Depuis le XIXe siècle, nos sociétés se sont développées sur la base d’une industrie florissante et sont devenues dépendantes de produits et d’énergies en provenance de sources non renouvelables. Du fait de la dégradation de l’environnement et de l’épuisement prochain d’un grand nombre de ressources naturelles, il est nécessaire de repenser nos modes de production et de consommation, à l’économie d’abord, puis de substituer aux besoins indispensables une production alternative propre et durable.
L’identification de souches naturelles a permis le développement des premiers procédés de fermentation industrielle au milieu du XXe siècle avec la production d’antibiotiques, d’acides aminés et de quelques acides organiques. Mais, depuis les années 1980, les progrès de l’ingénierie du vivant ont permis de franchir une étape supplémentaire avec l’ambition de construire des organismes « à la carte », capables de produire par fermentation le composé voulu à partir de ressources issues de la biomasse végétale. C’est l’objectif d’un champ de recherche appelé « ingénierie métabolique ». À ce jour, la fermentation de plus de 130 composés différents a été étudiée dans de multiples organismes afin de couvrir les besoins en carburants, plastiques et autres molécules de l’agriculture, de la chimie et de la médecine (voir l’article [BIO801] des Techniques de l’ingénieur).
Contraindre un micro-organisme à fabriquer un composé chimique est loin d’être une tâche aisée. Il est possible d’en produire de faibles quantités, mais obtenir un rendement économiquement viable est très dépendant de la source de carbone choisie, de l’échelle de production et de la méthode de séparation utilisée. Dans cet article, nous présentons un panel d’outils et de méthodes utilisables pour concevoir un organisme et augmenter de manière significative ses rendements en utilisant des approches de biologie de synthèse.
Nous pensons que les technologies issues de l’ingénierie métabolique et de la biologie de synthèse sont bientôt prêtes à sortir du monde académique et à être expérimentées plus largement à l’échelle industrielle, comme le montrent un certain nombre de succès industriels récents. Nous discuterons aussi du rôle des acteurs académiques et des entreprises, ainsi que des phases de développement et des astuces pour passer du laboratoire au fermenteur de production.