les accidents ciblés dans le but de préciser ce qu'ils sont. Haslam et Stubbs , dans leur introduction du livre intitulé « Understanding and Preventing Falls », distinguent plusieurs types de chutes selon les circonstances (glissade, trébuchement, perturbation d'équilibre, chute de plain-pied, chute sur un sol pentu, chute dans les escaliers, chute de hauteur), l'âge de la victime ou la population concernée (adultes en bonne santé en situation de travail, personnes âgées en milieu de soin, enfants au cours d'activités sportives...). Yoon et Lockart reprennent les quatre catégories du BLS (Bureau of labor statistics) pour évoquer les accidents étudiés : les chutes de plain-pied (lorsque le point de contact avec la source de la lésion est sur le même niveau ou supérieur à la surface supportant la victime), les chutes avec dénivellation (lorsque le point de contact avec la source de la lésion est inférieur au niveau de la surface supportant la victime), les sauts vers un niveau inférieur (lorsque la victime saute volontairement même si le saut est destiné à éviter une lésion), les autres chutes.
Les premiers travaux menés dans le champ de la prévention des APP concernent la prévention des glissades, et plus particulièrement, des glissades qui se produisent sur des sols industriels gras ou en présence de neige ou de glace. Ces travaux sont présentés dans la littérature et ont fait l'objet en 2001 d'un numéro spécial dans la revue Ergonomics . Ils gravitent autour de la méthodologie de mesure de la résistance au glissement des chaussures et des revêtements de sol. S'ils sont essentiels, ils sont cependant insuffisants pour prévenir l'ensemble des APP. En effet, d'une part, les APP ne sont pas tous déclenchés par une glissade du pied sur le sol, et d'autre part, l'intérêt de prendre en compte les facteurs d'accidents qui se situent davantage en amont de la chaîne causale qui conduit à la lésion n'est plus à démontrer et .
Ce document se propose de rendre compte :
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de l'ampleur et de la gravité du risque d'APP à travers les données statistiques de la CNAMTS ;
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de la diversité des circonstances de ces accidents à travers quelques récits extraits de la base de données EPICEA ;
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des aspects réglementaires et normatifs relatifs à leur prévention ;
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de la prévention de cas de glissades par le biais de sols et de chaussures antidérapants ;
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des travaux concernant plus globalement la prévention des perturbations d'équilibre.