Au cours des dernières décennies l'utilisation accrue des moyens de télécommunication comme les téléphones mobiles et autres réseaux sans fil, dans un cadre professionnel ou sur les lieux publics, a soulevé la question de l'exposition aux champs électromagnétiques et de leurs effets sur la santé.
La dosimétrie électromagnétique radiofréquence désigne l'ensemble des techniques de mesure et de modélisation qui permettent d'établir la relation entre la distribution de champ électromagnétique incident et les champs induits dans les tissus du corps humain et de calculer la puissance des rayonnements électromagnétiques absorbée.
Le débit d'absorption spécifique ou DAS, défini comme la puissance électromagnétique dissipée par unité de masse de tissu biologique, exprimé en watts par kilogramme, représente le paramètre dosimétrique de base, du fait de son utilisation dans les réglementations internationales sur la protection contre les champs électromagnétiques, et qu'il permet d'évaluer les effets biologiques observés dans différentes conditions d'exposition.
Alors qu'un téléphone mobile émet en général quelques watts, une station de base de téléphonie mobile peut émettre des puissances de l'ordre de la centaine de watts. Par contre, il est clair que les niveaux de puissance absorbés en champ proche par l'utilisateur d'un téléphone mobile seront plus importants que les niveaux d'exposition à proximité d'une station de base.
Afin de déterminer de manière rigoureuse les niveaux de DAS pour les différentes configurations possibles, des méthodes et techniques de dosimétrie ont été développées. Celles-ci peuvent être expérimentales, mais aussi théoriques et numériques.
La dosimétrie expérimentale consiste à mesurer le DAS directement dans un échantillon exposé aux champs électromagnétiques, de tissus biologiques ou quand ce n'est pas réalisable, dans un mannequin ou fantôme réalisé pour représenter, aussi fidèlement que possible, les propriétés morphologiques et électromagnétiques de tout ou partie du corps humain. Pour cela, des sondes de champ électrique ou des sondes thermiques peuvent être utilisées, car le DAS découle de la répartition du champ électromagnétique dans les tissus qui se traduit alors par un échauffement de ces tissus.
La dosimétrie théorique et numérique est la résolution directe des équations de Maxwell qui décrivent l'interaction entre le champ électromagnétique et le milieu biologique ou équivalent. Les progrès tant au niveau des codes de calcul que des moyens informatiques ont considérablement amélioré les performances de ce type d'analyse, ce qui permet de traiter des modèles de plus en plus complexes, précis et réalistes des milieux exposés avec rapidité et efficacité.
Cet article traite du DAS et des moyens, théoriques ou expérimentaux, qui peuvent être mis en œuvre pour son évaluation.
En première partie nous présentons le contexte normatif et sociétal, important pour ce domaine. En partant de travaux scientifiques réalisés depuis de nombreuses décennies, des recommandations sont établies quant aux niveaux limites d'exposition aux champs électromagnétiques pour assurer la protection contre les effets sur la santé. Ces recommandations conduisent à des réglementations au niveau des États sur les limites d'exposition tant dans le cadre professionnel que grand public. Des normes en support de ces réglementations sont produites sur les moyens de mesure à mettre en œuvre pour contrôler les niveaux d'exposition.
En seconde partie, nous rappelons les bases de l'électromagnétisme appliqué à la dosimétrie. Les équations de Maxwell sont présentées ainsi que l'interaction entre le champ électromagnétique et le milieu, compte tenu de ses propriétés diélectriques.
En troisième partie, nous mettons donc l'accent sur les milieux biologiques et les liquides équivalents. Nous donnons quelques exemples de formulations permettant d'obtenir des valeurs de permittivité équivalentes aux tissus biologiques et nous présentons des méthodes de mesure avec les incertitudes associées de la permittivité complexe. Ces méthodes s'appuient sur l'utilisation de liquides de référence dont la permittivité est connue.
Enfin, en quatrième partie, nous abordons la mesure du DAS et l'incertitude associée, qui nécessairement dépend en partie des mesures de permittivité. Nous présentons le système de mesure standard, utilisant des sondes de champ électrique pour obtenir la valeur du DAS et nous présentons différents types de fantômes destinés à recueillir le liquide équivalent tissu et permettre de simuler tout ou partie du corps humain soumis à l'exposition. La mesure du DAS représente finalement l'un des outils principaux qui permettent de valider la conformité des équipements aux réglementations sur l'exposition aux champs électromagnétiques.