Durant les dernières décennies, la consommation énergétique mondiale n’a cessé de croître. Selon le rapport (Key World Energy Statistics 2017), publié en 2017 par l’IEA (International Energy Agency), la totalité de l’énergie consommée à l’échelle mondiale en 2015 est de l’ordre de 13647 Mtep (millions de tonnes équivalent pétrole). L’énergie non renouvelable en représente 90,3 %, avec la plus grande part de consommation pour le pétrole (31,7 %), suivi par le charbon (28,1 %), ensuite le gaz naturel (21,6 %) et finalement le nucléaire (4,9 %). La consommation accrue des énergies non renouvelables conduit non seulement à leur épuisement, mais aussi à la pollution de l’environnement et au réchauffement climatique. Par ailleurs, une flambée des prix des énergies non renouvelables est observée au fur et à mesure que l’on s’approche de l’échéance de leur épuisement. Cela constitue la raison décisive pour laquelle, dans un futur proche, aussi bien au niveau national qu’international, les réseaux électriques vont évoluer vers l’intégration croissante de productions décentralisées d’énergie électrique, d’origines solaire ou éolienne, ainsi que de dispositifs de stockage d’énergie électrique. C’est pourquoi, actuellement, plusieurs projets pilotes de recherche se focalisent sur le nouveau concept de microréseau. Celui-ci peut être décrit comme étant un système d’énergie intégré incluant des installations locales de génération d’énergie électrique (microturbines, panneaux photovoltaïques, mini-éoliennes, etc.), des charges électriques, des installations de stockage d’énergie électrique (batteries, supercondensateurs) et un système de supervision et de gestion des flux énergétiques. Les microréseaux sont destinés à assurer, pour un certain nombre de consommateurs, une génération décentralisée de l’énergie électrique et un approvisionnement local d’énergie électrique.
Le fonctionnement d’un microréseau nécessite une gestion intelligente et communicante de l’ensemble de ses constituants en vue d’assurer la disponibilité de l’énergie électrique dans un contexte de hausse de demande et avec une offre d’énergie décentralisée, intermittente et volatile. Cela a poussé plusieurs chercheurs et universitaires à effectuer des travaux de recherche sur le nouveau concept de microréseau. La problématique traitée dans cet article porte sur l’amélioration de l’efficacité énergétique dans un microréseau AC triphasé. Elle est motivée par le fait que, de manière générale, les charges ne bénéficient que de la partie « active » de l’énergie fournie alors qu’ils consomment aussi une partie « réactive » et « harmonique » de l’énergie, ce qui surcharge le microréseau. C’est pour cela qu’il est avantageux de compenser les parties réactive et harmonique de l’énergie via des solutions appropriées. Les solutions classiques utilisées à cette fin peuvent être classées en deux catégories, à savoir les solutions passives telles que les batteries de condensateurs ou de filtres passifs et les solutions actives telles que les filtres actifs de puissance. Cela étant dit, de récents travaux de recherche ont montré que la compensation des énergies réactives et harmoniques peut être effectuée avec des convertisseurs multifonctions (CMF). Ces convertisseurs sont utilisés à la base pour faire l’interface entre des sources d’énergie renouvelables (SER) et les lignes de transport d’énergie électrique d’un microréseau. Leur fonctionnalité peut être étendue pour réaliser des fonctions auxiliaires qui assurent la compensation de la partie harmonique et réactive de l’énergie consommée par des charges locales se trouvant à proximité des CMF. La solution à base de CMF s’adapte bien au nouveau concept émergeant de microréseau étant donné que ce dernier est susceptible d’intégrer différents systèmes reposant sur des SER et présente une structure communicante bidirectionnelle d’informations entre ses différents constituants. Par ailleurs, cette solution est envisageable étant donné que lorsque les tensions au niveau des lignes de distribution d’énergie électrique d’un microréseau sont équilibrées et présentent un faible contenu harmonique, la compensation de la partie harmonique et réactive de l’énergie consommée par une charge s’effectue essentiellement par la compensation des courants harmoniques et réactifs qu’elle consomme. Les solutions actives standards utilisées pour traiter les courants harmoniques et réactifs présentent les mêmes topologies que celles des convertisseurs côté réseau (CcR) inclus dans les systèmes de génération à base de SER. Ajouté à cela le fonctionnement intermittent ou à puissance réduite de ces systèmes de génération, l’extension de la fonctionnalité des CcR vers des CMF assurera une réduction de la consommation d’énergie à moindre coût et sans l’ajout de dispositifs additionnels dédiés à cette fin. L’utilisation des CMF est également motivée par les performances de calcul élevées des nouvelles solutions numériques qui permettent l’ajout de fonctions auxiliaires complexes sans délais de temps de calcul excessifs.
Ainsi, l’article proposé a pour principal objectif de faire prendre conscience, aux lecteurs, de l’évolution future des solutions d’amélioration de la qualité d’énergie électrique, notamment l’intérêt de faire contribuer les CMF, intégrés dans des générations distribuées à base de SER, dans la compensation dynamique des courants harmoniques et réactifs. Bien que ces solutions soient en phase de décollage industriel, les technologies actuelles sont assez matures pour les intégrer dans les filières de production et maîtrise de l’énergie électrique. Pour cela, les auteurs souhaitent démontrer l’intérêt économique et énergétique offert par les CMF associés à des systèmes de génération à base de SER tout en soulignant les défis technologiques qui leur sont associés.