Alors que les chiffres de l’industrie automobile laissent entrevoir un léger rebond, le plan de relance du gouvernement pour ce secteur semble incompatible avec les promesses du Grenelle. Explications.
En moins d’un mois, les cours industriels de l’automobile viennent de remonter en moyenne de 38% à travers le monde. Une hausse qui dépasse largement la hausse moyenne des marchés d’actions, qui est de 19% sur la même période. Ce sont les constructeurs européens qui profitent le plus de cette embellie. En effet, les deux plus fortes hausses du secteur automobile enregistrées à la bourse concernent respectivement Renault, dont l’action a doublé en l’espace d’un mois, et Fiat, dont le titre a grimpé de 88%. A l’étranger, les Japonais Mazda et Nissan, l’Américain Ford, le Coréen Kia et l’Allemand BMW ont aussi regagné du terrain.Deux facteurs expliquent cette esquisse de reprise, qui devra de toute manière être confirmée dans les prochains mois. Ainsi, le regain général de la bourse, depuis un mois, a profité à tous les secteurs. Mais l’automobile a beaucoup plus progressé. Les investisseurs, qui ont vu l’industrie automobile s’enfoncer dans la crise avant toutes les autres branches, sont persuadés que l’automobile « touche le fond » en ce moment.Concrètement, les spécialistes affirment que le secteur automobile atteint en ce moment son pic le plus bas, et pourrait donc faire partie des segments qui pourraient à se redresser en premier. Mais la sphère financière est une chose, et la réalité économique en est une autre. Pour sortir l’industrie automobile de la crise, le gouvernement a pris des mesures destinées à dynamiser la production et à relancer les achats de voitures neuves. Or, ces mesures paraissent contradictoires avec les engagements pris par le gouvernement lors du Grenelle.
Un manque de cohérence évident
Dans le détail, le plan de relance tient en deux points principaux. D’abord, l’introduction de la prime à la casse : 1.000 euros de reprise pour l’achat d’un véhicule neuf n’émettant pas plus de 160 g de CO2 par km. Une décision destinée à dynamiser le marché automobile, mais qui se heurte frontalement aux engagements pris lors du Grenelle. En effet, la moyenne actuelle du parc automobile est aujourd’hui de 148 g de CO2 rejeté par km, et le bonus écologique ne concerne que les véhicules émettant moins de 130 g par kilomètre. Enfin, les objectifs européens pour 2012 tablent sur une moyenne de 120 g par km. Il y a donc une contradiction bien réelle entre le plan de relance annoncé et les objectifs ambitieux du Grenelle.Alors que certains attendaient du gouvernement des décisions audacieuses, comme le financement de la généralisation en série du pot catalytique, de l’alterno-démarreur ou encore du filtre à particule, c’est un plan de relance strictement industriel qui a été privilégié. Aussi, l’exigence de contreparties environnementales aux prêts octroyés aux entreprises pour relancer leur activité aurait eu un effet additionnel sur l’économie, l’environnement et sur la santé.L’absence de prise en compte du Grenelle de l’environnement a surpris, et elle est encore plus flagrante en termes d’infrastructures de transports. En effet, 46 % du budget du plan de relance de l’automobile sera investi dans la construction d’infrastructures de transport. La construction de trois nouvelles autoroutes est ainsi prévue, alors que le Grenelle avait conclu à la nécessité de stopper l’extension du réseau autoroutier national.De plus, la France se trouve déjà très bien équipée au niveau des infrastructures routières, mais est clairement en retard en ce qui concerne les transports urbains collectifs, secteur qui plus est reconnu pour son potentiel en termes de création d’emplois.
2,3% du plan de relance consacré à l’environnement
Enfin, deux derniers volets du plan de relance soulèvent de vives interrogations. Premièrement, la prise en compte à la marge des énergies renouvelables, alors que la France s’est engagée sur un chiffre ambitieux de 23 % d’énergies renouvelables dans sa consommation pour 2020. Une volonté qui paraît désormais en retrait et difficilement réalisable. Deuxième point, aucune information chiffrée sur les conséquences du plan de relance en termes d’émissions de gaz à effet de serre ou d’impact sur la biodiversité n’est disponible, ce qui est pour le moins regrettable, alors que le Grenelle avait promis l’inversion de la charge de la preuve.Au final, il y a donc une évidente incompatibilité entre le plan de relance annoncé et les objectifs du Grenelle. Dans son ensemble, le plan ne consacre que 2,3% de son budget à l’environnement. L’écart entre la volonté politique affichée lors du Grenelle et la réalité économique reste donc latent. L’Alliance pour la planète, une organisation regroupant plusieurs ONG agissant pour l’environnement, recense sur son site Internet une trentaine de projets « grenello-incompatible » en cours à l’heure actuelle, même si ces derniers ne sont pas tous financés par le plan de relance.
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