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Se trouve dans Énergie

Le CCUS, une nécessité industrielle en quête d'un modèle économique

Publié en novembre 2025

Le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (CCUS) occupent aujourd’hui une place centrale dans les stratégies de décarbonation de l’industrie lourde. C’est ce que confirme une étude de l’AIE, qui voit en cette technologie un levier indispensable pour réduire les émissions « incompressibles » du ciment, de l’acier ou de la chimie, entre autres. Le CCUS demeure pourtant une solution ambivalente, à la fois nécessaire et limitée, dont les conditions d’usage, de maturité et de rentabilité doivent être soigneusement encadrées.

Le CCUS renvoie une image paradoxale : malgré son rôle annoncé dans la transition énergétique, la quasi-totalité des cinquante projets opérationnels dans le monde est encore liée à la production ou à l’usage d’hydrocarbures. En effet, environ 80 % du CO₂ capté sert aujourd’hui à la récupération assistée de pétrole. Cette réalité alimente l’idée que le CCUS prolonge parfois artificiellement l’exploitation des infrastructures fossiles existantes, tandis que de nombreux projets plus vertueux échouent en raison d’un manque de performance ou de modèles économiques viables. Dans certains secteurs, les industriels invoquent l’absence d’alternatives pour justifier des plans très dépendants du CCUS, alors même que les solutions de sobriété, d’électrification ou de substitution de procédés gagnent en maturité.

Pour autant, éliminer le CCUS du paysage de la transition énergétique serait aujourd’hui irréaliste. Dans la cimenterie par exemple, une partie des émissions provient directement de la chimie des procédés : sans captage, atteindre la neutralité carbone est impossible ou exigerait des ruptures technologiques encore immatures. L’enjeu n’est donc pas d’être pour ou contre le CCUS, mais de distinguer les usages pertinents, intégrés dans une stratégie globale de réduction, des usages opportunistes qui visent à différer des transformations indispensables.

Sur le plan économique, le CCUS reste aujourd’hui loin de la rentabilité, en tout cas si on se réfère au prix actuel du CO₂ sur les marchés. En effet, le coût moyen du triptyque capture-transport-stockage avoisine 200 euros par tonne, bien au-dessus du prix actuel du carbone, qui avoisine les 80 euros. Les projets comme Longship, en Norvège, montrent l’ampleur des investissements nécessaires : plus de 3 milliards d’euros pour capter seulement 400 000 tonnes de CO₂ par an, alors que la cimenterie mondiale en émet 2,5 milliards. Sans un signal-prix carbone fort ou un soutien public massif, la plupart des initiatives peinent à trouver un modèle économique viable.

La chaîne de valeur du CO₂ et les défis technologiques qui y sont associés restent aujourd’hui immenses : captage énergivore, purification, liquéfaction, transport, stockage géologique ou valorisation… Si les technologies sont anciennes, leur optimisation actuelle vise à réduire la consommation d’énergie et les coûts. Les pistes d’innovation comme la minéralisation dans des matériaux, les e-fuels, l’électro-réduction du CO₂ ou l’oxy-combustion pour simplifier la capture se développent rapidement mais sont à un niveau de TRL encore trop faible.

La France, de son côté, structure une filière CCUS ambitieuse autour de grands projets industriels (GOCO₂, CO₂ Highway Europe, pilotes à Dunkerque) et d’une stratégie nationale visant 4 à 8 millions de tonnes captées d’ici 2030. Le stockage géologique, la valorisation du CO₂ comme ressource et l’intégration aux grands bassins industriels en font un secteur en devenir.

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