Les premiers « aérogels » ont été préparés en 1931 lorsque Kistler, de l’université du Pacifique de Stockton en Californie, chercha à démontrer qu’un gel contenait un réseau solide continu de même taille et de même forme que ce gel. Kistler conjecturait que lors du séchage, l’interface liquide-vapeur du liquide d’évaporation exerçait des forces importantes de tension superficielle conduisant à l’effondrement de la structure solide. Il a alors découvert l’aspect principal de la production d’aérogel : le séchage hypercritique qui consiste à faire passer de manière continue, c’est-à-dire sans changement d’état, la phase liquide sous sa forme gazeuse.
Les premiers gels étudiés par Kistler étaient des gels de silice préparés par condensation acide d’une solution aqueuse de silicate de sodium. L’eau présente dans la solution était échangée par un alcool afin que puisse être réalisé le séchage hypercritique, permettant finalement d’obtenir des aérogels transparents, de faible densité et très poreux.
Même s’ils apparaissaient intéressants à de nombreux égards, les aérogels furent néanmoins délaissés par suite du trop long temps de préparation et ce n’est qu’à la fin des années 1970 que l’intérêt fut renouvelé par la mise au point d’un nouveau processus de fabrication par l’université Claude Bernard à Lyon. En remplaçant le silicate de sodium par un alcoxysilane, le tetramethoxysilane (TMOS), et en hydrolysant ce TMOS dans une solution de méthanol, produisit en effet un gel en une seule étape, appelé « alcogel » puisque le liquide remplissant les pores n’était autre qu’un alcool.
Cette technique a été petit à petit appliquée à d’autres précurseurs organométalliques conduisant à des aérogels minéraux autres que la silice (alumine, zircone, TiO2…). Dans les années 1990, elle a aussi été proposée pour la synthèse d’aérogels organiques issus de la polycondensation de résorcinol et de formaldéhyde. Des aerogels de carbone ont ensuite été obtenus par pyrolyse des aerogels organiques. L’attrait de la texture particulière des aérogels incite la communauté scientifique à les décliner dans une grande variété de compositions pour des applications qui touchent à des domaines aussi différents que peuvent l’être l’isolation thermique, l’électrochimie, la catalyse, la détection de particules, l’acoustique, le confinement des déchets nucléaires, l’astrophysique mais aussi les biosciences.
Dans la suite de cet article, sont traitées quelques propriétés des aérogels, qu’ils soient de type organique ou plus particulièrement de silice (oxyde simple), ces derniers ayant été les plus étudiés. Dans la dernière partie de l’article nous présenterons diverses applications de ces matériaux.