Les filtres passe-bande utilisant des résonateurs à ondes élastiques sont devenus des éléments indispensables des systèmes de télécommunications mobiles. Le déploiement successif de quatre générations de systèmes de téléphonie mobile, et la préparation active de la cinquième génération (dite 5G) destinée à être déployée dès le début des années 2020, ont fait émerger de multiples bandes de fréquences afin d’assurer à la fois une compatibilité descendante avec les protocoles plus anciens, de répondre à la multiplication des applications, et de prendre en compte les disparités géographiques dans l’allocation du spectre radiofréquence. Ceci se traduit par l’inclusion de plusieurs dizaines de filtres passe-bande miniaturisés dans un unique terminal de téléphonie mobile, ainsi qu’une course à la performance : réaliser des modules duplexeurs, voire récemment jusqu’à quint- ou hexaplexeurs, afin de faire cohabiter jusqu’à six voies d’émission/réception opérant en simultané sur autant de bandes de fréquences tout en étant connectés à une même antenne. De tels modules doivent assurer une isolation de l’ordre de 50 à 60 dB entre ces différentes voies, tout en offrant des pertes d’insertion inférieures à 2 dB dans la bande passante de chaque voie, avec des zones de transition devenant de plus en plus étroites, requérant de ce fait des positionnements en fréquence extrêmement précis, de l’ordre de 0,1 % de la fréquence centrale. De plus, l’industrie des filtres radio-fréquences doit suivre le rythme imposé par les fabricants de téléphones mobiles et assurer un renouvellement de leurs produits sur des périodes de l’ordre de l’année.
Pour répondre à l’ensemble de ces contraintes, il a été nécessaire de développer des modèles de conception à la fois précis et rapides, permettant de minimiser les itérations entre conception et fabrication, et ainsi d’accélérer la mise sur le marché de nouveaux composants. Nous nous intéressons dans cet article uniquement à l’une des technologies de filtres à ondes élastiques : les filtres à ondes élastiques de volume, qui exploitent la propagation d’ondes à travers l’épaisseur d’empilements de couches sub-micrométriques. En effet, l’autre technologie de filtres à ondes élastiques employée, reposant sur la propagation d’ondes de surface sous des réseaux périodiques d’électrodes, présente un certain nombre de caractéristiques relativement distinctes des composants à ondes de volume et font donc l’objet d’un article dédié [E 3 211].
Nous suivons ici le flux de conception habituellement employé pour des filtres à ondes élastiques de volume. Une première partie traite de la synthèse d’une fonction de filtrage, respectant les spécifications imposées, à partir de pseudo-résonateurs fournissant une description purement mathématique de la réponse attendue par ces composants. Une seconde partie s’intéresse au dimensionnement de résonateurs en utilisant des modèles physiques et par conséquent prédictifs. Ces derniers se doivent d’être, de manière inhérente, multi-physiques, mêlant des aspects mécaniques liés à la propagation d’ondes élastiques et des aspects électriques liés à la fonctionnalité recherchée. Nous verrons également que le fait d’opérer dans une gamme de fréquence de l’ordre de 1,5 à 6 GHz impose de plus de prendre en compte les phénomènes de propagation électromagnétiques à l’échelle de la puce, si miniaturisée soit-elle, voire du module complet. Aussi abordons-nous comment les flux de conception intègrent un certain nombre de parasites liés uniquement à la géométrie des pistes métalliques employées ou au contraire tirent parti de ces phénomènes. Finalement, la course à l’augmentation des performances (réduction de pertes, augmentation de la linéarité…) nécessite, dans des phases de développement de la technologie, l’intégration d’effets a priori du second ordre, mais se révélant critiques à mesure que les spécifications sur les composants se font de plus en plus drastiques. Nous abordons donc dans une dernière partie des éléments tels que la prise en compte de la génération de modes de vibration indésirables ou de non-linéarités.
Le lecteur trouvera en fin d'article un glossaire et un tableau des notations et des symboles utilisés.