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Décryptage

Route solaire Wattway : une innovation peut à la fois être française et inefficiente

Posté le par Pierre Thouverez dans Énergie

Coller sur des routes bien enrobées des panneaux solaires résistant au passage de camions, est-ce vraiment une idée lumineuse ? Quel est le bilan énergétique et environnemental de l’innovation de Colas, filiale de Bouygues, qui fait grand bruit dans les médias ? Et à quel coût ?

Quand les premières tentatives de remplacement des carburants pétroliers par des biocarburants ont été effectuées, l’enthousiasme a été général. Une fleur de tournesol a même été érigée comme étendard par un parti politique. Puis les premières études indépendantes concernant leur bilan énergétique et leur bilan environnemental sont apparues. Les ONG environnementales sont alors peu à peu parvenues à freiner une dynamique industrielle dévastatrice. Le mot « biocarburant » a alors été remplacé par « agrocarburant ». Al Gore, aux USA, a déclaré regretter d’avoir encouragé dans le passé le développement de l’éthanol de maïs.

Tout ce qui est a priori « bio » et « renouvelable » n’a pas forcément un bon bilan. Pour certains agrocarburants il faut dépenser plus d’énergie pour obtenir un litre que le contenu énergétique de ce litre. Autrement dit leur EROI (taux de retour énergétique, ratio de l’énergie produite sur l’énergie consommée)  est inférieur à 1:1. L’EROI est LE paramètre-clé du développement vraiment durable. Il correspond à la durée de vie d’un système divisé par son Energy Payback Time, c’est-à-dire son temps de retour énergétique.

Il se pose aujourd’hui exactement le même problème dans le domaine du solaire avec l’innovation Wattway. Le solaire est attirant, et même éblouissant. Mais au pays de Descartes, la rationalité s’impose. Si l’EROI du grand PV au sol est aujourd’hui de 7,5 :1 d’après une synthèse de la littérature scientifique effectuée par la Fondation Nicolas Hulot dans son excellent rapport sur le solaire (2015), Wattway, dans sa conception même, pourrait fortement le dégrader (Lire à ce sujet ce dossier : Les routes solaires Wattway consomment-elles davantage d’énergie qu’elles n’en délivrent ?).

A ce stade l’EROI du système Wattway n’a pas été calculé selon l’INES, l’Institut National de l’Energie Solaire. « Une première estimation pourrait être délivrée courant de l’année 2016 » a  révélé Dr Franck Barruel, chef de laboratoire des systèmes PV et référent scientifique INES-CEA du projet Wattway, joint par téléphone. Cette étude sera-t-elle réalisée par des experts totalement indépendants ? L’ingénieur Rodolphe Morlot, coordinateur EnR de l’ADEME, indique de son côté qu’à sa connaissance « aucune analyse de cycle de vie (ACV) n’a été réalisée sur ce produit. »

« Eiffel doit se retourner dans sa tombe »

Pour Mark Jacobson, directeur du département énergie et atmosphère de l’Université Stanford en Californie « Les routes solaires en France sont beaucoup moins efficientes et beaucoup plus coûteuses que le solaire en toiture ou au niveau d’ombrières de parking, et aussi que le grand solaire PV au sol.

Image3Ce projet (de Ségolène Royal NDLR) constitue une façon très inefficiente  de dépenser des fonds peu abondant ».  Mark Jacobson n’est pas un opposant des énergies renouvelables mais au contraire le fondateur de  « The Solutions Project » : comment 139 pays (dont la France) peuvent atteindre 100 % d’énergie renouvelable, y compris transport et chauffage.

Pour Craig Morris, rédacteur en chef du magazine Renewables international basé en Allemagne mais aussi fondateur du site « The German Energiewende » sur la transition énergétique allemande, « les routes solaires doivent être stoppées ». Non sans humour, il ajoute le 29 janvier 2016 : « Apparemment il n’y a pas de toitures disponibles en France », propos dont fait écho le site australien de référence RenewEconomy.

Dans son rapport sur  le 100% renouvelable en France, l’ADEME estime pourtant à 364 GW le potentiel hexagonal du PV en toiture. Soit assez pour produire plus de 400 TWh/an, ce qui n’est pas négligeable dans un pays dont la demande électrique totale est d’environ 500 TWh/an.

