Comparé à Airbus, Boeing semble être le constructeur aéronautique le plus pénalisé par les nouveaux droits de douane imposés par Donald Trump et la riposte de la Chine qui a instauré ses propres taxes. Comac, le rival chinois, cherche à tirer profit de ce nouveau contexte pour se faire une place parmi les grands.
Les droits de douane initiés par Donald Trump et les tensions commerciales exacerbées qui ont suivi entre les États-Unis et la Chine ont pour effet de bouleverser l’équilibre du secteur aéronautique mondial. Face aux nouvelles mesures protectionnistes mises en place, les deux géants de l’aviation, Boeing et Airbus, se retrouvent en première ligne. Mais alors que l’on pourrait croire à un impact équitable, les premiers éléments laissent entrevoir un déséquilibre, puisque le constructeur américain semble en bien plus mauvaise posture que l’européen.
En cause, la riposte chinoise qui a instauré des tarifs douaniers prohibitifs de 125 % sur certains produits américains, dont figurent en priorité les avions, en réponse aux taxes de l’administration Trump de 145 % sur les produits chinois. Résultat immédiat : les compagnies chinoises, qui comptaient historiquement sur Boeing pour renouveler leurs flottes, suspendent leurs commandes. China Eastern, Air China ou encore China Southern ont gelé, voire annulé, des dizaines d’acquisitions prévues en 2025 et en 2026. Or, la Chine représente environ 15 % du carnet de commandes global de Boeing. Un niveau très important pour un constructeur déjà affaibli par des années de crise autour du modèle 737 Max et à un moment où sa trésorerie est déjà extrêmement tendue.
Boeing pourrait encore être plus impacté si Pékin décide de mettre en place des sanctions additionnelles pour restreindre son accès à certains composants et métaux stratégiques d’origine chinoise, compliquant encore sa production. Le constructeur américain subit également indirectement l’impact des tensions commerciales, notamment par la désorganisation des chaînes d’approvisionnement mondiales. Face à cette situation, il explore des solutions, notamment en recherchant de nouveaux débouchés, mais la saturation du marché et la concurrence accrue d’Airbus limitent ses options.
De son côté, Airbus semble être en mesure de mieux résister. Déjà, ses avions assemblés en Europe et importés vers les États-Unis sont actuellement soumis à des taxes douanières moins élevées de 10 %, mais qui pourraient tout de même grimper à 20 ou 25 % après une période de suspension de 90 jours décidée par l’administration Trump. De plus, le constructeur européen dispose d’une usine d’assemblage à Mobile, en Alabama, d’où sortent les A320neo et les A220. Cette implantation permet à Airbus de contourner partiellement les droits de douane imposés aux avions assemblés en Europe, en bénéficiant d’un statut de production domestique américaine.
Le chinois Comac veut faire de l’ombre aux deux géants de l’aéronautique
Par contre, les modèles long-courriers comme l’A350 ou l’A330, qui ne sont pas assemblés aux États-Unis, sont directement exposés aux nouveaux tarifs. Et certaines compagnies aériennes américaines clientes d’Airbus, notamment American Airlines, ont annoncé qu’elles ne souhaitent pas absorber les coûts supplémentaires engendrés par ces droits de douane, laissant présager une répercussion sur les prix des billets ou des reports de commandes.
Ironie du sort, ces bouleversements profitent en arrière-plan à un troisième acteur : le chinois Comac. Alors que Boeing et Airbus se battent pour conserver leur influence, le constructeur chinois accélère la mise en service de son moyen-courrier C919, dont l’exploitation commerciale a débuté en 2023 et qui depuis assure plusieurs liaisons intérieures de la Chine. Et depuis le 1er janvier 2025, il a effectué son premier vol commercial international entre Shanghai et Hong Kong, marquant une étape importante dans son déploiement régional. Bien que le C919 reste dépendant de nombreux composants étrangers, notamment américains, les restrictions sur Boeing créent une fenêtre d’opportunité inédite pour Comac.
Pour pénétrer les marchés occidentaux, il devra auparavant obtenir des certifications de sécurité, notamment auprès de la FAA (Federal Aviation Administration) aux États-Unis et de l’EASA (European Union Aviation Safety Agency) en Europe. Si des progrès ont été réalisés avec cette dernière agence, l’obtention de la certification américaine reste incertaine en raison des tensions géopolitiques. En attendant, Comac cherche à étendre sa présence en Asie, notamment en ouvrant des bureaux à Hong Kong et à Singapour. Ces initiatives visent à accroître son influence dans des régions où les tensions commerciales pourraient inciter les compagnies aériennes à diversifier leurs fournisseurs.









Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE