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Un solvant plus sélectif pour la séparation des terres rares

Posté le par Arnaud Moign dans Chimie et Biotech

En raison de leurs propriétés électroniques exceptionnelles, les terres rares sont des éléments chimiques essentiels aux applications électroniques, magnétiques et optiques. La séparation de ces éléments aux caractéristiques proches est néanmoins complexe et reste problématique. Une équipe de scientifiques américains travaillant sous la bannière du Critical Materials Institute (Département de l’Énergie des États-Unis) étudie une méthode économique pour la séparation des terres rares à la demande, à partir de solvants plus sélectifs.

Les 17 éléments chimiques constituant la famille des terres rares (lanthanides, yttrium, scandium) sont essentiels au développement des technologies vertes et des nouvelles technologies en général. Ils entrent dans la fabrication d’aimants permanents (samarium-cobalt, néodyme-fer-bore), de batteries d’accumulateurs pour véhicules hybrides, de catalyseurs pour le raffinage du pétrole, et servent aussi dans de nombreuses applications optoélectroniques.

Devant la forte croissance de la demande en terres rares et face à une situation de monopole de la Chine, de nombreux projets concernant l’extraction, la séparation et le recyclage de ces ressources stratégiques sont ainsi en train de voir le jour.

La séparation liquide-liquide

À l’état naturel, les terres rares sont regroupées ensemble dans différents minerais – inégalement répartis à travers le globe – et sont présentes à des concentrations faibles, ce qui les rend difficilement exploitables. De plus, pour qu’elles soient utilisables industriellement, ces terres rares doivent aussi être séparées, par des processus de séparation complexes, en raison des propriétés physico-chimiques extrêmement proches. Par ailleurs, cette séparation s’avère coûteuse et génère beaucoup de déchets.

Le processus de séparation classique, en phase liquide-liquide, consiste à utiliser des molécules organiques (des ligands) pour fixer les ions de terres rares de façon sélective :

  1. Un solvant huileux contenant les ligands est vigoureusement mélangé avec la solution aqueuse riche en terres rares ;
  2. Les ions de terres rares réagissent avec les ligands de la partie organique pour former des complexes ;
  3. La non-miscibilité entre la partie huileuse et la partie aqueuse permet la séparation.

Un agent d’extraction plus sélectif

Dans un communiqué de presse, Santa Jansone-Popova, co-autrice de l’étude publiée dans le journal ACS Inorganic Chemistry, donne les raisons qui motivent la recherche de nouveaux ligands d’extraction :

« Le composé largement utilisé dans l’industrie est un agent d’extraction à base de phosphore, appelé PC88A. Comme sa sélectivité est relativement faible, de nombreuses étapes de séparation sont nécessaires, ce qui génère beaucoup de déchets supplémentaires tout au long du processus. »

La sélectivité est définie par un facteur qui caractérise la préférence d’un solvant vis-à-vis d’un métal, par rapport à un autre. Dans le cas de la séparation du néodyme et du praséodyme, par exemple, le facteur de séparation n’excède pas 1,2 avec un agent d’extraction du type PC88A.

Ce chiffre très faible a une conséquence directe sur le procédé : de nombreuses étapes d’extraction sont ainsi nécessaires pour obtenir une séparation complète.

La solution proposée par les chercheurs consiste à utiliser un nouveau type d’agent d’extraction basé sur des ligands diglycolamide (DGA), dont la sélectivité s’échelonne de 2,5 à 3,1.

Un facteur de séparation encore améliorable

Bruce Moyer, responsable des projets pour la diversification de l’approvisionnement des terres rares et ressources critiques au  Critical Materials Institute (CMI), est enthousiaste :

« La plupart des agents d’extraction des éléments de terres rares ont un facteur de séparation d’environ 1,5 pour les lanthanides adjacents – si nous arrivons à 2, c’est bien. Si nous arrivons à 2,5, nous commençons vraiment à économiser de l’argent. Si nous arrivons à 3, nous sommes vraiment heureux. Nous avons atteint un facteur de 6,7 en utilisant l’un des ligands de Santa [Jansone-Popova]. »

Si ces travaux, réalisés en collaboration avec Marshallton Research Laboratories, doivent être poursuivis, ils ont bien une vocation industrielle. Selon Mac Foster, copropriétaire de l’entreprise à qui la technologie a été cédée sous licence :

« Chez Marshallton, notre objectif est de devenir un fournisseur national – pour les USA – stratégiquement fiable d’agents d’extraction DGA pour les éléments de terres rares. Nous prévoyons de desservir des usines pilotes et des opérations commerciales dans le traitement du minerai, la récupération des résidus miniers et le recyclage ».

Pour aller plus loin

Posté le par Arnaud Moign


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