Le site de référence américain CleanTechnica a diffusé une vidéo (en anglais) au contenu pédagogique et humoristique permettant de comprendre pourquoi les routes solaires constituent une impasse.  Pour Paul Gipe, analyste de l’industrie des EnR et fondateur de Wind-works.org, avec ce projet de routes solaires « Eiffel doit se retourner dans sa tombe ».

Oui à l’innovation. Non à la dilapidation des fonds publics

Pour Yannick Régnier, responsable Territoires  au sein du CLER et animateur du réseau TEPOS (territoires à énergie positive), ces routes solaires constituent « une mauvaise idée ». Raphaël Claustre, directeur du CLER, estime néanmoins que « toute forme d’innovation mérite sa chance, la recherche et le développement doivent nous aider à mettre en œuvre la transition énergétique. » Mais cet expert en solutions énergétiques vraiment durables souligne aussitôt qu’« il y a un paradoxe à s’emballer pour des projets dont la faisabilité est encore très complexe alors que la filière solaire sur toiture est techniquement mûre et a tant besoin d’être soutenue. » Raphaël Claustre lance cet appel : «  A quand un soutien au solaire sur-imposé (non intégré au bâti ndlr) sur les toitures, il coûte moins cher ? A quand un vrai travail sur les coûts du raccordement électrique, très souvent sur-évalués et qui mettent en péril les projets ? ».

L’analyse d’un ingénieur ayant une solide expérience en tant que chef de projet construction de centrales PV au sol est la suivante: « Que les centrales Wattway consomment plus d’énergie pour la fabrication que les centrales solaires traditionnelles me semble logique : encapsulage beaucoup plus conséquent pour résister aux véhicules, câblage nettement plus important, pose plus complexe. » Et l’expert ajoute : « Évidemment l’EROI doit être largement supérieur à 1 pour qu’une technologie renouvelable ait du sens. Mais dans le cas des routes solaires, ce qui va être le vrai frein, c’est le coût : à 6€/W (alors qu’en solaire au sol on est déjà autour de 0,8-1€/W), je me demande comment notre ministre de l’écologie a pu annoncer vouloir 1000 km de routes solaires d’ici 2021 ! Un tarif garanti hors appel d’offres pour les centrales au sol, de l’ordre de 8 c€/kWh seulement (avec un petit bonus de 10% pour la partie nord de la France), serait un moyen bien plus efficace, et à coût nul pour le consommateur d’électricité, pour que le solaire explose vraiment en France. ».

Bien sur tout ingénieur est favorable à l’idée de progrès, ainsi il ajoute : « je pense néanmoins que l’innovation est toujours positive, qui sait Colas ou d’autres fabricants arriveront peut être à diviser leur coûts par 5 (à l’INES la baisse envisagée est d’un facteur 2 dans le moyen-terme pour le volet CAPEX, voir 3 dans le long-terme ndlr). Et donc que cette innovation soit encouragée modérément par l’Etat (donc le contribuable…) ça serait une bonne chose. Mais pas 1000 km sans même savoir si cette technologie est pérenne, sur un produit en situation de monopole sans concurrence, avec un coût astronomique, qui au final sera toujours supporté par le citoyen. »

Pour Jean-Philippe Brette, ingénieur et membre du conseil d’administration de l’association française Sauvons Le Climat, « prix, usure, salissures, stockage, rendent cette expérimentation peu prometteuse à grande échelle. »

Une annonce à 2700 millions d’euros. « Grands travaux » ou grande gabegie ?

Le dimanche 31 janvier 2016, à 19H31, Ségolène Royal a publié sur son compte Twitter le message suivant : « La route photovoltaïque, innovation française, sera installée sur 1000 km en France. Grands travaux ». La route solaire semble a priori sexy quand on ne s’est pas penché sur les aspects techniques et financiers.

Mais le projet annoncé par Ségolène Royal, sur la base des coûts disponibles depuis le site officiels Wattway et dont la PDG de Colas a fait écho dans le journal Le Monde (14 octobre 2015), soit 6€/W, va coûter 2700 millions d’euros (130 W/m2). Ceci en espérant une largeur de route ne dépassant pas 3,5 mètres. Qui va payer ? Les contribuables français. Cela sera autant d’euros en moins de disponibles pour soutenir les autres projets EnR. Dans le cadre d’une démocratie énergétique participative, il convient de prendre le temps de la consultation et de choisir collectivement.

