Le principe d'« inertie biologique » a longtemps présidé à la conception des matériaux destinés à être implantés en milieu vivant : ce principe préconise de réduire au maximum la réponse engendrée par l'introduction d'un corps étranger dans l'organisme. Pourtant, afin d'améliorer l'intégration de l'implant, il peut être souhaitable que celui-ci interagisse positivement avec les tissus hôtes. C'est le cas des matériaux bioactifs, capables d'accélérer la réparation tissulaire. Au premier rang, en termes de bioactivité, se situent les verres bioactifs.
Les verres bioactifs ou bioverres trouvent leur utilisation principale dans la réparation des tissus osseux. Dans ce domaine, la principale limitation des implants est la faible résistance mécanique de l'interface avec les tissus environnants. Les verres bioactifs répondent élégamment à ce problème grâce à l'établissement par réactions physico-chimiques d'une continuité avec les tissus, recréant ainsi une interface naturelle. Les verres bioactifs ont également la propriété d'être résorbables, disparaissant à mesure qu'ils sont substitués par le tissu néoformé. De plus, les produits ioniques issus de leur dissolution peuvent avoir un effet bénéfique sur le mécanisme de réparation par les cellules osseuses. Cet ensemble de caractéristiques démontre les capacités d'ostéo-intégration absolument remarquables des bioverres, parfois même supérieures aux autogreffes.
Nous évoquerons dans le détail les facteurs déterminant la bioactivité dans les verres, qui est liée autant à leurs structure et morphologie qu'à leur composition. Ces paramètres étant aisément ajustables par procédé de fusion et plus encore par le procédé sol-gel, il en résulte que la bioactivité dans les verres peut être contrôlée finement et adaptée à une grande variété d'applications. Malgré tout, et en dépit de quelques succès cliniques et commerciaux importants, les verres bioactifs ne restent que modérément utilisés par les praticiens, principalement pour des raisons de mises en forme qui seront abordées dans cet article.
Il n'en demeure pas moins vrai que le futur de la régénération osseuse est en partie lié à l'essor des verres bioactifs, que ce soit sous forme de supports pour la reconstruction de greffons tissulaires in vitro, ou comme constituants de nouveaux matériaux composites et hybrides mimant de mieux en mieux l'os.
Dans le premier paragraphe de cet article, nous définirons la notion de bioactivité (§ 1.1) et préciserons les mécanismes mis en jeu dans le cas des bioverres (§ 1.2). Le deuxième paragraphe présentera les différents procédés d'élaboration possibles pour ces matériaux (§ 2.1 et § 2.2) et les méthodes pour obtenir une structuration à l'échelle nanométrique (§ 2.3). Seront ensuite présentés les domaines de recherche les plus récents concernant la préparation de supports macroporeux (§ 2.4) et de matériaux composites et hybrides à base de bioverres (§ 2.5), puis l'élaboration de verres dopés et l'influence des produits de dissolution seront évoquées (§ 2.6). Enfin, dans le troisième paragraphe, les diverses applications des bioverres seront présentées.