L’évolution thermique superficielle du métal et des outils, lors de la mise en forme à froid et à chaud, conditionne la qualité superficielle du produit obtenu, les performances du lubrifiant, le frottement résultant, et les modes d’endommagement et d’usure des outillages. Le transfert thermique aux outillages impose la température superficielle du métal : ainsi, par exemple, le filage à chaud des alliages d’aluminium durs du type duralumin engendre des défauts superficiels dits « tronc de palmier », si la vitesse de filage est trop élevée, empêchant l’énergie dissipée par déformation plastique de s’écouler dans le conteneur et la filière. Le frottement du copeau d’acier sur l’outil de tournage échauffe fortement l’outil dont la durée de vie décroît quand sa température de travail augmente. La température de travail des cylindres de laminage, à froid et à chaud, conditionne la viscosité du lubrifiant et, de ce fait, la quantité de lubrifiant s’infiltrant à l’interface métal-outil, la réactivité chimique du lubrifiant et le frottement résultant.
L’analyse de ces évolutions thermiques par les codes de calcul par éléments finis présente diverses difficultés du fait des valeurs élevées des flux thermiques mis en jeu. Par ailleurs, le calcul direct du régime thermique établi des outils nécessiterait de simuler numériquement les opérations continues durant des temps très longs (laminage, tréfilage, tournage…) ou pour un nombre élevé de cycles des opérations discontinues (forgeage, emboutissage…), ce qui reste peu envisageable actuellement sur le plan industriel, compte tenu des performances des ordinateurs et des coûts de calcul associés. L’objectif de cet article est de préciser les ordres de grandeur de ces phénomènes thermiques et de proposer des méthodes permettant de tels travaux de simulation numérique.
L’article présente d’abord un modèle simple dit « modèle parabolique » d’évolution thermique d’un corps induite par un flux thermique superficiel de courte durée, puis diverses améliorations de ce modèle pour étendre sa validité : linéarisation et inversion du modèle, étude de l’effet de l’augmentation de surface du métal et de la variation des propriétés thermophysiques du corps. Nous analysons ensuite avec ces modèles les variations de température de part et d’autre de l’interface métal-outil induites par les deux principaux phénomènes : la différence de température entre le métal et l’outil (soit initiale comme en mise en forme à chaud, soit du fait de la déformation plastique du métal) et l’énergie dissipée par frottement. Nous discutons de manière détaillée à partir de données expérimentales le problème du coefficient de transfert thermique superficiel (ou de son inverse, la résistance thermique de contact), qui conditionne fortement les transferts thermiques interfaciaux en mise en forme à chaud. À titre d’exemple, nous appliquons ces analyses à divers procédés : début du filage à chaud de barres, laminage à froid et à chaud de tôles, tréfilage de fils, usinage, soudage par friction piloté et inertiel, forgeage à chaud. Les résultats sont confrontés à des données expérimentales lorsqu’elles sont disponibles. En dernier lieu, nous précisons les conséquences thermiques de la mise en forme à chaud sur les outillages : régime thermique, cycles de contraintes superficielles, évolution de structure des aciers à outil, endommagements (faïençage, abrasion). Cela nous permet de préciser les conditions d’une simulation numérique correcte de ces effets thermiques.
Le lecteur pourra, pour introduire le sujet, se reporter à l'article [M 3 012] « Effet thermique de la mise en forme. Théorie et phénomènes volumiques ».
Un tableau explicitant les notions et les symboles est présenté ci-dessous.