La construction est une science ancestrale qui évolue, mais très lentement, certainement moins de par son caractère scientifique que du fait même de son objet qui est de nature composite. Pourtant, depuis une décennie, des modifications du contexte collectif sont en train de susciter des inflexions assez profondes. Cependant, elles concernent moins la technologie que la méthodologie de ce qui est désigné comme la conduite de projet.
En effet, les préoccupations qui gagnent en importance sont relatives à ce qu’il est convenu de rassembler sous le terme très large d’environnement : risques climatiques, économies d’énergie, transition écologique. Toutefois, en arrière-plan, émerge la question urbaine qui tend à s’imposer de manière prégnante tout particulièrement depuis l’irruption de la pandémie. Ces questions constituent une nouvelle mise en perspective de l’activité spécifique qui consiste à conforter notre cadre de vie.
Pour cela, un travail réflexif sur les conditions d’élaboration des projets semble nécessaire. Et il concerne deux aspects majeurs.
Il devient nécessaire de réfléchir chaque opération dans le contexte beaucoup plus large de sa situation. Celui-ci ne peut pas se limiter à son objet mais doit être élargi en relation avec toutes les entités qui ont à faire avec lui. Cet élargissement du périmètre d’analyse implique la prise en compte de ce qu’il est habituellement désigné comme l’objet de l’aménagement du territoire. Cela suppose donc de traiter en urgence la dimension urbaine de la construction et cela appelle un éclairage renouvelé.
Du coup, cette nécessité doit se traduire dans la dynamique de chaque projet. Il ne s’agit plus d’initier un processus linéaire qui se déroulerait de manière routinière du fait de la reconduction de solutions traditionnelles. Chaque situation semble devoir relever désormais d’un traitement itératif qui permette de déterminer les meilleures solutions correspondant aux spécificités locales et non au seul respect des normes administratives génériques. Cette nouvelle pratique du projet doit s’inscrire dans une économie dite « circulaire ».
L’ambition de ce fascicule est de dégager un corpus de principes qui pourraient permettre d’engager des réponses à ces deux nouvelles exigences.
En ce qui concerne la dimension territoriale de la construction, l’idée est de trouver les moyens d’articuler les préoccupations immédiates des tâches de production avec les effets produits pour un temps beaucoup plus long qui est celui de son exploitation étendue à toutes les parties prenantes. Cette mise en perspective ne peut pas s’opérer sans prévoir des temps intermédiaires dans le déroulement du projet pour s’assurer des conséquences des choix opérés successivement. Cet enrichissement doit s’obtenir sans rajouter à la difficulté du travail quotidien des professionnels.
L’investissement du champ de l’économie circulaire est lui beaucoup plus disrupteur. En effet, il ne peut pas se réduire à des vérifications ponctuelles, mais suppose une nouvelle logique dans chaque décision tant technique qu’organisationnelle. En fait, il s’agit d’introduire de nouveaux critères de jugement ce qui modifie le spectre des paramètres de choix. Il s’agit alors d’une appropriation qui ne peut être que progressive et qui exige certainement une nouvelle compétence. C’est celle du retour d’expérience si peu pratiquée pour l’heure mais dont il sera difficile de faire l’économie.
L’exercice proposé est ainsi de faire apparaitre les prochains paradigmes de la gestion de projet en construction.