L’urbanisme souterrain ne se conçoit pas en dehors de l’urbanisme « général ». Il est seulement, depuis sa définition par Édouard Utudjian, au début des années 1930, une part méconnue de l’urbanisme. Si, pour le grand public, l’urbanisme a d’abord une dimension esthétique, porteuse de majesté et de puissance, cette dimension disparaît dès lors que les ouvrages sont invisibles. Mais l’urbanisme comprend surtout la satisfaction des fonctions urbaines majeures (desserte, mobilité, hygiène, convivialité). Hier la sécurité a justifié les fortifications, les tours de guet, les portes gardées. La première mission de la ville d’aujourd’hui est toujours de satisfaire les demandes de ses habitants, ensuite seulement celles des visiteurs. Entre l’architecture et l’urbanisme, il n’y a pas de frontière nette, c’est plutôt une question d’échelle, du bâtiment à la ville, en passant par la rue, l’îlot et le quartier.
Plus généralement, le sous-sol apparaît comme la « face cachée » du territoire, un volume en vérité. Si la plupart des auteurs s’accordent pour réserver la surface à l’homme, un urbanisme durable doit mettre à profit le sous-sol afin de créer, pour l’homme, le meilleur environnement. Par leur position, le sol et le sous-sol fournissent à la ville une infrastructure naturelle, peu à peu complétée par des ouvrages construits, voiries et réseaux associés. Or le sous-sol peut faire bien davantage en accueillant une part significative des fonctions et services urbains. Encore faut-il planifier les utilisations de l’espace souterrain, considéré comme partie intégrante de l’espace urbain global, dans l’espace et dans le temps.
Après ce panorama historique et géographique de réalisations souterraines, insuffisamment connues des ingénieurs (et moins encore des élus et de la société civile tout entière), parce que moins visibles qu’en surface ou pas du tout, un second dossier Urbanisme souterrain- Demandes, offres, contraintes et avantages abordera les conditions de la pratique, le pourquoi des usages du sous-sol : les demandes et les offres, et le comment : les contraintes géologiques et juridiques. Il s’agit en effet d’expliquer pourquoi le recours au sous-sol permet de résoudre beaucoup de problèmes, puis comment le faire entrer dans la pratique de l’urbanisme. Au-delà, l’aménagement du territoire peut aussi profiter de ce dossier, car la « campagne » aussi a son sous-sol, avec ses usages classiques et futurs.
Ce dossier ouvre à l’urbanisme souterrain un champ d’avenir plus large que celui connu jusqu’ici, un champ qui mobilise et mobilisera de plus en plus d’innovations techniques, lesquelles en retour élargiront la gamme des usages possibles du sous-sol au service de l’homme.