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Des tests de paternité pour estimer l’abondance des poissons

Posté le par Nicolas LOUIS dans Entreprises et marchés

L'Ifremer a développé une nouvelle technique pour estimer l'abondance des poissons en identifiant lesquels sont apparentés grâce à des tests génétiques. Le Conseil International pour l'Exploration de la Mer (CIEM) va utiliser les résultats obtenus par cette méthode pour l'estimation des ressources marines.

Estimer de manière fiable l’abondance des poissons dans les mers est essentiel pour l’exploitation durable des ressources marines vivantes. Pour quantifier chaque espèce, la technique la plus couramment employée consiste à utiliser des modèles numériques qui fonctionnent à partir de deux types de données : celles issues de la pêche et celles collectées par des scientifiques lors de campagnes en mer. Par contre, cette méthode n’est pas efficiente lorsque l’espèce est peu abondante, comme c’est le cas avec la population de raies bouclées. Dans le cadre d’un projet européen nommé Pandora, l’Ifremer a développé une nouvelle technique faisant appel à la génétique.

Les chercheurs se sont inspirés d’une méthode développée par leurs collègues australiens. Ils ont échantillonné des individus, puis ont prélevé leurs tissus pour ensuite procéder à du génotypage. Ils sont ainsi parvenus à identifier lesquels sont apparentés (parents, enfants…), en se servant de la même approche que celle pratiquée avec des tests de paternité pour comparer les informations génétiques entre deux personnes.

Verena Trenkel, responsable de l’unité halieutique grand ouest à Ifremer, explique selon quel principe les résultats obtenus sont interprétés : « Si, dans un échantillon, nous observons un grand nombre d’individus apparentés, nous pouvons en conclure que la population est très petite, car lorsque l’on prend aléatoirement des individus, la probabilité qu’ils soient apparentés augmente lorsque la population est faible. Inversement, si la population est grande et donc abondante, il y a peu de probabilité que les individus soient apparentés. Le nombre d’individus apparentés nous renseigne donc sur la taille de la population. »

La population de raies bouclées estimée à 135 000 en 2013

Pour estimer l’abondance d’une espèce, les scientifiques ont utilisé un modèle de dynamique des populations qui décrit son évolution à partir de son taux de croissance et de décroissance. Il est capable d’estimer le nombre de poissons mature par année. Concrètement, plus de 7 000 raies bouclées ont été échantillonnées sur la période 2015 à 2020 dans l’estuaire de la Gironde et à environ 100 mètres de profondeur au large. L’année de naissance de chacune d’entre elles a été calculée. Les chercheurs ont ensuite pu chiffrer à 135 000 le nombre d’individus mature en 2013, c’est-à-dire le nombre de parents potentiels. « L’estimation n’est pas effectuée par rapport à l’année de l’échantillonnage, mais est reconstituée à partir de l’année de naissance, précise Verena Trenkel. Pour connaître l’âge d’une raie, il faut utiliser une technique qui consiste à tronçonner les vertèbres des poissons. Cette méthode est très invasive et nous développons en ce moment une autre technique capable de nous renseigner sur l’âge de l’individu grâce à la génétique. »

La fiabilité de cette nouvelle approche a été testée par les mêmes collègues australiens sur une population de thons rouges du Pacifique, dont l’abondance avait déjà été estimée à partir d’une approche traditionnelle. Résultat : elle s’est révélée plus fiable pour estimer cette espèce.

Preuve que cette nouvelle approche convainc, le CIEM (Conseil International pour l’Exploration de la Mer) a décidé de prendre en compte les résultats obtenus à partir de celle-ci pour mener à bien ses travaux sur l’estimation des ressources marines. Cet organisme scientifique intergouvernemental a pour rôle de rendre des avis auprès de la Commission européenne, notamment sur le thème de la gestion des quotas de pêche.

De son côté, Ifremer va continuer à appliquer cette nouvelle méthode, cette fois-ci pour estimer la population de maigres. Des échantillonnages ont déjà été effectués, et des analyses génétiques sont en cours de réalisation. Cette nouvelle technique devrait ensuite être utilisée pour quantifier la population de raies brunettes.

Pour aller plus loin

Posté le par Nicolas LOUIS


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