Les industries de procédé, chimie, pharmacie, industries agroalimentaires, etc., ont suscité l’apparition d’une science appliquée, qui est connue sous le nom de génie des procédés. Le génie des procédés s’articule en deux parties : d’une part, l’étude des processus, chimiques, biochimiques, etc., particuliers à chaque procédé, et d’autre part le génie chimique qui traite des appareils où ces processus sont mis en œuvre, indépendamment du processus particulier.
L’objet du génie chimique est la détermination de l’agencement, du dimensionnement, des conditions opératoires et de la conduite des appareils des industries de procédé, dans le but d’atteindre des performances requises. Un très grand nombre de configurations permettent de réaliser ces performances. Le choix entre ces configurations est conduit par la recherche d’un optimum, dans le cadre de contraintes. Certaines contraintes sont réglementaires ou sociales : zéro pollution, zéro accident, d’autres sont commerciales : zéro défaut, délai minimal entre commande et livraison. L’optimum est économique : les coûts doivent être minimisés. Des incertitudes sont inévitables. Elles doivent être prises en compte : l’objectif industriel est souvent défini comme le « juste bien » : il faut assurer le résultat sans prendre de coefficients de sécurité excessifs.
À la conception d’une unité de production, il faut équilibrer au mieux les couples : taille des appareils, conditions opératoires (c’est-à-dire en première approximation les consommations d’énergie), qui permettent d’assurer que les performances requises seront atteintes. Cette dualité est transposable dans le domaine économique et les deux parties correspondent respectivement, en simplifiant à l’excès, aux investissements et aux frais de fonctionnement. Il est rare que l’optimisation économique porte sur une seule opération : la recherche de l’optimum sera le plus souvent effectuée pour un procédé entier. Elle porte donc sur un ensemble complexe d’opérations et sur leurs connexions. L’adaptation des conditions opératoires d’une unité de production à des conditions différentes de celles qui présidaient à sa conception, que ce soient les matières premières ou les produits finis, est soumise aux mêmes contraintes et à la recherche de l’optimum économique. Une nouveauté importante pour l’adaptation des unités de production est qu’elle se fait maintenant dans un cadre dynamique, en intégrant par exemple la transition d’une production à une autre à l’optimisation : c’est une part importante de l’activité connue sous le nom de gestion de production.
Le dimensionnement des unités de production a un coût, il fait partie des investissements et représente une part non négligeable de ceux-ci. Il doit donc lui-même atteindre son objectif au moindre coût : de même que l’on évite de réaliser des unités de productions ayant des moyens surdimensionnés, de même il faut éviter la précision excessive dans les calculs de génie chimique, car elle est inutilement coûteuse.
La présentation du transfert de matière et des appareils qui le mettent en œuvre vise donc l’objectif industriel suivant : il faut, en toutes circonstances, employer le modèle qui permet d’atteindre l’objectif recherché et qui est le moins coûteux en temps de travail (humain ou machine). C’est pourquoi il faut utiliser le modèle le plus simple possible : c’est une faute méthodologique que d’employer un modèle complexe (coûteux en temps de calcul) là où sa précision est inutile ou même illusoire. La présentation des modèles qui est faite dans cet article et dans les suivants privilégie donc les modèles simples, les plus utilisés, au détriment des modèles complexes. Le fait qu’il soit didactique de présenter en premier des concepts simples, et donc des modèles simples, n’est qu’un argument supplémentaire.