Au même titre que leur rendement ou leur recyclabilité, le bruit acoustique émis par les machines électriques est aujourd'hui un critère déterminant de leur impact environnemental. La proximité de plus en plus importante de l'homme avec ce type de machines, dans le cas d'applications industrielles ou dans le domaine des transports avec le véhicule électrique ou le tramway urbain, incite les ingénieurs à intégrer cette problématique en amont du processus de conception.
Dans le même temps, la minimisation des coûts des matières premières suggère des structures mécaniques de machines électriques plus déformables, donc plus bruyantes.
Le niveau de bruit global d'une machine électrique provient de trois sources principales : le bruit d'origine mécanique (roulements, engrènements, etc.), le bruit d'origine aéraulique (ventilation, turbulences, etc.) et le bruit d'origine magnétique. Dans les machines actuelles, ce dernier peut généralement dominer les autres sources de bruit, notamment à basses vitesses où le bruit aéraulique est encore faible. De plus, le bruit acoustique d'origine magnétique se caractérise par des émergences fréquentielles pures perçues comme gênantes, dans la plage fréquentielle la plus sensible de l'oreille humaine (100 Hz à 10 kHz). La compréhension des phénomènes à l'origine du bruit acoustique d'origine magnétique est donc primordiale en vue de concevoir des machines silencieuses, ou de diagnostiquer et de résoudre des problèmes de bruit sur des machines existantes.
Le bruit d'origine magnétique est principalement lié à la création de forces magnétiques au sein de la machine électrique qui ont tendance à déformer ses parties magnétiques. Les déformations des parties magnétiques de la machine vont générer un rayonnement acoustique perceptible par l'oreille humaine. Prédire le bruit d'origine magnétique relève donc de la modélisation multiphysique : elle nécessite à la fois un modèle électromagnétique de la machine, permettant de déterminer les forces d'excitation, et un modèle vibroacoustique de la structure excitée. De plus, le bruit doit être simulé en régime variable afin de prendre en compte les phénomènes de résonance lorsque les fréquences de l'excitation croisent celles des modes propres de la structure de la machine.
L'utilisation d'outils numériques de type éléments finis électromagnétiques et vibroacoustiques lors de la phase de conception permet d'obtenir des niveaux de précision très appréciables. Cependant, cette modélisation soulève des difficultés, tant du point de vue du temps de calcul que du couplage numérique entre les différents modèles. Des modèles analytiques électromagnétique, vibratoire et acoustique ont donc été développés. Leur rapidité permet de les coupler à des algorithmes d'optimisation en vue de trouver les compromis optimaux entre des objectifs tels que la minimisation du bruit magnétique et la maximisation des performances.
Dans un premier temps, nous nous attacherons à caractériser l'ensemble des phénomènes susceptibles de produire du bruit audible d'origine magnétique dans les machines synchrones, fractionnaires ou non, de types à aimants permanents, en surfaces ou enterrées, ou à rotor bobiné. Les machines à réluctance variable, ayant un comportement électrotechnique propre, ne seront pas directement abordées dans cette étude. Malgré tout, les développements et les conseils de conception qui seront présentés sont globalement généralisables à ce type de technologie.
Dans un second temps, des outils de prédiction du bruit magnétique seront exposés (méthodes analytiques et numériques). Des règles de conception permettant de réduire le bruit magnétique seront ensuite présentées. Enfin, nous verrons comment interpréter en pratique l'origine du bruit magnétique à l'aide de sonagrammes expérimentaux.