S’il est un point sur lequel la construction se distingue de l’industrie, c’est son évolution à moyen terme qui est diamétralement opposée à celle observée dans les milieux industriels.
En effet, l’acte de construction n’a pas cessé de se complexifier. Le nombre des intervenants s’accroît sans que la qualité globale du produit s’en trouve améliorée. Cette évolution, vécue aussi par le secteur secondaire, a reçu un nom : c’est la taylorisation. La spécialisation se traduit par des tâches et des rôles qui s’additionnent.
Là où se démarquent ces deux milieux c’est dans les réactions face à cette dérive. L’industrie y a répondu par une remise en cause profonde alors que la construction y voit une certaine spécificité voire même une dimension originale.
Ce qui est en cause ici c’est l’attitude face au besoin d’intégration. Le monde industriel, au prix il est vrai d’une révolution culturelle, pense y trouver les moyens de mieux servir le marché en étant plus proche des demandes. Les constructeurs prétendent y échapper sous couvert d’une production localisée marquée par son inscription dans un site. Certains parlent même du caractère vernaculaire du bâti.
La confrontation entre ces deux approches serait vaine si elle se bornait à une comparaison terme à terme, car il est sûr qu’un bâtiment n’est pas un produit en série.
Toutefois, l’acte de construction est-il si différent de celui de la création d’un objet manufacturé ? Cette interrogation a conduit certains vers une définition intéressante du « bâtiment » en tant qu’activité : il s’agit d’une production d’ouvrages à destination unique. Alors l’utilité de méthodes pratiquées dans l’industrie n’est plus incongrue. Gagner en efficacité, rationaliser, économiser relève d’une saine gestion. La spécificité du bâti réside non dans sa production mais dans son emploi.
L’intérêt d’une telle démarche est renforcé par les outils mis au point par la société industrielle. De façon à être plus réactive et plus flexible, c’est-à-dire capable de répondre à des demandes plus ponctuelles, l’industrie s’engage dans la pratique de l’ingénierie concourante. L’objet est d’intégrer dans un collectif les différents intervenants (figure 1) de manière à atteindre une véritable optimisation des ressources qui ne passe plus par une juxtaposition d’optima locaux mais par une véritable concertation.
Cet article a pour objectif d’approfondir ce rapprochement. Il se compose de deux parties :
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la première situe les enjeux de l’ingénierie concourante et dénombre les raisons qui militent pour généraliser son emploi dans la construction ;
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la seconde décrit de manière plus détaillée les apports de cette méthodologie de travail adaptée pour ce secteur économique.