Certes les bio polymères ont encore des limites. Mais les travaux des chercheurs et des industriels portent leurs fruits. Leurs propriétés se rapprochent de plus en plus des polymères standards. Jan Switten, consultant indépendant, revient sur leurs contraintes, mais aussi les caractéristiques et les opportunités qu'offrent ces produits.
Certes les bio polymères ont encore des limites. Mais les travaux des chercheurs et des industriels portent leurs fruits. Leurs propriétés se rapprochent de plus en plus des polymères standards. Jan Switten, consultant indépendant revient sur leurs contraintes, mais aussi les caractéristiques et les opportunités qu’offrent ces produits. Autant de points qu’il abordera plus en détail dans la formation intitulée « Bioplastiques : caractéristiques, applications et limites« , organisée par les Techniques de l’Ingénieur le 12 février 2010.
ETI : Les bioplastiques sont-ils beaucoup plus chers ? Quels sont les critères de comparaison ?
Jan Switten : » Les bio polymères sont effectivement plus chers que les polymères standards. Il faut compter entre 1 et 2 euros pour un polymère standard contre 2 à 7 euros pour un bio polymère comme le PLA [ndlr : Polyacide lactique]. Mais ce prix peut-être encore plus élevé. Il faut compter 10 à 12 euros pour le PHA [ndlr : Polyhydroxyalkanoate]. Ce coût est dû à deux principaux facteurs : un processus de transformation et une chaîne de production complexes qui intègre de nombreuses étapes ; et des volumes qui ne représentent encore qu’une fraction des polymères obtenus par voie pétrochimique. On ne fabrique que 220.000 tonnes de PLA par an dans le monde, 80.000 tonnes de PHA et 320.000 tonnes de biomatériaux basés sur l’amidon. Les économies s’échelle sont donc moins importantes que pour un polymère standard.
De fait, lorsqu’un industriel opte pour un bio matériau, son critère de choix n’est pas le prix, mais la durabilité. Or il y a fort à parier, qu’à l’instar de ce qui se passe aux Etats-Unis, les fabricants de plastiques du futur, sous la pression de la législation, devront indiquer l’empreinte carbone [ndlr : émission de CO2] de leurs matériaux. Ce qui, à terme, fera pencher la balance en faveur des bio matériaux car leur empreinte est en principe proche de zéro.
Les bioplastiques ont-ils toutefois des limites ?
Oui. Les caractéristiques des bioplastiques ne sont pas encore au même niveau que les plastiques standards. Les utiliser implique certaines contraintes. La plupart des bioplastiques n’offrent pas une barrière suffisante à l’humidité. Ils ne sont donc pas adaptés pour emballer des biscuits. Leur stabilité thermique doit également être améliorée, surtout pour les PLA. Jusqu’à 50 °C, ces produits sont stables, mais au delà, ce qui peut arriver dans les entrepôts de stockage, ils se déforment. Enfin, ils ont des limites mécaniques. Ils peuvent être trop durs ou trop flexibles. Résultat, ils cassent. C’est particulièrement vrai du PLA.
Parvient-on à y remédier et à se rapprocher des propriétés des polymères habituels ?
Tout à fait. Certes, les propriétés des bio polymères restent différentes de celles des polymères traditionnels, mais elles se rapprochent de plus en plus. Les bioplastiques, par exemple, offrent une excellente barrière à l’oxygène. Par ailleurs, en mélangeant un bio polymère et un polymère standard, comme l’écoflex de BASF, on parvient à obtenir des propriétés mécaniques similaires à celles des plastiques obtenus par voie pétrochimique, avec une empreinte carbone très faible. Même chose pour le PHA : ses propriétés mécaniques sont excellentes. Enfin, les bioplastiques, comme matériaux polaires, sont faciles à imprimer. Autant d’avancées qui offrent à ces produits de nouveaux débouchés, comme, par exemple, dans le flaconnage en cosmétique ou dans l’automobile. Un constructeur comme Toyota emploie des bioplastiques pour ses voitures. Cela renforce son positionnement de constructeur vert et justifie des prix plus élevés.
Et qu’en est-il du vieillissement des bioplastiques ?
Il est très variable d’un produit à l’autre. Le choix du bioplastique se fera en fonction de la durée de vie du produit et si l’on désire, ou non, qu’il soit compostable. Si l’on veut qu’un produit soit biodégradable, il faut choisir un plastique dont le vieillissement sera rapide. C’est souvent le cas dans l’emballage, mais aussi pour les récipients jetables comme les gobelets. En revanche, si l’on veut un produit avec une longue durée de vie, mais qui soit recyclable, comme dans l’automobile, il faut opter pour certains matériaux renouvelables ou pour des mélanges avec des matériaux d’origine fossile.
Quels sont les produits de base pour obtenir les bioplastiques ?
La première génération de bioplastiques était fabriquée avec des produits alimentaires tels que le maïs, le sucre de canne ou encore la pomme de terre. Ce qui pose des problèmes de déontologie. Aujourd’hui, les industriels et les chercheurs travaillent sur une deuxième génération de bioplastiques, obtenue, cette fois-ci, avec des déchets de l’agriculture ou de l’industrie forestière. Ces produits existent déjà et sont fabriqués aujourd’hui essentiellement par des entreprises américaines et japonaises. Les européens sont plus en retraits et en sont davantage au stade de la recherche. En France, l’université de Strasbourg est assez en pointe dans ce domaine, tandis qu’en Hollande, c’est l’université d’Utrecht.
Les bioraffineries sont-elles assez nombreuses aujourd’hui ?
La réponse est clairement non. Il n’y en a que quelques unes. Les plus connues sont au nombre de trois : Novamont en Italie, Cargill aux Etats-Unis et Stora Enso en Suède. Ces structures sont l’équivalent des raffineries de pétrole. Elles sont capables de fabriquer toute la palette de produits dérivés depuis les bioplastiques en passant par les biocarburants. Mais la situation devrait rapidement évoluer. Il y a une grande activité dans ce domaine en ce moment et très certainement, de nouvelles entités vont rapidement se développer.
Où en est ce marché aujourd’hui ? A quelle vitesse croît-il ?
Actuellement, le volume de production double tous les ans. C’est un marché qui croît très vite et ceci pour plusieurs raisons. Il y a la pression législative bien sûr, mais aussi celle qu’exerce les consommateurs. Par ailleurs, en raison de l’évolution des propriétés de ces produits, la distribution mais aussi l’industrie deviennent des débouchés de plus en plus importants. Aujourd’hui, les biomatériaux sont utilisés dans l’emballage, mais aussi dans l’industrie automobile, dans l’électronique et la téléphonie. »
Propos recueillis par Gautier Bernard et Anne-Laure Béranger
Formation Techniques de l’Ingénieur
12 février 2010 : Bioplastiques – Caractéristiques, applications et limites
Intervenant : Jan Switten, consultant indépendant spécialisé dans le conseil et la formation sur les plastiques et l’emballage. A ce titre, ses domaines d’expertise sont : les bio polymères, la transformation des bio polymères en film, les systèmes de cellage et d’ouverture facile, ainsi que les systèmes de barrière pour tenir au frais.
Le programme complet de la formation.
Dans la base documentaire Techniques de l’Ingénieur
[Base doc] Bioprocédés
[Base doc] Plastiques et composites
[Article base doc] : Les biopolymères : différentes familles, propriétés et applications
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