On entend dire parfois que le Kanban fonctionne en flux tiré et MRP en flux poussé. En réalité, les choses ne sont pas si simples, car une méthode du type MRP peut très bien générer un flux de produits à l’atelier dont les caractéristiques s’approchent de celles d’un flux tiré en juste à temps (JAT), si l’incertitude sur les ventes est faible, les délais de réalisation courts et les lancements effectués le plus tard possible. A l’inverse, un système Kanban appliqué avec un nombre excessif de tickets, sous prétexte que les machines ne doivent pas s’arrêter, s’apparente davantage à un flux poussé qu’à un flux tiré.
La distinction entre flux poussé et flux tiré ne tient pas tant à la méthode de programmation de la production qu’à la façon de l’appliquer :
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si on engage la production en tout point du processus en suivant l’ordre défini par un programme de travail et ceci dès que les ressources sont disponibles (matières, machines, main-d’œuvre) et sans prendre en compte les besoins à court terme du processus aval (ou du consommateur final), on dit que le flux est poussé ;
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si la décision de produire dépend des besoins à court terme du processus aval (ou des besoins réels du consommateur), on dit que le flux est tiré.
Le flux poussé reflète l’optique d’un « producteur », qui cherche à tirer profit de ses ressources en respectant son programme de livraison. Le flux tiré reflète l’optique d’un fournisseur qui cherche à rendre à son client le service précis que celui-ci désire.
Dans l’article « Enjeux de la logistique » de ce traité [3], Pascal Eymerie évoque l’idée de complexité dans les systèmes logistiques et en particulier concernant l’indépendance des décisions de gestion industrielle dans le cas des ressources partagées. La complexité d’un système logistique est accrue par différents facteurs : variété des produits fabriqués, inertie des décisions de capacité et de flux, incertitude de la demande commerciale, existence d’aléas de production (pannes machine, problème de qualité, etc.).
Mais en fait, comment gère-t-on un système complexe ? Le présent article retrace l’évolution des systèmes de planification en flux poussé en production de type MRP (Management des Ressources de Production) et en distribution de type DRP (Planification des Ressources de Distribution).
Avant l’apparition des méthodes MRP et DRP, la gestion de la production et de la distribution se résumait bien souvent à une gestion par les niveaux de stock. Les méthodes MRP et DRP s’adaptent plus particulièrement aux industries qui fabriquent et assemblent de nombreux composants à la commande ou en petites séries, selon le type de production par lots. C’est en effet dans ce type de situation que les flux de production sont les plus difficiles à gérer. Ces méthodes sont particulièrement adaptées aux industries mécaniques et aux industries d’assemblages. Des extensions ont été conçues pour gérer la production en ligne.
Si les méthodes de type Kanban s’adaptent à une production stable, les systèmes MRP/DRP s’adaptent plus facilement à tout type de contexte. C’est grâce à cette caractéristique qu’il sera possible d’installer des systèmes Kanban dans des environnements instables.
Dans cet article nous développerons les systèmes de type MRP, les systèmes de type DRP, puis nous analyserons les interactions MRP, JAT, TQM (Total Quality Management).