Le bruit audible des machines électriques, qui participe à leur impact environnemental au même titre que leur consommation électrique ou leur recyclabilité, est devenu un critère majeur durant leur phase de conception, à la fois dans les applications industrielles, où l'exposition au bruit a un impact direct sur la santé, et dans les transports pour des raisons de confort acoustique.
Le niveau de bruit global d'une machine électrique provient de trois sources principales : le bruit d'origine mécanique (roulements, engrènements, etc.), le bruit d'origine aéraulique (ventilation) et le bruit d'origine magnétique. Dans les machines à courant alternatif, ce dernier peut dominer le niveau de bruit total à basse vitesse . Il est produit par les courants présents dans la machine asynchrone et se caractérise souvent par une désagréable émergence de raies acoustiques. Cette tonalité est par ailleurs pénalisée par la norme de limite de bruit CEI 60034-9 : la compréhension du phénomène de bruit d'origine magnétique est donc primordiale en vue de concevoir des machines silencieuses, ou de diagnostiquer et résoudre des problèmes de bruit sur des machines existantes. Les vibrations magnétiques sont également source de fatigue mécanique, ce qui dégrade la fiabilité de la machine électrique. Leur analyse et leur minimisation permet donc d'améliorer la durée de vie de la machine.
La prédiction du bruit d'origine magnétique relève de la modélisation multiphysique : elle nécessite à la fois un modèle électromagnétique de l'excitation de la machine et un modèle vibroacoustique de la structure excitée. De plus, le bruit doit être simulé en régime variable afin de prendre en compte les phénomènes de résonance : l'utilisation d'outils éléments finis électro-vibroacoustiques lors de la phase de conception soulève donc des difficultés, tant du point de vue du temps de calcul que du couplage numérique. Des modèles analytiques électromagnétique, vibratoire et acoustique ont donc été développés . Leur rapidité permet également de les coupler à un algorithme d'optimisation multi-objectif en vue de concevoir des machines à faible niveau de bruit magnétique, à faibles pulsations de couple et à haut rendement .
Si les pulsations de couple peuvent en effet provoquer du bruit et des vibrations supplémentaires, que l'on peut limiter en agissant par exemple sur les harmoniques de courant en fonctionnement , les moyens de prédiction et de réduction ne seront pas abordés dans le présent article.
Dans un premier temps, nous nous attacherons à caractériser l'ensemble des phénomènes susceptibles de produire du bruit audible d'origine magnétique dans les machines asynchrones de faible à forte puissance (quelques centaines de watts à quelques centaines de kilowatts). L'influence de l'alimentation par modulation de largeur d'impulsion (MLI) [E 3 967] [D 3 642] [D 3 643] sera également traitée, et certains aspects psychoacoustiques seront discutés. Dans un second temps, des outils de prédiction du bruit magnétique seront exposés (méthodes analytiques, graphiques et numériques). Des règles de conception permettant de réduire le bruit magnétique seront ensuite présentées. Enfin, nous verrons comment interpréter en pratique l'origine du bruit magnétique à l'aide de sonagrammes expérimentaux.