Présentation
RÉSUMÉ
Les murs biodiversitaires sont de nouveaux systèmes de végétalisation verticale, conçus pour soutenir la biodiversité en ville dans un contexte dense et minéral, où la pleine terre est limitée. Dans un objectif d’autonomie et avec un entretien minimal, ces systèmes intègrent une couche de substrat organique continue dans un mur structurel, réalisé à partir de matériaux de construction courants. L'article détaille les différents paramètres de conception – systèmes constructifs et matériaux, espèces implantées et type de substrat –, ainsi que la maintenance, la méthode de suivi écologique de prototypes maçonnés et leur évolution. Les résultats montrent que ces structures offrent un habitat pour diverses espèces, qui varie selon chaque type de mur et par orientation. Les observations permettent de formuler des recommandations de conception pour de futurs murs biodiversitaires.
Lire cet article issu d'une ressource documentaire complète, actualisée et validée par des comités scientifiques.
Lire l’articleAuteur(s)
-
Delphine LEWANDOWSKI : Architecte DE-HMONP, docteure en architecture, enseignante - GSA, ENSA Paris-Malaquais ; CESCO, Muséum national d’histoire naturelle, Paris, France
INTRODUCTION
Selon le rapport de l’IPBES (Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques) de 2019, les écosystèmes planétaires font face à une crise sans précédent d’effondrement de la biodiversité, causée par les activités humaines : destruction des habitats terrestres et marins, exploitation directe, changement climatique, pollution et propagation d’espèces envahissantes. Celle-ci a un impact alarmant sur la santé des écosystèmes, menaçant les conditions de vie sur Terre, celle des humains comprise. L’urbanisation croissante est l’un des facteurs majeurs d’érosion de la biodiversité causant la perte d’habitat des espèces par l’artificialisation des sols, la fragmentation et la pollution. Pour renforcer ou restaurer les continuités écologiques dans les villes, en particulier là où l’espace de pleine terre est peu disponible, l’une des solutions est de végétaliser l’architecture. Les bâtiments peuvent effectivement offrir des refuges pour la biodiversité grâce à leurs enveloppes – façades et toitures – qui, selon Arnold Darlington dans son ouvrage Ecology of Walls (1981), représentent jusqu'à 50 % de la surface totale des villes.
Bien que la végétalisation des bâtiments existe depuis des millénaires – elle semble concomitante avec l’apparition de l’architecture et de l’art des jardins – on parle aujourd’hui de « murs végétalisés » pour désigner plus spécifiquement les dispositifs de végétalisation des murs. Il en existe deux grandes catégories dans la littérature scientifique. La première désigne les façades végétalisées – Green Facades – et regroupe toutes les solutions qui incluent des plantes grimpantes, comme du lierre ou de la vigne. En pleine terre ou en pot, les plantes poussent soit directement soit indirectement – à l’aide de câbles ou de treillis – sur une façade. On parlera ainsi de façades « végétalisées directes » ou « indirectes ». Celles-ci sont généralement plus simples et plus abordables que les autres systèmes, mais se limitent aux espèces grimpantes. La seconde catégorie, les murs vivants – Living Walls Systems – désignent les autres solutions, plus complexes, qui comprennent généralement des petites plantes de la strate herbacée. Ces derniers sont séparés en deux solutions techniques principales : les murs continus et les murs modulaires. Dans la première, les plantes poussent dans une nappe continue, généralement en textile, grâce à un système hydroponique de ferti-irrigation – les nutriments sont amenés aux plantes par l’eau via le système d’arrosage. Quant aux murs vivants modulaires, ils sont de formes variées : panneaux perforés ou divisés en cellules, jardinières superposées, cages en treillis métalliques, etc. Ils sont pour la plupart mis en place sous la forme de bardages rapportés sur une façade.
