Comment définir une « odeur » ?
L’odorat est l’un de nos cinq sens, il est un outil de détection complexe et puissant. L’odeur est une perception provenant de l’interaction entre une molécule chimique dite « odorante » et la muqueuse olfactive. Cela déclenche un influx nerveux, qui est envoyé au bulbe olfactif et autres parties du cerveau qui vont interpréter ce message. C’est cette interprétation qui est la plus complexe car elle est propre à chaque individu en fonction de son passif et de ces souvenirs. En effet, une odeur peut être perçue comme insoutenable par un individu et supportable, voire non désagréable par un autre. De plus, la perception d’une même odeur peut varier pour un même individu en fonction de différents paramètres tels que l’état de fatigue, l’état physiologique ainsi que les autres sens associés à cette odeur (goût, vision…).
L’odorat n’est donc qu’une simple lecture de l’information comme les autres fonctions cognitives (fonctions permettant de tirer une information de l’environnement). Il dépend de facteurs psychologiques liés à une interprétation subjective des odeurs. Les odeurs ont un caractère hédoniste, c’est-à-dire que l’impression agréable ou non d’une odeur n’est pas innée. Elle résulte d’un apprentissage et son interprétation est associée à un souvenir, une situation.
L’intensité n’est également pas perçue de la même manière au sein d’une population. En effet, le stimulus nerveux lié à une odeur peut être réduit si l’individu évolue dans un environnement où une autre odeur est omniprésente en faible quantité. Comme pour la perception agréable ou nauséabonde, l’intensité d’une odeur est dépendante de facteurs psychologique et physiologique, et, par conséquent, varie d’un individu à l’autre.
Cela explique en partie la difficulté à mesurer l’impact d’une émission odorante sur une population, car la perception sera différente pour chaque individu.
L’odeur et la toxicité
Une odeur perçue comme nauséabonde peut engendrer une inquiétude quant au caractère « sain » de l’air inspiré. De manière générale, le seuil de détection olfactive est bien inférieur au seuil de toxicité d’un polluant odorant. Par exemple, le phénol est perçu à une concentration de 0,18 mg/m3 alors que le seuil de toxicité est à une concentration de 19 mg/m3
C’est la complexité de l’interprétation d’une odeur qui en fait la deuxième cause de plainte de riverain, après le bruit, dans les environnements industriels.
Contexte historique de la mise en place d’un cadre réglementaire et législatif
Le problème des odeurs nauséabondes est ancien, depuis que des industries et des manufactures se sont développées à proximité des habitations.
Le décret du 15 octobre 1810, stipule : « Les manufactures et ateliers qui répandent une odeur insalubre ou incommode, ne pourront être formés sans une permission de l’autorité administrative et seront divisés en trois classes :
- Classe 1 : Manufacture et atelier devant être éloigné des habitations. La permission est délivrée par décret après une demande au préfet. Un affichage est mis en place dans un rayon de 5 km et les avis des tiers seront recueillis.
- Classe 2 : Manufacture et atelier ne nécessitant pas forcément un éloignement des habitations si la preuve est faite, que les activités qui y sont pratiquées n’incommodent pas le voisinage.
- Classe 3 : Etablissement pouvant rester sans inconvénient près des habitations, mais qui reste sous surveillance de la police. »
Ces décrets sont les prémices des lois et réglementations régissant les émissions odorantes actuelles.
Le premier texte législatif sur les problèmes de nuisances olfactives est la loi n° 61-842 du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs. Il est le socle de la législation actuelle.
En 1996, la loi LAURE « Loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie » codifiée au livre II, titre II (partie législative) du Code de l’environnement, reconnaît comme pollution « toutes substances susceptibles de provoquer des nuisances olfactives excessives ». L’objectif de cette loi est de mettre en œuvre le droit de chacun de respirer un air pur et définit le fait qu’une nuisance olfactive est une pollution à part entière, qui altère la qualité de l’air et donc la qualité de vie.
Quel est le cadre législatif des installations classées pour l’environnement en fonction de leurs régimes ?
La législation relative aux installations classées pour l’environnement est codifiée dans le livre V titre premier du Code de l’environnement. L’article L. 511-1 stipule que les installations soumises aux dispositions du présent titre sont celles qui présentent des dangers et des inconvénients, soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publique… La notion de nuisance olfactive est explicitée par la notion « d’inconvénient pour la commodité du voisinage ». Les prescriptions générales diffèrent cependant en fonction du régime de l’installation.
Les installations non classées ne dépendent pas de la réglementation ICPE. Elles doivent cependant respecter les prescriptions du règlement sanitaire départemental, relevant des compétences des mairies.
Si votre installation est soumise au régime de la déclaration, les prescriptions générales sont inscrites dans des arrêtés ministériels ou des arrêtés-types. Il est inscrit dans ces arrêtés que les installations susceptibles d’émettre des odeurs doivent mettre en place des dispositifs permettant de collecter et de canaliser autant que possible ces émissions. Cependant, des prescriptions particulières à respecter peuvent être précisées dans certains arrêtés.
Si votre installation est soumise au régime de l’autorisation, les prescriptions générales pour limiter les nuisances olfactives sont celles reprises par l’arrêté ministériel du 2 février 1998. Les prescriptions sont reprises dans les articles suivants :
- Article 4 : Les poussières, gaz et odeurs doivent êtres captés à la source dans la mesure du possible.
- Article 20 : Des dispositions doivent être prises pour limiter les odeurs provenant du traitement des effluents : les surfaces importantes (bassins de traitements, par exemple) potentiellement sources d’odeurs et ne pouvant être confinées, seront implantées assez loin du voisinage afin de limiter la gêne occasionnée. Toutes les dispositions pour limiter l’apparition de conditions anaérobies favorisant l’apparition d’odeurs nauséabondes dans les canaux à ciel ouvert et bassins de stockage, doivent être prises (à l’exception des traitements anaérobies). Les bassins et canaux contenant les boues et susceptibles de dégager des odeurs nauséabondes doivent être, autant que possible, couverts et ventilés.
- Article 29 : Le débit d’odeur est égal au produit entre le débit d’air en m3 par heure et le facteur de dilution au seuil de perception. Le niveau d’une odeur est quant à lui défini comme le facteur de dilution qu’il faut appliquer à un effluent odorant pour que celui-ci ne soit plus perçu comme odorant par 50 % d’une population cible (il n’y a pas d’unité).
Le cas échéant, l’arrêté préfectoral fixe le débit d’odeur des gaz rejetés par toutes les sources canalisées, diffuses et canalisables, à ne pas dépasser.
- Article 37.IV : Afin de réduire les nuisances olfactives et les pertes par volatilisation de substances, les déchets pâteux et solides sont enfouis le plus tôt possible dans une limite maximale de 48 heures. Si le déchet est odorant, la distance d’exclusion minimale d’épandage vis-à-vis des tiers est de 100 m.
- Article 45 : Le stockage des déchets avant leurs traitement ou revalorisation doit être fait de manière à ne pas engendrer de risques de pollution (par conséquent de dégagement olfactif nauséabond).
Certaines installations sont exclues du champ d’application de l’arrêté ministériel du 2 février 1998. Leurs prescriptions générales sont notifiées dans des arrêtés dits « sectoriels ».
Arrêtés sectoriels