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Décryptage

Quel est le coût réel de la décarbonisation de l’économie ?

Posté le par La rédaction dans Environnement

[Tribune] Chris Goodall

Un débat est en cours au Royaume-Uni sur la question du coût de la décarbonisation, après des déclarations du gouvernement évoquant un surcoût de 2 % sur la facture d'électricité. Mais ce chiffre apparaît très sous-estimé. Chris Goodall, éditorialiste, fait le point sur le coût réel de la décarbonisation outre-Manche.

Sir David King, l’ancien conseiller scientifique du gouvernement britannique a, dans une interview accordée à la BBC, mis en doute le chiffre de 2 % évoqué par le gouvernement. Ce chiffre, qui représente le surcoût de la facture moyenne d’électricité censé financer la décarbonisation, apparaît très sous-estimé. Pour lui, le coût réel est bien supérieur aux estimations du gouvernement, de même que le seraient les conséquences financières, si on ne s’occupait pas de la menace du changement climatique.En ce qui me concerne, j’ai la forte intuition que David King a raison. La quasi totalité de notre électricité provient aujourd’hui des énergies fossiles et des centrales nucléaires. Nous nous sommes engagés à multiplier par 10 la contribution des énergies renouvelables avant 2010. Pour suivre les recommandations du Comité sur le Changement Climatique (dont la mesure phare est la décarbonisation des sources d’approvisionnement en électricité d’ici 2030), le Royaume-Uni doit :

  • finaliser la capture du CO2 dans les centrales à charbon et à gaz ;
  • développer fortement les énergies renouvelables ;
  • investir fortement dans les centrales nucléaires ;
  • investir à une échelle sans précédent dans un réseau amélioré et élargi.
Le prix de l’électricité sera bien plus élevé en 2030
Maintenant, la seule question est de savoir quel sera le coût réel de ces opérations. Les données suivantes peuvent aider à y voir plus clair :a) La capture et le stockage du CO2 pour les centrales à énergies fossiles : on estime généralement l’augmentation du coût de production d’un megawatt/heure d’électricité à 30 £. Au prix de gros actuel du megawatt (50£), le coût de la production d’électricité à partir d’énergies fossiles augmentera de 60 %.b) Les énergies renouvelables : l’éolien onshore reviendrait moins cher, mais il semble aujourd’hui que seul le offshore soit politiquement acceptable. Une croissance substantielle des capacités de production est possible. Les coûts peuvent baisser, mais si on y inclut le coût du réseau de redistribution (qui doit prendre en compte l’intermittence de l’énergie), le coût de l’éolien offshore sera supérieur de 30 à 40 £ par megawatt/heure au prix de gros actuel.c) Les centrales nucléaires : contrairement aux estimations très optimistes du Comité sur le Changement Climatique, tout laisse à penser que des centrales nucléaires solides et sûres reviendront à au moins 25 £ de plus par mégawatt/heure que les centrales à énergie fossiles actuelles.d) Le coût d’un nouveau réseau : nous avons besoin d’un nouveau réseau de transmission entre l’Ecosse et l’Angleterre et entre cette dernière et la Scandinavie, les Pays-Bas et la France. L’objectif principal est de faciliter les flux entre les zones où l’énergie est abondante et celles où elle est rare. Quand le vent ne souffle pas, le Royaume-Uni a besoin d’énergie en provenance de Norvège. On peut s’attendre à une augmentation de 5 à 10 £ par megawatt/heure.

Admettre que les problématiques environnementales et énergétiques ont un impact sur le coût de la vie
Ces chiffres suggèrent que les prix de gros du marché de l’électricité vont augmenter de 50 à 80, voire 90 £ par megawatt/heure dans les 20 ans à venir. L’impact pour les entreprises et les particuliers sera probablement autour de 33 % (en hausse) sur la facture d’électricité. Cela coûtera en soi l’équivalent d’1 % du PNB actuel. Il est utile de signaler que l’approvisionnement en électricité ne représente qu’un tiers des émissions totales de CO2 du Royaume-Uni.Mais ce coût élevé pour une industrie électrique à faibles émissions de CO2 est un prix nécessaire à payer. Il ne faut pas comparer le prix de l’électricité fossile aujourd’hui et le prix de l’électricité dans une économie à faibles émissions de CO2. Le bon raisonnement consiste à évaluer le coût probable de l’énergie dans 10 ou 20 ans. Personne ne peut douter que les prix de l’électricité seront bien plus élevés en 2030 qu’aujourd’hui. Le gouvernement ferait mieux de l’admettre une bonne fois pour toutes plutôt que de s’entêter à croire que les problèmes liés au changement climatique et à la sécurité énergétique peuvent être traités avec un impact minimal sur le coût de la vie.En savoir plusChris Goodall est l’auteur, entre autres, de 10 Technologies pour sauver la planète. Il est également éditorialiste pour The Independant on Sunday et le Guardian. Lire son blog.  

Posté le par La rédaction


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