La centrale PV de Cestas, la plus grande d’Europe (300 MW) a coûté 360 M€ (2014), soit 1,2 €/W. Le grand solaire PV au sol coûte aujourd’hui (2016) entre 0,8 et 1€/W.  Le site Batiactu.com rapporte que cabinet Xerfi vient de publier une note où est indiqué que le MWh du grand PV est à présent entre 70 et 110 €, en fonction de l’ensoleillement du site étudié : « En comparaison, l’accord signé entre EDF et le gouvernement britannique garantit un prix d’achat de 126 €/MWh pour l’électricité produite par la future centrale EPR d’Hinkley Point » affirment les analystes.

Désir d’avenir

Le grand solaire PV est en outre parfaitement compatible avec l’élevage de moutons et l’apiculture comme l’illustre la splendide centrale agrosolaire d’Ortaffa en pays catalan.

Mais aussi avec le maraîchage dans le cadre du Solar Sharing (partager culture de plantes et capture photovoltaïque), dynamique par exemple actuellement en cours sur l’île d’Ukushima au Japon.

Par ailleurs l’entreprise française Ciel & Terre a mis au point une technologie de solaire PV flottant bon marché qui permet de limiter l’évaporation des réserves d’eau douce ainsi que la prolifération des algues vertes. Les brevets sont français.

Pourquoi ne pas faire du solaire flottant un fleuron du génie photovoltaïque français ?  Et peut-on suggérer à Ségolène Royal d’appliquer le principe de précaution en matière de solaire underground ?

Dans Les Echos (14-10-2015), le PDG de Colas envisage  « l’indépendance énergétique de la France » avec la technologie Wattway. La technologie développée par Colas intègre une capacité dégivrante, argument mis en avant dans les médias par le groupe. Or à 0 °C, la chaleur latente de fusion de la glace est de 333 kJ·kg-1. Laissons à Madame La Ministre le soin de calculer la quantité d’énergie qu’il faudrait dépenser pour faire fondre, sur les un million de kilomètres du réseau routier français, un centimètre de pluie verglaçante tombée pendant la nuit, c’est-à-dire quand les panneaux PV ne produisent pas un seul kWh.

Lutter contre l’eau glacée avec une technologie photovoltaïque au bilan énergétique douteux, est-ce vraiment une solution contre le réchauffement climatique ? D’après le site Neowin ce projet de 1000 km de routes solaires pourrait être en parti financé par une nouvelle taxe sur l’essence. Les automobilistes apprécieront.

Olivier Daniélo

Pour aller plus loin

Posté le par Pierre Thouverez

Les derniers commentaires

  • « Vou ssouvenez vous des tirs de barrage à propos de l’éolien ou bien du PV, il y a 30 à 40 ans. Qui va oser remettre en cause ces technologies ? »

    Heu… juste toute personne ayant connaissance du coût faramineux et l’inutilité de ces technologies.

  • J’ai en mémoire que les PV sont branchés en série pour fabriquer du courant, ce qui veut dire que la plus petite ombre les PV ne sont plus opérationnels, quid des véhicules qui roulent en faisant de l’ombre, des arbres en bord de route, etc.. il faut m’expliquer le technique si elle est différente aux PV en toiture

  • Bonjour,
    « Chacun y va de son expertise », merci d’avoir partagé la votre, enrichissant ce débat nécessaire.

    BOLLORE – La batterie de Bolloré continue de susciter de légitimes critiques (exemple ici : http://solision-event.centerblog.net/21-la-bluecar-toxique-pour-nos-ressources) car il faut la chauffer en permanence à environ 80°C, y compris quand elle est à l’arrêt. Au niveau écologique, on a vu mieux. Bien sûr le fait que les véhicules Autolib soient partagés (plusieurs utilisateurs chaque jour) permet de réduire la durée de stationnement, mais sur le plan écologique, consommer de l’énergie même quand on est garé au parking, ce n’est pas la panacée (Autolib est d’ailleurs biberonné d’argent public, une étude énergétique complète de ce système serait intéressante, intégrant l’ensemble des coûts énergétiques induits). Il est vrai que Monsieur Bolloré, manifestement, n’aime pas que ses projets soient critiqués dans les médias (d’où en réponse la campagne lancée par l’ONG Greenpeace France: http://blog.greenpeace.fr/bollore-zero-deforestation), mais la critique est nécessaire au progrès. La possibilité de la critique est un pilier essentiel d’une démocratie en bonne santé. Une écologiste vient d’être tuée au Honduras car sa critique des projets anti-écologiques dérangeait:
    http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/afp/honduras-vague-dindignation-lors-des-funerailles-de-la-militante-ecologiste-assassinee-32393/

