L’incorporation de radionucléides par ingestion de denrées produites localement est de loin la principale voie d’exposition potentielle de la population qui réside à proximité des installations nucléaires [BN 3 909], du fait de leurs rejets normaux autorisés. Toutefois, les doses correspondantes restent très faibles, de quelques microsieverts au maximum. En cas d’accident significatif affectant une telle installation, si des mesures d’interdiction de consommation adaptées n’étaient pas prises très rapidement, l’ingestion de denrées contaminées pourrait constituer, dans les premières semaines suivant les dépôts radioactifs, une voie d’exposition importante des populations (voir à ce sujet l’article sur l’accident de Fukushima-Daiichi [BN 3 837]). Les transferts des radionucléides dans l’environnement, notamment dans les chaînes alimentaires, déterminent l’intensité de cette exposition ; c’est objet d’étude de la radioécologie.
Après la dispersion des substances radioactives dans l’air ou dans l’eau, plusieurs phénomènes gouvernent la propagation d’une contamination radioactive dans les chaînes alimentaires. Afin d’expliciter chacun de ces phénomènes, les facteurs qui les influencent et leurs interactions, l’article qui suit traite tout d’abord le cas de la propagation d’une contamination ponctuelle à la suite d’un dépôt radioactif sur une plage de temps allant de quelques heures à quelques jours, correspondant à un dépôt accidentel. Le cas d’apports chroniques, résultant par exemple des rejets normaux d’une installation nucléaire, est présenté ensuite. Les équations et les valeurs des paramètres indiqués doivent permettre au lecteur de se faire une idée des intensités relatives des différents transferts et d’effectuer, pour quelques radionucléides et types de denrées, des calculs similaires à ceux qui sont réalisés par des codes de calcul. Ces éléments permettent d’estimer les activités massiques (Bq.kg–1 de denrée fraîche) dans les différents types de denrées à partir des activités présentes dans l’air, le sol ou l’eau.
Il est important de noter ici que l’application des éléments fournis dans le présent article ou l’utilisation des codes de calcul ne permet que d’estimer des ordres de grandeur. Compte tenu de la variabilité naturelle de l’intensité des transferts et de la variabilité des activités massiques ou volumiques des radionucléides dans l’environnement qui en résulte, les incertitudes associées à ces estimations sont difficiles à quantifier et les travaux menés sur ce sujet n’ont pas, jusqu’à présent, permis d’aboutir pour un usage opérationnel satisfaisant. Les résultats obtenus restent toutefois pertinents pour apprécier les niveaux des activités massiques ou volumiques dans l’environnement ; l’autre approche qui permet de les déterminer, à savoir la réalisation de mesures dans l’environnement, est également confrontée à la variabilité naturelle et à la représentativité des mesures effectuées, sachant que, de surcroît, il est impossible de quantifier des activités trop faibles par des mesures.