L’analyse des avaries consécutives à la corrosion constitue un maillon essentiel dans l’ensemble de la chaîne qui permet d’optimiser le fonctionnement des installations et des procédés. Déterminer l’origine des avaries peut jouer un rôle très important, d’une part, pour préserver la sécurité des personnes et l’environnement et, d’autre part, pour maintenir un niveau de performance satisfaisant des installations. C’est aussi de plus en plus fréquemment un moyen, pour les différents organismes concernés, de rechercher les parts de responsabilités et d’établir le partage des coûts relatifs à un sinistre.
L’expertise est le point central de deux démarches. C’est l’aboutissement d’un travail d’enquête permettant de reconstituer, dans la mesure du possible, les causes de la dégradation de la pièce analysée. C’est également un point de départ puisque de l’analyse des causes vont découler des actions en matière de réparation, de suivi des installations mais aussi des améliorations dans la conception et le fonctionnement des installations.
L’expertise est le plus souvent mandatée lorsque l’avarie se manifeste dans une durée largement inférieure à la durée de vie attendue de l’installation. Toutefois, lorsqu’une avarie survient dans une durée compatible avec la durée de vie initialement envisagée à la conception, on peut aussi avoir envie de vérifier que c’est bien le facteur identifié comme limitant la durée de vie qui a été à l’origine de la défaillance. Si ce n’est pas le cas, les conclusions de l’expertise sont, bien sûr, extrêmement instructives.
Dans les processus entraînant des avaries prématurées, la corrosion tient une large place. À titre d’illustration, dans une revue internationale (Engineering Failure Analysis) consacrée aux analyses de défaillance de toutes origines, le mot clé « corrosion » apparaît dans environ 50 % des articles depuis 2011. La corrosion sous contrainte et la fatigue corrosion, la corrosion localisée sont les plus largement citées (plus de 50 %).
Prendre en compte le comportement des matériaux, ou l’évolution de leur comportement, dans un environnement corrosif nécessite une analyse approfondie en amont, lors de la conception des installations. Si des annexes informatives traitant des modes d’endommagement des matériaux métalliques enrichissent certains codes de conception et de fabrication d’équipement (les annexes informatives MA3 et MA4 du CODAP traitant respectivement du comportement des aciers en présence d’hydrogène sous pression et de la prévention des risques de corrosion en sont un exemple)et permettent d’alerter le concepteur, les codes n’ont pas vocation à se substituer à une analyse précise de l’aptitude d’un matériau à résister à des conditions de service données (nature de fluide, température, etc.). Cette analyse est évidemment conduite lorsque le facteur corrosion est un facteur initialement déterminant pour la durée de vie de l’installation. En revanche, lorsque le milieu est réputé peu agressif, les choix de matériaux, de procédés, de suivi peuvent se révéler inadaptés. C’est ce que révèlent beaucoup d’expertises. On constate, par exemple, dans les usines utilisant des procédés complexes que les problèmes se rencontrent le plus souvent au niveau des équipements annexes. Nous nous limiterons, dans cet article, à traiter des expertises sur les matériaux métalliques qui sont l’objet de la plupart des travaux d’expertise. Si la méthodologie est transposable aux autres matériaux, les méthodes d’analyse doivent être évidemment adaptées.
Dans certains cas, par exemple lorsque les composants à analyser ne peuvent être extraits, lorsqu’il s’agit de montrer d’éventuelles malfaçons avant mise en route d’un équipement, des analyses in situ doivent être réalisées. Ces analyses peuvent par ailleurs se révéler particulièrement utiles car permettant de préserver des éléments du milieu, de la surface des matériaux qui pourraient être altérés lors des prélèvements du composant à expertiser. Nous avons ainsi distingué, dans la suite de cet article, les analyses applicables in situ et ex situ.