    EVOLUTION – Vous comparez la route solaire française au solaire PV il y a 20, 30 ou 40 ans, acceptant implicitement cette régression : « Rappelez-vous les rendements ridicules du PV(…) Sortir du corporatisme et d’une forme d’obscurantisme technocratique serait le bienvenu pour redynamiser nos industries. » Voici en réponse l’extrait d’une tribune publiée hier dans le média Slate.fr : « (…) On pourrait alors considérer que les coûts de cette technologie émergente sont amenés à baisser et qu’un passage à l’échelle industrielle, tel que la construction de 1.000 km de routes, est précisément ce qu’il faut pour accélérer la baisse des coûts. C’est raisonner un peu vite, et extrapoler bien légèrement. Car pour que le Capex du photovoltaïque standard baisse (…) »
    Suite : http://www.slate.fr/story/114619/france-besoin-routes-solaires

    « AVIS NEGATIF » – Pour qu’une technologie puisse bénéficier d’un avis positif, il faut en premier que son EROI (et son EROI estimé pour le futur) soit bien supérieur à 1:1, c’est-à-dire qu’il ne soit pas en zone négative. L’EROI est LE paramètre clé du développement durable. Techniques de l’ingénieur est un média pour lecteurs ayant un minimum de culture scientifique et technique, capables d’analyses rationnelles et d’esprit critique, et donc non disposés à applaudir de manière pavlovienne devant une technologie certes plébiscitée par Ségolène Royal et a priori sexy mais qui n’a, à ce stade, absolument pas prouvé son intérêt au regard des critères du développement vraiment durable.

    « COLLE » – Quelle est la quantité d’énergie consommée pour produire un kilo de la colle en question et un kilo de la résine pour la « texturation de la face avant » ? Cette colle correspond à la structure porteuse du PV classique.

    3% de perte après un million de cycles, cela semble vraiment beaucoup. 1 million de minutes (un passage par minute, débit faible), ce sont seulement 695 jours. Une perte d’un tiers (!) en seulement 9 ans (la centrale de Cestas produira pendant 50 à 60 ans selon Neoen) avec un débit d’un passage toute les 30 secondes. Vous voyez, il faut vraiment garder son esprit critique, et ne surtout pas se laisser aveugler par le chiffre « un million ».

    « il peut être aussi intelligent de positionner ces bandes sur les bandes d’arrêt d’urgence ou la fréquentation est moindre. » Pourquoi pas. Mais dans cette logique de fuite vis-à-vis de l’agressivité routière, pourquoi pas là où il n’y a pas du tout de passage de véhicules ? Comme par exemple sur les toitures des supermarchés et des usines ? C’est-à-dire pas sur les routes. Ou alors sous forme d’ombrières de parking.

    GEL – « faible capacité thermique et son isolement du sol. » Oui, point positif.

    PAYSAGE – Le paysage est le domaine de la subjectivité. Les enquêtes d’opinion montrent que les Françaises et les Français apprécient en très grande majorité le solaire PV classique. En démocratie ce ne sont pas une poignée de pétitionnaires qui imposent leur volonté, même si effectivement ils peuvent il est vrai faire perdre du temps.

    BRUIT – « mur anti bruit à l’aide de panneaux de verre ». Une simple couche acoustiquement isolante additionnelle et le tour est joué. Le double vitrage est par ailleurs isolant, comme chacun peut le vérifier en fermant une fenêtre qui donne sur une rue. « Bifacial systems as PV noise barriers. Bifacial technology is particularly suitable for use in reflecting noise protection systems.
    http://www.tnc.ch/en/bifacial-cells-%E2%80%93-double-sided-photovoltaic-systems

    COMPETITION – « Enfin, nous pouvons tous comprendre que l’arrivée d’un nouvel acteur puisse perturber le petit monde installé des installateurs de PV, mais c’est une création Française, innovante et qui dispose d’un potentiel de croissance important. »

    Ce sont surtout les personnes qui inscrivent leur réflexion dans une perspective de développement vraiment durable qui sont inquiètes. Et aussi celles qui sont conscientes du caractère monstrueux de la dette de l’état français. La technologie Wattway ne peut être commercialisée que dans le cadre de très copieuses aides publiques.

