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L’espace, nouvel el dorado commercial ?

Posté le par Matthieu Combe dans Environnement

Les Etats-Unis viennent d'adopter une loi autorisant l'extraction commerciale des ressources minières spatiales. La course aux trésors cosmiques est lancée !

En novembre 2014, après plus de 10 ans de voyage, l’agence spatiale européenne réalisait une grande première dans l’aventure spatiale : la sonde Rosetta se plaçait en orbite de la comète 67P/Tchourioumov-Guerassimenko et envoyait à sa surface l’atterrisseur Philae. Dans quelques années, les américains espèrent de leur côté faire atterrir des « bulldozers » sur des astéroïdes pour extraire leurs ressources.

Les Etats-Unis viennent d »adopter « The US Commercial Space Launch Competitiveness Act » ou « Space Act ». Cette loi prévoit que « toutes les ressources d’astéroïdes obtenues dans l’espace sont la propriété de l’entité qui les a obtenus », c’est-à-dire de tout américain ou entreprise américaine. Cette nouvelle loi autorise la prospection de l’eau et des métaux des astéroïdes, leur extraction et leur vente aux Etats-Unis. C’est le début d’une nouvelle ère de la conquête spatiale.

Si une entreprise américaine peut s’accaparer les ressources d’un astéroïde, elle ne pourra néanmoins pas se déclarer propriétaire du corps céleste, en accord avec le traité international de 1967 qui régit l’exploration spatiale. Ce traité stipule en effet que les États ne peuvent pas se déclarer propriétaire d’une parcelle spatiale. Il faut dire qu’à l’époque, on ne pensait pas encore à l’exploitation commerciale de l’espace !

Des ressources à gogo

Pionnières dans le secteur, Deep Space Industries (DSI) et Planetary Resources, des entreprises de transport ou de forage spatial, lancent la course pour conquérir ces nouvelles mines. Extraction de platine, de nickel, d’or, de fer ou encore de glace… les richesses enfermées dans les astéroïdes sont considérables. Ces ressources ne seront pas toutes ramenées sur Terre, elles permettront également d’approvisionner la Station spatiale internationale (ISS) et les futures missions d’exploration ou de colonisation de l’espace en eau et carburant. Cette exploitation permettrait de réapprovisionner les engins spatiaux en eau potable, mais aussi en carburant via la production d’hydrogène par hydrolyse de l’eau. La première « station-service » de l’espace pourrait ainsi naître pour ravitailler les navettes parties à la conquête de l’espace.

Cette loi permet de consolider le modèle économique de ces sociétés et d’attirer les investisseurs grâce à un cadre légal clair. « Cette économie hors de la planète va améliorer à jamais nos vies ici sur Terre. Nous célébrons cette loi car elle crée un environnement favorable à la croissance de notre industrie naissante, en encourageant l’investissement du secteur privé et en assurant un environnement réglementaire de plus en plus stable et prévisible », se félicite Chris Chris Lewicki, Président et ingénieur en chef de Planetary Resources.

Une industrie très rentable

Les premières missions de prospection devraient intervenir à compter de 2017 et s’étaler jusqu’en 2019, selon les différents acteurs interrogés par l’AFP. Elles viseront à confirmer les données disponibles sur des astéroïdes facilement accessibles. Selon la Nasa, environ 10 % des 1 500 astéroïdes facilement accessibles seraient dotés de ressources minières importantes. Si le début de l’extraction ne devrait pas commencer avant 2020, Chris Lewicki prévoit la création d’une économie du ravitaillement en carburant dans l’espace dans les dix prochaines années.

Ce marché serait juteux. Il devrait atteindre les 3 000 milliards de dollars dans les dix à quinze prochaines années, selon DSI et Planetary Resources. Et pour cause : un seul astéroïde pourrait contenir plus de platine que tout ce qu’on a extrait du sous-sol de la Terre à ce jour. Les ressources d’un seul astéroïde riche en minerais peuvent s’évaluer à plusieurs milliers de milliards de dollars.

Selon ses défenseurs, cette nouvelle industrie pourrait être la clé de la conquête spatiale. Car l’exploitation de ces ressources pourrait permettre d’installer les premères colonies lunaires, martiennes ou ailleurs. Elle permettrait aussi de construire les navettes en orbite pour éviter les lancements, fortement émetteurs de gaz à effet de serre.

Quelles sont les critiques ?

Cette loi accorde un droit de propriété opposable uniquement aux États-Unis. Mais rapidement, d’autres pays devraient voter des lois similaires pour leurs entreprises afin de ne pas laisser les Etats-Unis s’approprier l’espace . Mais dans cette nouvelle conquête spatiale, les pays pauvres seront encore les grands perdants.

L’extraction des minerais dans l’espace pourra là encore nuire à l’environnement autour de la Terre et, éventuellement, conduire à des conflits sur les ressources. Que se passera-t-il lorsque deux sociétés de nationalités différentes défendront leur droit de propriété sur les ressources d’un même astéroïde selon leurs lois nationales ? La règle du premier arrivé, premier servi, sera-t-elle la règle, comme dans la ruée vers l’or ?

Les mêmes problèmes que sur Terre semblent pointer le bout de leur nez dans l’aventure spatiale. « L’idée que les entreprises américaines peuvent, sur la base de leurs seules lois nationales, exploiter systématiquement les ressources minérales dans l’espace , en dépit des risques environnementaux énormes montre réellement l’audace de la cupidité », s’insurge Gbenga Oduntan, Maître de conférences en droit du commerce international à l’Université de Kent. Dans la course infinie à la croissance, l’espace semble bien être le nouveau terrain de jeu des « grandes » nations.

Par Matthieu Combe, journaliste scientifique

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