L’article propose d’étudier le fonctionnement d’une nouvelle typologie de mur végétalisé, le mur « biodiversitaire », qui sort des catégories existantes par deux grands principes. Le premier est l’emprisonnement au sein du mur d’une couche continue de substrat vivant, dans lequel poussent les plantes en façade. Cette couche est connectée à un sol en pleine terre et, si possible, à une toiture végétalisée. Le but est d’augmenter les interactions dans le sol, d’en augmenter l’activité biologique pour favoriser le développement et l’autonomie du milieu vivant. Le second principe est l’emploi de matériaux de construction courants – briques, pierre, béton – jusqu’alors peu utilisés dans les systèmes de murs végétalisés classiques et qui donnent au système l’avantage d’avoir une plus grande inertie thermique, une plus grande résistance et, ainsi, une plus grande longévité. Ces principes de fonctionnement spécifiques soulèvent de multiples questions autour de la problématique générale suivante : quelles sont les conditions techniques et biologiques qui définissent le mur biodiversitaire et qui en garantissent le fonctionnement ? Les conditions techniques incluent la conception et la mise en place du système architectural et constructif, ainsi que les matériaux employés ; les conditions biologiques réfèrent aux conditions environnementales, aux espèces végétales implantées, à l’apport en eau, au substrat et aux problématiques inhérentes à sa verticalité (tassement et répartition de l’eau).
L’article présente l’étude de prototypes de mur biodiversitaire construits pour la première fois sur le site des laboratoires du Muséum national d’histoire naturelle, rue Buffon à Paris, en 2021. Le principe est testé avec la conception et la construction de trois typologies : en briques pleines, en briques alvéolées et en pierre sèche de récupération. L’expérience est principalement axée sur la biodiversité afin d’évaluer et de comparer ces prototypes. Les autres aspects tels que le coût, la faisabilité et l’esthétique sont discutés de manière ponctuelle. Les hypothèses sur les avantages et les désavantages de ces systèmes sont explicitées dans la première partie de l’article et sont discutés tout au long de la partie concernant les résultats afin de formuler des recommandations de conception à la fin de l’article.
l’article est issu des travaux de la thèse de l’autrice Mur biodiverse une architecture support de biodiversité (2023), sous la direction de Robert Le Roy (GSA/ENSA Paris Malaquais) et de Philippe Clergeau (CESCO/Muséum national d’histoire naturelle) en CIFRE dans l’agence ChartierDalix. De multiples partenaires scientifiques et industriels ont permis de mettre en place les prototypes ainsi que leur suivi écologique. Ces derniers sont présentés dans la rubrique Annuaire du « Pour en savoir plus ».
MOTS-CLÉS
Biodiversité urbaine Murs végétalisés Murs vivants Système de végétalisation verticale Architecture écologique
DOI (Digital Object Identifier)
CET ARTICLE SE TROUVE ÉGALEMENT DANS :
Accueil > Ressources documentaires > Innovation > Innovations technologiques > Les grands événements de l'année > Murs biodiversitaires - Conception, fonctionnement et méthodologie de suivi > Conclusion et recommandations
Cet article fait partie de l’offre
Génie écologique
(57 articles en ce moment)
Cette offre vous donne accès à :
Une base complète d’articles
Actualisée et enrichie d’articles validés par nos comités scientifiques
Des services
Un ensemble d'outils exclusifs en complément des ressources
Des modules pratiques
Opérationnels et didactiques, pour garantir l'acquisition des compétences transverses
Doc & Quiz
Des articles interactifs avec des quiz, pour une lecture constructive
Présentation
5. Conclusion et recommandations
Le prototypage a permis de valider l’intérêt et le fonctionnement du système de mur biodiversitaire. D’un point de vue des espèces, on constate que les plantes spécialistes des murs ou de milieux anthropisés sont celles qui se sont le mieux développées car elles étaient mieux adaptées aux conditions drastiques du mur. On peut émettre une recommandation sur le fait de privilégier des plantes dont le port est adapté à la pousse à la verticale, et qui préfèrent les milieux neutres ou basiques. Or, sous la forme de godets et avec une irrigation automatisée, d’autres espèces pourraient survivre et se développer et il ne semble pas nécessaire de limiter la communauté végétale à des plantes spécialistes des murs. Ces dernières ne nécessiteraient pas autant de substrat et pourraient faire l’objet d’une autre conception.
La biodiversité animale est aussi présente, car celle-ci est corrélée à la biodiversité végétale. Nous avons vu que la présence d’espèces animales indigènes et associée à celle d’espèces végétales indigènes. Or, des études sur un plus long terme, sur la biodiversité animale et sur l’activité biologique du substrat, sont nécessaires pour conclure sur le potentiel des murs.
