L'intérêt porté aux alliages de titane utilisés dans le domaine médical pour le remplacement et la reconstruction des tissus osseux s'est considérablement accru durant les dernières décennies. Leurs champs d'application sont vastes : chirurgie maxillo-faciale, ORL, orthopédique, implantologie... Ces alliages représentent un enjeu économique et sociétal considérable. Du fait de l'augmentation de l'espérance de vie, ces matériaux sont amenés à répondre à un cahier des charges de plus en plus exigeant en termes de biocompatibilité chimique, mais également mécanique afin de perdurer dans le corps humain. Le succès de l'opération repose en grande partie sur les mécanismes complexes d'ostéointégration comportant à la fois des aspects mécanique et biochimique se produisant à l'interface implant/tissus environnants.
L'ostéointégration d'origine mécanique, qui conditionne une grande part du remodelage osseux (c'est-à-dire la réponse cicatricielle de l'os), a été longtemps ignorée dans les problématiques de choix des biomatériaux lors de la conception des prothèses et implants. Les critères recherchés se sont longtemps essentiellement limités à une bonne tenue à la corrosion, une résistance mécanique élevée et une bonne ductilité pour faciliter la mise en forme. Or, la présence d"un implant dans l"os conduit à une redistribution des contraintes mécaniques (phénomène appelé « stress-shielding »). Une trop forte différence de rigidité entre l'os et l'implant entraîne l'apparition de zones de concentration des contraintes et de zones non chargées à l'origine de nécrose ou d'ostéolyse qui compromettent la tenue de l'implant. Les propriétés mécaniques des implants/prothèses, et particulièrement le module d'élasticité, doivent donc être soigneusement adaptées, car elles conditionnent la qualité du transfert de contrainte à l'interface implant/os.
Le titane pur et l'alliage TA6V sont des matériaux qui offrent le meilleur compromis en termes de combinaison de propriétés, en particulier en raison de leur module élastique (E = 100 GPa) (deux fois plus faible que celui des aciers), une résistance élevée de l'ordre de 900 à 1 000 MPa et une biocompatibilté reconnue pour le titane. Cependant, l'adéquation du module d'élasticité de ces alliages avec celui de l'os cortical n'est pas parfaite ; ce dernier étant évalué à 20 à 30 GPa. De plus, la présence d'éléments comme le vanadium ou l'aluminium engendre des risques de toxicité évoqués par les professionnels de la santé parmi les causes d'échec de l'implant.
Les recherches se sont donc récemment orientées vers le développement de nouveaux alliages de titane, dont le biomimétisme prendrait en compte l'adaptation des propriétés mécaniques des implants à la matrice osseuse. Les alliages de titane, comportant uniquement des éléments non toxiques, représentent une excellente alternative aux matériaux cités précédemment. Plus particulièrement, les alliages de titane de type β-métastable suscitent un grand intérêt pour les applications biomédicales. Du fait de leurs caractéristiques métallurgiques, ces alliages disposent d'une très large gamme de propriétés qui peuvent être modulées par des traitements thermiques et/ou mécaniques, en vue d'obtenir un meilleur compromis entre les propriétés mécaniques et élastiques et de répondre au mieux aux spécificités requises pour les applications envisagées.
Cet article a pour objectif de présenter l'intérêt des alliages de titane à bas module d'élasticité pour la réalisation d'implants et de prothèses. Ces alliages, objet de récentes études, ont vocation à mieux prendre en compte les différences de comportement mécanique et tout particulièrement le comportement élastique à l'interface os/implant, mieux que ne le fait le titane pur et l'alliage TA6V.