S’il n’existe pas de définition légale de l’invention, la jurisprudence considère qu’il s’agit d’une « solution technique à un problème technique ». L’invention brevetable doit être concrète et industrielle, qu’il s’agisse d’un produit, d’un procédé, d’un moyen, d’une application ou d’une combinaison de moyens.
Ainsi, si l’invention brevetable suppose de s’appliquer à un domaine technologique, tout ce qui entre dans un domaine technologique n’est pas nécessairement protégeable.
Tel est le cas des « découvertes » qui peuvent, certes être le résultat de recherches et d’investissements importants, mais ne constituent pas le résultat d’une intervention humaine : la découverte préexiste et le constat de cette existence n’est pas appropriable même si celui-ci participe au progrès.
Pour autant, tout brevet n’est pas exclu : ce qui n’est pas brevetable, c’est la découverte elle-même. Cependant, l’utilisation de la découverte ou de ses propriétés à des fins techniques peut donner lieu à un brevet.
Ainsi, pour reprendre les exemples appliqués par les examinateurs de l’INPI et de l’OEB, « la découverte de la résistance aux chocs mécaniques d’un matériau connu n’est pas brevetable, mais (…) une traverse de chemin de fer construite dans ce matériau peut l’être ».
De même, la découverte d’une substance détenant des propriétés antibiotiques n’est pas brevetable. Cependant, le procédé d’extraction du micro-organisme lui-même et son utilisation dans la fabrication d’un nouveau traitement thérapeutique pourront être brevetés.
Invention et découverte ne sont pas synonymes
L’invention crée quelque chose de nouveau, alors que la découverte ne fait que révéler ce qui est préexistant. La découverte n’est pas une création, elle ne peut faire l’objet d’une appropriation.
En revanche, le brevet protège les innovations industrielles issues des découvertes.
Poursuivant cette logique, est également exclu de la brevetabilité ce qui, sans être une découverte, ne présente pas d’effet technique concret immédiat : ainsi, sont également écartées de la brevetabilité les théories scientifiques et les méthodes mathématiques dont le caractère abstrait, purement intellectuel, n’a pas d’effet technique proprement dit.
Les théories scientifiques constituent en effet l’un des exemples de la notion de « découverte » et ne peuvent, en ce sens, pas faire l’objet d’une protection par le brevet. Cependant, comme pour les découvertes au sens large, les applications concrètes d’une théorie scientifique sont susceptibles de faire l’objet d’un dépôt de brevet.
Ainsi, est-il possible de protéger un dispositif semi-conducteur et son procédé de fabrication alors même que la théorie physique de la semi-conductivité n’est pas brevetable.
De même, une méthode mathématique de calcul rapide, purement abstraite, n’est pas brevetable. En revanche, le dispositif de calcul mettant en œuvre cette méthode sera susceptible de l’être : la protection portera alors, non sur la méthode elle-même, mais sur l’application particulière et concrète de la méthode permettant de parvenir à un résultat technique.
Ainsi, un algorithme n’est pas, en tant que tel, protégeable. L’utilisation d’algorithmes peut cependant faire l’objet d’une protection sous réserve de démontrer que celui-ci contribue au caractère technique du dispositif ou du procédé revendiqué en permettant d’atteindre l’objectif technique du dispositif ou du procédé défini de manière adéquate.
Exemple d’invention intégrant une méthode mathématique
OEB –affaire T 1326/06, 30 novembre 2010
Une méthode pour crypter/décrypter ou signer des communications électroniques peut être considérée comme un procédé technique même si elle est essentiellement fondée sur une méthode mathématique dès lors que la revendication est limitée à une application particulière de la méthode mathématique dans un domaine technique et non sur la méthode mathématique en tant que telle.
En l’espèce, la revendication principale du brevet visait la protection d’un « procédé pour crypter ou décrypter un message représenté sous la forme d’un mot numérique à l’aide d’algorithmes à clé publique de type RSA, le procédé étant destiné à être utilisé dans des systèmes électroniques ».
La difficulté réside alors dans la mise en évidence, dans le cadre de la demande de brevet, de cette contribution particulière de l’algorithme à l’obtention du résultat technique recherché, étant précisé que l’OEB par exemple, estime que :
- l’indication générale d’un objectif technique indéterminé est insuffisante pour permettre la protection de l’algorithme ;
- la rapidité ou l’efficacité accrue d’une méthode résultant de meilleurs algorithmes ne suffit pas intrinsèquement à conférer un caractère technique à la méthode dès lors que de telles caractéristiques sont applicables à des méthodes tant techniques que non techniques.
(cf. OEB – affaire T 1227/05, 13 décembre 2006).