Sébastien Lecornu a tenté lundi de rassurer les patrons inquiets des taxes « délirantes » votées à l’Assemblée nationales, tout en égratignant les députés « déconnectés de la vie réelle » qui tardent à boucler l’examen des projets de budget.
« Le péril qui pèse sur l’économie française, c’est l’absence de budget », a prévenu le chef du gouvernement devant des représentants des patrons, à une table-ronde du salon Choose France qui mettait à l’honneur les entreprises françaises investissant dans leur pays.
L’examen du projet de budget a repris lundi à l’Assemblée, avec le risque d’être transmis au Sénat sans vote sur l’ensemble du texte, comme celui de la Sécurité sociale mercredi, faute de temps.
Représentants du Medef, des industries et des marchés financiers ont tous fait part de leur perplexité devant l’issue incertaine des débats parlementaires comme devant le contenu du futur budget.
Alexandre Saubot, président de France Industrie, s’est inquiété de projets fiscaux « délirants ». Jacques Creyssel pour le Medef a déploré que la « conjoncture politique et les décisions fiscales » conduisent les PME à reporter leurs investissements, « symptôme d’une crise extrêmement grave ».
Le Premier ministre leur a demandé de se rassurer parce que des taxes votées en première lecture à l’Assemblée « n’auront jamais d’application », rappelant avoir saisi le Conseil d’Etat à leur sujet, et faisant valoir que la taxe Zucman sur les hauts patrimoines ne figurait pas dans le projet de budget.
– « Agendas cyniques » –
Il a également défendu la politique de l’offre chère à Emmanuel Macron. « Croissance, travail, emploi, investissement, innovation, outils de production, (…) c’est le moteur d’avenir », a-t-il plaidé, en regrettant qu’elle soit « minoritaire » à l’Assemblée, où les députés ont des « aspirations à la justice fiscale ou sociale » mais « qui se déconnectent complètement de l’économie réelle ».
Sébastien Lecornu a dit pourtant n’avoir « aucun regret » d’avoir renoncé au 49.3, qui a permis de redonner la main au Parlement au risque que les débats s’enlisent, pointant à cet égard du doigt les oppositions.
Il a repris son image du « filtre à café », assurant que les textes pouvaient décanter entre les premières et dernières lectures à l’Assemblée, et fait porter par avance la responsabilité d’un éventuel échec aux oppositions.
« On peut ne pas y arriver si les partis politiques (…) viennent nous imposer leur propre calendrier, leur propre logique qui, rarement, sont compatibles avec la vie économique ou la vie réelle du pays », a-t-il dit en ciblant les « agendas cyniques de brutalité, de désordre » de la France insoumise.
LFI réclame davantage de temps pour débattre et avait notamment fustigé, comme d’autres formations politiques, la décision du gouvernement de ne pas siéger ce week-end.
– « Dernière chance » –
Craignant un recours par l’exécutif à des ordonnances si les textes n’étaient pas examinés dans les délais, le député LFI Eric Coquerel, président de la commission des Finances de l’Assemblée, a écrit au Premier ministre lundi pour lui demander de renoncer officiellement à cet outil constitutionnel.
Le Premier ministre a de son côté souhaité un compromis sur le budget « avant » fin décembre, « parce que s’il n’y a pas de budget, ce sera un mauvais compromis en gestion de crise plus tard ».
Si le budget ne peut être voté, le chef du gouvernement dispose aussi de la loi spéciale qui permet de reconduire les crédits de 2025. Mais le Parlement devrait débattre de nouveau en 2026 d’un budget pour l’ensemble de l’année.
Alors qu’il disait jusqu’à présent faire confiance aux parlementaires, Sébastien Lecornu a insisté pour que le gouvernement de centre-droit « affirme encore plus fortement (ses) convictions », se disant par exemple partisan du pacte Dutreil, qui facilite la transmission d’une entreprise familiale.
Pour autant, le monde des affaires ne peut « pas faire comme s’il n’y avait pas non plus une démocratie et un Parlement » sans majorité claire, a-t-il dit en invitant le patronat à participer aux concertations avec les syndicats sur la réforme des retraites, qui doit être suspendue jusqu’à la présidentielle.
La suspension « j’ai dit que je n’y étais pas favorable » mais « j’ai dû la proposer pour débloquer la situation », a-t-il expliqué, rappelant qu’il menait une « opération de la dernière chance » car à ses yeux comme à ceux du président, une censure équivaudrait à une dissolution.
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