L’étude comparative des trois typologies de mur a permis de discriminer des facteurs d’influence de l’architecture sur la biodiversité. Les propriétés des matériaux telles que la densité, l’albédo et la capacité thermique sont déterminantes pour protéger le milieu vivant (substrat et plantes) des variations météorologiques et plus spécifiquement de l’augmentation de la température. Cette augmentation assèche le substrat en provoquant l’évaporation de l’eau et la transpiration des plantes qui risquent de mourir de soif. En hiver, la densité permet de protéger le milieu du gel. La morphologie du mur, qu’il s’agisse de l’épaisseur de sa couche externe ou de son pourcentage d’ouverture en façade, influence l’état de la couche de substrat (délitement, humidité et température) qui a aussi un impact direct sur la biodiversité. Il est donc recommandé de privilégier des matériaux avec une capacité thermique et une densité élevées (qui protègent mieux des variations extérieures) ainsi qu’un albédo plus grand comme...
Cet article fait partie de l’offre
Génie écologique
(57 articles en ce moment)
Cette offre vous donne accès à :
Une base complète d’articles
Actualisée et enrichie d’articles validés par nos comités scientifiques
Des services
Un ensemble d'outils exclusifs en complément des ressources
Des modules pratiques
Opérationnels et didactiques, pour garantir l'acquisition des compétences transverses
Doc & Quiz
Des articles interactifs avec des quiz, pour une lecture constructive
Conclusion et recommandations
BIBLIOGRAPHIE
-
(1) - CLERGEAU (P.) - Manifeste pour la ville biodiversitaire. Changer pour un urbanisme inventif, écologique et adaptatif. - Éditions Apogée, Rennes (2015).
-
(2) - CHARTIERDALIX - Accueillir le vivant. L'architecture comme écosystème. - Park Books, Zürich (2019).
-
(3) - AUER (T.), RADI (M.), BRKOVI (M.) - Green Facades and Living Walls – A Review Establishing the Classification of Construction Types and Mapping the Benefits. - Sustainability, 11(17), 4579, p. 1-23 (2019).
-
(4) - MANSO (M.), CASTRO-GOMES (J.) - Green wall systems : A review of their characteristics. - Renewable and Sustainable Energy Reviews, 41, p. 863-871 (2015).
-
(5) - BEECHAM (S.), RAZZAGHMANESH (M.) - Water quality and quantity investigation of green roofs in a dry climate. - Water research, 70, p. 370-384 (2015).
-
...
NORMES
-
Travaux de bâtiment – Ouvrages en maçonnerie de petits éléments – Parois et murs – Partie 1-1 : cahier des clauses techniques types – Partie 1-2 : critères généraux de choix des matériaux – Partie 2 : cahier des clauses administratives spéciales types – Partie 3 : dispositions constructives minimales – Référence commerciale des parties P1-1, P1-2, P2, P3 du NF DTU 20.1. - NF DTU 20.1 - 2020
ANNEXES
1.1 Concepteurs – Constructeurs – Fournisseurs – Distributeurs (liste non exhaustive)
ChartierDalix architectes (conception, recherche), Paris :
https://www.chartier-dalix.com
Bio’bric par Boyer Leroux (fournisseur de briques alvéolées) :
https://www.biobric.com/qui-sommes-nous
Le Prieuré – Vegetal i.D. (fournisseur de substrat et toiture végétalisée en bacs) :
Martin Muriot et Joël Jannet – Fédération française des professionnels de la pierre sèche (constructeurs de prototypes en pierre sèche) :
https://www.professionnels-pierre-seche.com
Rairies Montrieux (fournisseur de briques pleines) :
STE BYN (constructeur de pavillon et prototypes en briques) :
HAUT DE PAGE1.2 Organismes – Fédérations – Associations (liste non exhaustive)
Fédération...
Cet article fait partie de l’offre
Génie écologique
(57 articles en ce moment)
Cette offre vous donne accès à :
Une base complète d’articles
Actualisée et enrichie d’articles validés par nos comités scientifiques
Des services
Un ensemble d'outils exclusifs en complément des ressources
Des modules pratiques
Opérationnels et didactiques, pour garantir l'acquisition des compétences transverses
Doc & Quiz
Des articles interactifs avec des quiz, pour une lecture constructive