La chromatographie de partage centrifuge (CPC) est une technique de séparation multi-étagée, utilisant des colonnes compactes, constituées d’une cascade de chambres ou cellules de partage reliées entre elles par des canaux et soumises à un champ d’accélération centrifuge. Le mécanisme de séparation repose sur la différence de distribution des composés entre deux phases liquides non miscibles. Dans la colonne de CPC, un des liquides est maintenu stationnaire grâce à la rotation de la colonne et donc sans avoir recours à un support solide, tandis que la phase mobile traverse la phase stationnaire à un débit imposé par une pompe. La chaîne de CPC et sa gamme d’utilisation sont proches de celles d’une chaîne CLHP (chromatographie liquide haute performance) à vocation préparative.
Les principaux développements de la CPC ont eu lieu au cours des années 1990 et 2000 avec l’apparition de nouveaux équipementiers, portant la technologie à un niveau de maturité qui la rend industrialisable (les colonnes sont disponibles en différents matériaux, pour des volumes allant de 30 mL à 25 L). L’absence de support solide pour réaliser des opérations de capture ou de fractionnement permet d’aborder le traitement de charges complexes comme c’est souvent le cas pour les substances naturelles (métabolites secondaires complexes par exemple) ou issues de biotechnologies, sans risquer la surcharge ou l’encrassement du support (résine, silice). Cette souplesse de fonctionnement, le faible coût de la phase stationnaire et la réduction de la consommation de solvants permettent à la CPC d’élargir le champ d’applications de la chromatographie liquide et d’envisager la réduction du nombre d’étapes de purification. C’est la purification de substances naturelles à haute valeur ajoutée (peptides, alcaloïdes) qui a servi dans un premier temps de cas d’étude. Même si le changement d’échelle a longtemps été considéré comme une transposition linéaire, il est montré ici que la CPC est contrôlée par :
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l’hydrodynamique des phases et le transfert de matière ;
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la géométrie de la colonne, suivant des règles non linéaires.
Les outils de modélisation et d’ingénierie des colonnes de CPC, présentés dans cet article, permettent de dimensionner ces dernières pour une application et une productivité souhaitées ou bien de transposer une séparation d’un équipement de R&D à un équipement de production.
Comme tous les procédés basés sur le transfert de matière entre deux fluides, les performances d’une colonne de CPC (efficacité, résolution, productivité) résultent de l’hydrodynamique des phases, présentée dans un premier temps.
Les modèles développés permettent de décrire et prédire les chromatogrammes en mode élution comme en mode déplacement. Les modèles intègrent donc les termes de transport, transfert et, le cas échéant, réactions des espèces mises en œuvre dans la séparation. L’hydrodynamique des phases est prise en compte dans les modèles via l’évolution du rapport de phase, des vitesses phasiques et du coefficient de transfert de matière.
Les modèles obtenus sont alors utilisés pour optimiser la séparation à une échelle donnée, réaliser une transposition d’échelle ou dimensionner un équipement industriel. La démarche est illustrée par le changement d’échelle de la séparation d’alcaloïdes d’une CPC de 30 mL à une CPC de 2 200 mL.