Un grand nombre d’entreprises produisent déjà des biens physiques à la façon dont un logiciel produit de l’information dans les formats vidéo, audio et texte. Cela s’appelle l’impression 3D et c’est le modèle de « production manufacturière qui accompagne une économie d’Internet des objets », écrit Jeremy Rifkin dans « La nouvelle société du coût marginal zéro ». Utilisée depuis des années par les entreprises pour réaliser des prototypes (la première imprimante 3D date de 1988), l’impression 3D est une technologie ancienne en pleine expansion. Le magazine britannique « The Economist », la considère comme l’un des catalyseurs d’une « 3e révolution industrielle », dont l’impact sera considérable sur les entreprises. Selon l’étude Wohlers Report 2014, le secteur mondial de l’impression 3D pourrait générer 12,8 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2018 et dépasser 21 milliards en 2020. Cependant, à l’image de ce qu’a connu l’industrie musicale avec la possibilité offerte aux particuliers d’enregistrer sur cassettes (fichiers MP3), et l’industrie du cinéma avec la numérisation et le partage en ligne de fichiers, la vulgarisation de l’impression 3D est parfois perçue comme une menace. Cette technologie est effectivement porteuse de risques, notamment celui de la captation de la valeur par des nouveaux entrants (éditeurs de logiciels/plateformes, vendeurs de solutions hardware/software, etc.), réduisant à termes le rôle des industriels à de simples « faiseurs ». Ainsi, la métamorphose actuelle marque le début d’une nouvelle ère, dans tous les domaines, et il n’est pas jusqu’au droit qu’il ne faille reformuler. Le développement de l’impression 3D s’accompagne ainsi de nombreuses interrogations concernant le respect des droits de Propriété Intellectuelle (PI) s’exerçant sur les objets physiques objets de protection exclusive. Il accroît notamment les risques de piratage et de contrefaçon. Plus globalement, le système d’impression 3D est-il seulement compatible avec nos notions juridiques ? Les titulaires de droits de PI (propriété littéraire et artistique dont les droits d’auteur et les droits de la propriété industrielle comme le droit des brevets, des marques, des dessins et des modèles, etc.) redoutent en effet que la faculté de numériser les objets tangibles au moyen d’un scanner et la mise en circulation des fichiers CAO en résultant n’entraînent une atteinte sans précédent à leurs prérogatives.
Aussi, il est nécessaire d’appréhender les retentissements de cette nouvelle technologie sur le plan juridique et notamment au regard de la propriété intellectuelle, tout en anticipant les nouveaux défis d’une approche plus collaborative de l’économie. Pour autant, l’encadrement juridique de l’impression 3D est déjà une réalité, même si des tensions existent. L’instauration de limites complémentaires, qu’elles soient juridiques ou réglementaires avec le souci de préserver la sécurité des acteurs, s’avère néanmoins nécessaire.
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