Si la datavisualisation a longtemps été un domaine d’expertise de la recherche scientifique, en particulier des sciences mathématiques, statistiques et informatiques, elle s’est aussi construite dans l’interdisciplinarité avec les sciences humaines et sociales (SHS) : la cartographie, les sciences des arts et du design, et les sciences cognitives ont toutes contribué à son développement. S’il est difficile de dresser une histoire exhaustive de la datavisualisation, les fondements sociohistoriques des pratiques de représentations graphiques émergent très tôt dans l’histoire. Dès le IIe siècle avec la cartographie, emblématique de cette nécessité de représenter le réel pour mieux agir dessus en retour. Au XVIIIe siècle, avec l’essor des mathématiques, dans leur versant statistique, la représentation graphique de données va connaître un tournant décisif avec l’apparition des premiers graphiques dans l’ouvrage Commercial and Political Atlas de William Playfair (1789), largement diffusés aujourd’hui dans la société : les courbes d’évolution, les graphiques à barres et les diagrammes à secteurs. Mais c’est seulement dans les années 1970, que l’exploration de données va être complètement vulgarisée. Francis Anscombe, statisticien, va faire la démonstration à l’appui d’une série de quatre ensembles de données, le fameux « Quartet d’Anscombe », que des données présentées sous forme de tableau ne sont pas aisément compréhensibles. Ces quatre jeux possèdent des propriétés statistiques simples et assez similaires dans leur représentation linéaire en tableau (moyenne, variance, corrélation et régression ont des valeurs proches). Or, lorsqu'on les représente sous forme de graphiques, on voit pourtant les différences entre les quatre jeux de données, ce qui démontre l’intérêt de cette représentation.
La datavisualisation va ensuite totalement se démocratiser pour toucher un public plus large que celui du monde scientifique, notamment avec les travaux de John Tukey, professeur de statistiques à l’université de Princeton et auteur de l’ouvrage de Exploratory data Analysis sur les méthodes d'analyse et de présentation des données. Par la suite, à partir des années 1980, les designers David McCandeless (2012), Stephen Few (2006) ou encore Manuel Lima (2011) donneront à cette discipline toute sa dimension esthétique.
Aujourd’hui dans le contexte du Big data, la datavisualisation constitue un outil puissant de médiation homme-données permettant de raisonner à partir des données pour saisir la complexité du monde. À ce titre, elle est un enjeu majeur pour l’innovation tant pour la recherche scientifique, que pour les organisations. On retrouve ainsi ses applications dans de nombreux domaines, tels que l’informatique statistique et décisionnelle pour les organisations, les sciences de données pour la biologie, la génomique, les sciences humaines et sociales avec les humanités numériques, la cartographie numérique, ou encore l’analyse visuelle de réseaux.