Dans un rapport, la Cour des comptes juge préoccupante la situation des déchets radioactifs de faible activité à vie longue (FA-VL) en France, qui ne disposent d'aucune solution de stockage à long terme. Cette situation expose à des risques qualifiés de « majeur » ou « critique » et fragilise la dynamique de relance du nucléaire.
Plus de vingt ans après l’identification du problème, la France ne dispose toujours d’aucune solution de stockage pour les quelques 280 000 mètres cubes de déchets radioactifs de faible activité à vie longue (FA-VL). C’est l’un des constats les plus sévères du rapport que la Cour des comptes a consacré à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra). Au-delà du manque d’avancées techniques, c’est surtout l’absence de décisions politiques claires que déplore l’institution.
Peu connus du grand public, ces déchets n’en constituent pas moins un défi central de la politique nucléaire française. Moins dangereux en termes d’intensité radioactive, ils le sont davantage en termes de persistance, puisque leur durée de vie radioactive s’étend sur des dizaines, voire des centaines de milliers d’années. Ils représentent environ 6 % du volume total des déchets radioactifs français, et concentrent autour de 0,01 % de leur radioactivité.
Ces déchets proviennent d’activités industrielles non électronucléaires, de terres faiblement contaminées, de l’exploitation et du démantèlement d’équipement et du traitement de certains effluents radioactifs aqueux. Ils sont répartis en plusieurs typologies : 30 % de graphites, 32 % de déchets bitumés, 29 % de radifères et 9 % de déchets technologiques.
Dès les années 2000, une filière des déchets de FA-VL est officiellement identifiée comme un besoin de gestion spécifique. La loi du 28 juin 2006 pose l’objectif d’en assurer la prise en charge en vue de la mise en service d’un centre de stockage en 2013. Cependant, cette échéance a été supprimée par l’ordonnance du 5 janvier 2012 et ne figure plus dans le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs.
Plus de 30 ans de retard dans la mise en service d’un site de stockage
À ce jour, le seul site de stockage identifié se situe sur la communauté de communes de Vendeuvre-Soulaines (CCVS), dans l’Aube. Mais il ne concerne que les déchets radifères, ce qui signifie que les autres déchets (graphites, bitumés et technologiques), qui représentent 71 % de l’inventaire des déchets de FAVL, restent sans solution. De plus, la Cour des comptes révèle que le « projet de Soulaines ne pourra pas être mis en service avant le milieu de la décennie 2040, soit plus de 30 ans après la date initialement prévue par le législateur. »
Ce décalage temporel s’explique par « des obstacles techniques, tels que la remise en question d’une filière de gestion unique et l’inadaptation du site au stockage de l’ensemble des déchets, ainsi que par des facteurs politiques, notamment la pression limitée des ministères de tutelle et des producteurs de déchets, et des contraintes financières dues à l’absence de financements dédiés. »
En attendant, tous ces déchets sont entreposés temporairement sur différents sites de production ou de recherche. L’institution note que l’absence de perspectives de stockage expose le projet de gestion des déchets FAVL à plusieurs risques avec un niveau de gravité qualifié de « majeur » ou « critique ». Parmi ceux-ci, elle cite la perte de la disponibilité du site sur la CCVS, la démobilisation des équipes de l’Andra qui pourrait freiner la mise en œuvre de solutions proportionnées et acceptables, et enfin d’autres risques d’ordre financiers.
Surtout, en termes de sécurité, cette situation pourrait freiner le démantèlement programmé d’installations existantes, notamment les réacteurs UNGG (Uranium naturel graphite gaz). La Cour alerte sur le fait que « ces éléments remettent en cause la capacité de la filière à gérer l’ensemble de ses déchets et fragilisent la dynamique de relance du nucléaire.»
Face à ce constat, l’institution recommande de créer un ou plusieurs fonds alimentés par les producteurs de déchets pour financer les recherches et les études nécessaires sur le stockage en faible profondeur des déchets de FAVL. Elle préconise d’arrêter le schéma global de gestion et de lancer la recherche de sites adaptés au stockage des différentes catégories de ces déchets. Et enfin de fixer le coût du projet de stockage en faible profondeur sur le site de la CCVS.









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