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Comment gérer la croissance du trafic aérien ?

Posté le par Pierre Thouverez dans Innovations sectorielles

Pour le secteur aérien, la crise sanitaire est presque oubliée. En témoignent les chiffres du trafic aérien, qui ont quasiment retrouvé leur niveau d’avant COVID.

Selon l’IATA (International Air Transport Association), les compagnies aériennes ont retrouvé au mois de mai dernier une activité comparable (96,1 %) au mois de mai 2019. Ces chiffres, publiés le 6 juillet 2023, sont tirés vers le haut par les vols intérieurs, les premiers à avoir été réautorisés. Les liaisons internationales ne sont pas loin derrière, ayant retrouvé à 90 % environ leur niveau d’avant COVID.

Ainsi, le record de 4,54 milliards de voyageurs transportés en 2019 ne sera pas battu en 2023 (4,35 milliards de voyageurs transportés). Selon l’IATA, il le sera dès 2024.

Sur le moyen terme, Airbus et Boeing ont confirmé une tendance en forte hausse pour les prochaines années, en annonçant avoir pour objectif de doubler leur flotte d’appareils au cours des vingt prochaines années. Alors qu’aujourd’hui, un avion décolle chaque seconde, le trafic aérien mondial devrait doubler d’ici 2037, et tripler d’ici 2050.

Des pays émergents, en termes d’activité aérienne, comme l’Inde ou la Turquie par exemple, vont drainer une partie de cette augmentation. Pour les pays déjà très actifs, comme l’Europe ou les Etats-Unis, un des enjeux va consister à développer des solutions technologiques pour être en mesure d’absorber cette augmentation dans les aéroports. Les phases d’atterrissage et de décollage des appareils notamment pourraient faire l’objet de profondes modifications, pour limiter leur durée et fluidifier la rotation des avions dans les aéroports. Une contrainte persistante se concentrera autour des zones très urbanisées, où les aéroports ne peuvent pas être agrandis indéfiniment, et où le trafic va vite se trouver confronté à une limite indépassable.

Cette reprise salutaire du trafic pour l’ensemble de la filière aérienne ne va pas sans poser de questions, dans l’optique d’une aviation décarbonée à l’horizon 2050. D’autant plus que pour les professionnels du secteur comme pour les pouvoirs publics, la diminution à court et moyen terme des émissions de GES liées au transport de passagers passe par deux piliers : l’utilisation massive des biocarburants, et une croissance plus lente du trafic aérien.

En ce qui concerne les biocarburants, les appareils actuels sont déjà en capacité d’en consommer dans leur mode de fonctionnement actuel. Dès à présent, les biocarburants peuvent entrer à 50% dans la composition du mélange (avec 50% de kérosène), sans endommager les réservoirs et les moteurs des appareils. Pour aller plus loin, il faudra apporter des modifications aux appareils existants, et surtout mettre au point de nouveaux appareils en capacité de consommer des mélanges plus riches en CAD (carburants d’aviation durables). Sauf que tout cela est aujourd’hui secondaire, au regard de la faible efficacité énergétique de la production des carburants d’aviation durables, aujourd’hui rédhibitoire pour imaginer les produire en quantité suffisante. Par exemple, pour ce qui concerne la France, la production via de l’électricité des biocarburants nécessaires pour soutenir un trafic aérien qui fonctionnerait avec 100% de CAD équivaudrait à la production de 15 EPR. Difficile à imaginer.

L’autre paramètre réside donc dans une progression plus lente du trafic aérien, dont on peine aujourd’hui à percevoir les contours. La croissance du trafic aérien, qui devrait tourner autour de 3,1% dans les années à venir pour aboutir à un doublement du trafic d’ici à 2050, doit être régulée selon une tendance baissière. Comment réaliser cela ? Les idées ne manquent pas, mais se heurtent à de nombreux dilemmes. Ainsi, augmenter le prix des billets aurait certes tendance à limiter les vols, mais cela entrainerait aussi une augmentation forte des inégalités quant à l’accès à ce type de transport.

La volonté croissante de privilégier d’autres moyens de transport pour les destinations plus courtes, comme cela a été mis en place en France, pour l’instant de manière relativement minimaliste, permet de transférer une partie du trafic aérien sur d’autres secteurs, comme le train.

Pour conclure, il apparaît aujourd’hui que les solutions qui permettront au secteur aérien de se rapprocher des objectifs fixés pour 2050 se situent plus dans le développement massif des biocarburants et la baisse de la croissance du trafic que dans la mise au point d’avions révolutionnaires fonctionnant à l’hydrogène (vert) où à l’électricité par exemple.

Pour aller plus loin

Posté le par Pierre Thouverez


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