    Tant que la pertinence écologique (EROI actuel et aussi dans une décennie) de cette technologie ne sera pas démontrée de manière rigoureuse par des experts indépendants (non liés au CEA ou à Colas), et bien il faut souhaiter qu’elle n’aspire pas les fonds publics, pénalisant par ricochet les vraies solutions solaires bon marché et efficientes disponibles dès à présent. Oui à la R&D, non à la dilapidation des fonds publics.

    Il y a d’autres types de routes solaires au potentiel écologique et sanitaire probablement beaucoup plus important. A étudier en profondeur, voici un aperçu vulgarisé :
    http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/solar-serpent-une-route-solaire-qui-elimine-la-pollution-de-leau-le-bruit-et-capture-les-particules-fines-32220/

    Merci pour votre tentative de « rééquilibrage », mais de mon point de vue l’argumentaire avancé, bien qu’intéressant, ne suffit pas. Il manque l’essentiel : la démonstration par A+B du caractère durable (ou non) de cette innovation.

  • Bonjour
    Il est curieux de lire des réactions aussi négatives sans évoquer les réactions de lobbying diverses et variées. Vous souvenez vous des commentaires acerbes concernant la technologie LMP de Bolloré, mai slequel d’entre vous n’a pas roulé avec une BlueCar ?
    Vou ssouvenez vous des tirs de barrage à propos de l’éolien ou bien du PV, il y a 30 à 40 ans. Qui va oser remettre en cause ces technologies ?
    Nous avons tous une certaine propension à critiquer et a donner des avis négatifs sur tout. Chacun y va de son expertise. Il serait utile de ré équilibrer le débat :

    Tout d’abord la pose ; les panneaux Colas sont collés avec le même système éprouvé de colle utilisée pour les signalisations au sol. Est ce plus simple que de construire une structure metallique ou bien de faire une installation sur un toit ?

    Le cablage est fait par un rainurage suivant une technique éprouvée pour tout chemin de cable dans un revetement routier. Comment sont réalisés les cablages dans les grandes installations ?

    Ce type de panneau perd 3% de ses capacités après un million de cycles (passage d’une roue de camion avec des cailloux) et il peut être aussi intelligent de positionner ces bandes sur les bandes d’arret d’urgence ou la fréquentation est moindre.

    La présence de gel est un problème que l’on sait résoudre aujourd’hui soit par la chaleur, soit par l’utilisation de matériaux retardant sa formation. L’avantage d’un panneau synthétique est sa faible capacité thermique et son isolement du sol.

    Si certains s’emeuvent de la faible puissance disponible, est ce que ce sont les mêmes qui vont signer les pétitions contre ces champs de PV immenses qui enlaidissent nos campagnes ? alors que nos routes et autoroutes sont déjà intégrées dans le paysage.

    Certains comparent cette solution avec la mise en œuvre de panneaux le long des voies ferrées, pourquoi pas ? Nous disposons de 12 000 km d’autoroute en France. Qu’est ce qui nous empêche de mixer ces technologies ? Notre surcapacité en production électrique à base de PV ?
    De plus, faire un mur anti bruit à l’aide de panneaux de verre est une idée intéressante mais il serait utile de rappeler que le verre n’amortit pas le bruit !

    Enfin, nous pouvons tous comprendre que l’arrivée d’un nouvel acteur puisse perturber le petit monde installé des installateurs de PV, mais c’est une création Française, innovante et qui dispose d’un potentiel de croissance important. Rappelez vous les rendements ridicules du PV il y a 20 ans et plongez vous dans les développements récents de SolarWatt. Sortir du corporatisme et d’une forme d’obscurantisme technocratique serait le bienvenu pour redynamiser nos industries.

    Alors souhaitons longue vie à cette initiative et pourvu qu’il y en ait d’autres car nous avons besoin de moins de CO2 et de plus d’énergie tous les jours, à défaut de pouvoir éteindre Internet, nos Smartphones et tout notre électroménager.

