Un premier article dans la collection Techniques de l'Ingénieur [E 6 610] a dressé un panorama synthétique des principaux concepts, notions et cadres mathématiques qui interviennent dans le domaine du traitement et de l'analyse des images à tons de gris. Les images à tons de gris sont mathématiquement considérées comme des fonctions numériques définies spatialement sur des pixels et ayant comme valeurs des intensités appelées tons de gris. Les images binaires sont la plupart du temps issues de traitements préalablement réalisés sur des images à tons de gris. Elles consistent en des fonctions définies spatialement sur des pixels et prenant seulement deux valeurs : 0 et 1. La valeur 1 représente les pixels informatifs et la valeur 0 les autres pixels. Comme pour les images à tons de gris, les mathématiques tiennent une place importante puisque les images binaires vont être considérées comme composées d'objets spatiaux. C'est le cas de la géométrie, discipline trop oubliée dans l'enseignement supérieur actuel, qui tient un rôle central en imagerie binaire.
D'un point de vue technologique, cette importance est favorisée par les performances des systèmes d'investigation par imagerie et par les puissances de calcul des ordinateurs, qui se sont considérablement développées dans la deuxième moitié du 20e siècle. L'imagerie binaire a ainsi permis un retour remarquable au « hit-parade » de nombreux résultats « anciens » (19e siècle : théorèmes de Cauchy et de Crofton pour la mesure du périmètre d'un objet), voire médiévaux (16e siècle : principe de Cavalieri sur la mesure du volume par « découpage » d'un objet solide en tranches). Elle s'appuie sur deux piliers que sont la géométrie différentielle (19e siècle : étude des variations locales des objets) et la géométrie intégrale (19e et 20e siècles : mesure du contenu et du contour d'un objet). Elle a favorisé l'émergence dans la deuxième moitié du 20e siècle de branches mathématiques spécifiques comme la stéréologie (étude du passage de mesures spatiales en une ou deux dimension(s) à la troisième dimension) ou la géométrie stochastique (étude de distributions spatiales d'objets d'un point de vue probabiliste). La théorie des ensembles et la géométrie convexe (formule de Steiner du 18e siècle, addition de Minkowski du début du 20e siècle) ont aussi trouvé une nouvelle jeunesse en servant de base à la morphologie mathématique (deuxième moitié du 20e siècle : érosion et dilatation de formes, spectre granulométrique...). La topologie, l'algèbre et la théorie de la mesure, associées à la géométrie, ont donné naissance au cours du 20e siècle à de nouvelles branches des mathématiques (géométrie topologique, géométrie algébrique, théorie de la mesure géométrique) présentant un fort intérêt pour l'imagerie binaire, notamment pour la caractérisation d'objets (connexité, orientations des contours, nombre de Descartes-Euler-Poincaré, mesures de volumes, surfaces ou longueurs). La géométrie fractale a aussi été (re-)mise au goût du jour à la fin du 20e siècle avec un engouement, voire une fascination, toujours intact (les premiers travaux sur les courbes remplissant l'espace datent de la fin du 19e siècle). Enfin, il convient de noter la (ré-) émergence de la géométrie discrète (apparue dès le 16e siècle) et de la topologie discrète (les espaces discrets étaient déjà étudiés lors de la troisième décennie du 20e siècle), se traduisant en imagerie par le néologisme de « géométrie digitale ».
La lecture de l‘article [E 6 610] sur les mathématiques pour le traitement et l'analyse des images à tons de gris n'est pas un prérequis, mais est cependant conseillée.