Les aliments sont des matériaux vivants, subissant constamment des modifications de forme, de taille, de structure. Ils sont sensibles à l’humidité, à la température, à l’oxygène, etc. Le produit alimentaire est donc étudié principalement sous des aspects nutritionnels, d’une part, et biochimiques, d’autre part, puisque la majeure partie des transformations qui se déroulent dans l’aliment au cours des opérations technologiques ou de conservation sont des opérations à caractère biochimique. On oublie trop souvent que le produit alimentaire est aussi un matériau sur lequel il peut être intéressant de mesurer des propriétés mécaniques. Ainsi, les solides d’origine biologique ont une élasticité qui change avec l’âge et diverses causes physiologiques. Les liquides d’origine biologique ont un comportement, le plus souvent non newtonien. Cependant, lors de la préparation, de la transformation ou de la formulation de ces matières premières, de nombreuses techniques sont employées et de nombreuses interactions ont lieu entre les constituants qui viennent modifier profondément et de façon irréversible la texture de ces matériaux.
Pour mesurer ces propriétés mécaniques, on a coutume d’utiliser des méthodes rhéologiques. La rhéologie (le terme fut inventé par Eugène Bingham en 1928, à partir du mot grec ρειν, signifiant écoulement) est ainsi la science qui étudie et décrit l’écoulement, la déformation et la rupture de corps sous l’effet d’une contrainte. Dans ce contexte, les corps peuvent être des liquides, des solides ou des matériaux pulvérulents. La mesure des propriétés rhéologiques des produits alimentaires permet de prévoir leur comportement mécanique au cours des différentes étapes de l’élaboration de l’aliment. Les propriétés rhéologiques sont également à l’origine des comportements perçus lors de l’évaluation sensorielle de la texture.
Dans le domaine alimentaire, la texture est considérée essentiellement comme une propriété sensorielle et regroupe un grand nombre de termes ; citons, entre autres, la tendreté pour la viande, l’onctuosité ou la fermeté pour des fromages, l’aspect collant pour des pâtes ou encore les caractères craquant, friable, dur et croustillant pour des biscuits.
Néanmoins, des méthodes de mesure des paramètres texturaux autres que sensorielles se sont développées. Elles relèvent de la rhéologie et peuvent être :
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des méthodes fondamentales (mesure de la viscosité, de la dureté, de la résistance ou de la fragilité d’un matériau alimentaire) ;
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des méthodes empiriques (ces techniques sont basées sur trois principes fondamentaux de la déformation : la flexion, le cisaillement et la compression) ;
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des méthodes imitatives (qui imitent l’action des dents, par exemple). Les mesures obtenues par l’analyse instrumentale peuvent, dans certains cas, être reliées à des valeurs sensorielles : on parle alors de psychorhéologie.
L’application de certains principes fondamentaux de mécanique et de rhéologie permet de mieux comprendre les comportements mécaniques de ces substances, à l’état naturel ou lorsqu’on les modifie par un procédé de texturation.
De nombreuses techniques peuvent être considérées comme des procédés de texturation, c’est-à-dire capables de donner au produit de base une texture entièrement nouvelle. On peut citer, par exemple, l’extrusion ou la cuisson-extrusion, qui s’intéresse plus particulièrement à des produits sous forme de pâtes, et la granulation qui utilise des matières premières sous forme de poudres. Bien sûr, il existe d’autres possibilités de modifier la texture d’un produit, conduisant au développement de nouveaux aliments, qui ne seront pas développées dans ce dossier, comme l’utilisation des propriétés gélifiantes, épaississantes, émulsifiantes, de certaines matières premières ou l’utilisation d’agents de texture.