  • Nous savons stocker l’énergie solaro-éolienne, comme l’a montré l’île d’El Hierro (stockage gravitaire) et comme le montre à présent l’île Kaui (stockage électro-chimique, batteries Tesla Energy) :
    http://www.bloomberg.com/news/articles/2016-02-16/solarcity-to-use-tesla-s-batteries-to-enable-solar-at-night

    Communiqué de la Coopérative des utilités de l’île de Kauai (KIUC) :
    http://kiuc.coopwebbuilder2.com/sites/kiuc/files/PDF/pr/pr2016-0216-solar.pdf

    En français :
    http://www.lnc.nc/article/pacifique/kauai-l%E2%80%99%C3%AEle-hawa%C3%AFenne-qui-devient-le-mod%C3%A8le-%C3%A9nerg%C3%A9tique

    Les profils de production éolien et solaire PV sont parfaitement complémentaires à l’échelle saisonnière, comme le montre la diapo n°49 de ce powerpoint :
    http://www.renewablesinternational.net/overview-of-french-power-sector/150/537/92731/

    Le solaire PV est à présent à 3,3 c€/kWh en Californie, contre 12,6 c€/kWh pour le nouveau nucléaire (EPR, UK) : http://paloaltoonline.com/news/2016/02/18/city-snags-cheapest-ever-solar-power-contract

    Cabinet Xerfi : « Le photovoltaïque est maintenant compétitif (en France NDLR). Le coût de l’électricité issue des champs de panneaux solaires s’établit en effet entre 70€ et 110€/MWh, en fonction des conditions d’ensoleillement des sites. En comparaison, l’accord signé entre EDF et le gouvernement britannique garantit un prix d’achat de 126€/MWh pour l’électricité produite par la future centrale EPR d’Hinkley Point (Royaume-Uni). »

    Intégrer de hauts niveaux de solaire et d’éolien n’est pas un problème (AIE)
    http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/integrer-de-hauts-niveaux-de-solaire-et-deolien-nest-pas-un-probleme-aie-741/

    Le coût incrémental du stockage batterie ne sera que de +2c€ par kWh solaire PV dès 2020 selon la Deutsche Bank :
    http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/batteries-la-deutsche-bank-prevoit-une-baisse-massive-des-couts-durant-les-5-annees-a-venir-977/

    6 heures de stockage sont suffisants pour la gestion intraday. Ce qui correspond, en France, à environ 60 GW x 6 heures = 0,36 TWh. Donc pas besoin de capacités de stockage à l’échelle du PWh. Un back-up thermique (gaz) pour les très rares longues périodes sans vent et sans soleil est une solution bien meilleure marché que le stockage batterie longue durée. Une centrale à gaz ne coûte que 0,6€/W. Contre 6€/W pour les EPR. En outre nous disposons déjà d’importantes capacités de back-up hydraulique (lacs de barrage).

    Enfin le MIT a démontré qu’il n’ya aucun problème de ressources matérielles et surfaciques pour passer à un monde 100% solaire PV + stockage batterie: https://mitei.mit.edu/futureofsolar

    La Fondation Nicolas Hulot, dans son excellent rapport sur le solaire PV + stockage batterie, fait largement écho de ce document du MIT :
    http://www.fondation-nicolas-hulot.org/sites/default/files/publications/151112_ela5_solaire_photovoltaique.pdf

  • @Olivier D. Oui bien sur en couvrant 7500 ha de zone de sécurité d’une centrale (on va attendre que quelqu’un le fasse pour voir) on a effectivement une énergie moyenne sur une année de l’ordre de grandeur d’une centrale (à trois tranches). Le problème c’est par une semaine de Décembre ou Janvier ou Février ou pourquoi pas Novembre ou Mars.
    Tant qu’on ne saura pas stoker des Penta Watt.Heure, l’énergie solaire ou éolienne, ça n’existe pas, nous perdons notre temps, nos sous et… notre énergie, à en discuter.

  • Elon Musk (6’58 »):
    « Le solaire PV peut répondre plusieurs fois à la demande énergétique totale du monde. Des milliers de fois. C’est la vérité. La quantité d’énergie solaire qui atteint la Terre est vraiment très élevée. Nous avons un énorme réacteur de fusion nucléaire dans le ciel. Si vous prenez une centrale nucléaire et comparez sa production à celle de panneaux solaires placés sur la centrale nucléaire, en intégrant une zone de sécurité de 5 kilomètres, et bien le solaire produit davantage d’électricité que le nucléaire »
    https://www.youtube.com/watch?v=C5b7zk6eijI

  • On voit que la solution nucléaire est totalement zappée, alors qu’elle 1) nécessite très peu d’espace, 2) fonctionne 24/24h sans la combiner avec des centrales à gaz et 3) génère autrement plus de watts par m² que le solaire ou l’éolien.

    Exemple avec la petite centrale de Belleville sur Loire : 2.620MW de puissance nominale sur seulement 170 ha.

    La France peut-elle continuer à gaspiller de l’argent dans des solutions qui n’en sont pas?

  • Bonjour Monsieur Poussart,

    Il est fort probable (je ne suis pas autorisé à en dire plus) que le groupe Bouygues-Colas n’a rien demandé à la ministre de l’écologie, que l’annonce de 1000 km corresponde à une initiative personnelle de la Ministre. Peut-être à finalité purement politicienne. Capter l’électorat écologiste est un enjeu essentiel pour l’élection présidentielle d’avril-mai 2017. Je sais de source très sûre qu’à ce stade que Colas n’a pas étudié de modèle économique pour cette technologie.

    Les personnes impliquées dans ce projet de R&D auraient en réalité préféré commencer par de petits démonstrateurs pour tester la technologie avant de s’emballer avec un projet de 1000 km qui les met sous pression (a fortiori dans le contexte actuel de brouhaha médiatique qui a dépassé les frontières hexagonales), et dont le coût sera astronomique : CAPEX 6 fois plus élevé, durée de vie et rendement écrasées, OPEX inconnu.

    Concernant l’idée que vous partagez: la SNCF Réseau exploite 51.217 km de voies ferrées principales. Si on prend une hypothèse de panneaux d’un mètre de large, cela correspond à 50 millions de m2 x 150 W/m2 = 7,5 GW. Le projet de Ségolène Royal (1000 km x 3,5 m x 130 W/m2 selon l’INES) est d’un peu moins de 0,5 GW. En outre, en plaçant des murs de solaire PV bifacial de chaque côté des voies ferrées (exemple: http://www.b-solar.com/Products.aspx. Photo: http://thefraserdomain.typepad.com/photos/uncategorized/hitachi_bifacial.jpg), on aurait un système anti-bruit apprécié des riverains des voies ferrées. Avec un mur de seulement un mètre de haut, soit un impact paysager mineur, et ceci sur les 2 côtés de la voie (+ effet du solaire bifacial), cela ferait plus de 15 GW.

    L’énergie solaire pourrait ainsi répondre non seulement à la demande électrique de la SNCF (très bon pour l’image de ce groupe public) mais aussi à une partie de celle des villes traversées. On pourrait aussi recouvrir trains et TGV d’un film photovoltaïque. Le génie technologique français pourrait ainsi vraiment rayonner.

    Pourquoi Ségolène Royal veut-elle absolument faire passer des roues de camions et de voitures sur des panneaux PV collés sur de l’enrobé haute qualité ? Cette approche laisse de très nombreux experts du PV vraiment dubitatifs. La Ministre envisageait de paver l’A6 et l’A7 (« autoroute du soleil »), mais les experts lui on dit que ce n’est pas possible compte-tenu du très haut débit de véhicules qui dégraderait massivement la durée de vie des panneaux.

    ​Madame Royal propose à présent, en substitution, de paver les aires de repos des d’autoroute. Or des ombrières PV classiques seraient bienvenues dans ces aires pour offrir de l’ombre aux enfants et aux parents conducteurs, évitant ainsi insolation, deshydration et fatigue à l’origine d’accidents de la route. Les ombrières solaires PV coûtent 6 fois moins cher que la technologie Wattway de Bouygues-Colas et ont une durée de vie et un rendement bien supérieurs. Leur structure porteuse peut d’ailleurs être réalisée en bois (capture du CO2).

    Je vous remercie pour votre commentaire au contenu très riche. C’est rafraîchissant d’avoir ce regard provenant d’outre-atlantique, de la part d’un québecois par ailleurs Docteur du MIT en génie électrique.

    Très cordialement à vous,
    Olivier Daniélo

  • Je n’en reviens pas! La route constitue un environnement très agressif et la durabilité de ces panneaux a toutes les chances de s’y avérer problématique. Pourquoi ne pas avoir envisager plutôt, si on manque » d’espace au sol, la surface considérable des voies ferrées. Elles sont nombreuses en France, constituent un environnement beaucoup plus sain, d’accès automatiquement contrôlé, et comportent peu de coût d’entretien. De plus, elles sont généralement à proximité de lignes à haute tension sur lesquelles il serait « relativement  » de se brancher pour le transport de l’énergie ainsi produite. Je n’ai pas en main l’étude technique qui a dû être effectuée avant de se lancer dans cette entreprise; j’aimerais bien savoir où l’obtenir.

    Denis Poussart
    Professeur retraité
    Université Laval. Québec


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