Les optiques binaires sont des composants optiques codés, soit en phase soit en amplitude par une succession de motifs. Par rapport aux composants optiques classiques qui utilisent la réfraction ou la réflexion pour modifier la direction des rayons lumineux, les composants binaires exploitent le phénomène de la diffraction qui sollicite l’aspect ondulatoire de la lumière. La diffraction longtemps considérée comme une limitation (on parle de systèmes optiques en limite de diffraction) a été progressivement exploitée dans des architectures optiques. Dans un premier temps, elle a été utilisée pour améliorer les performances de combinaisons d’optiques réfractives (par exemple pour corriger le chromatisme), puis progressivement, avec l’avènement des capteurs digitaux qui permettent de manipuler les images après leur acquisition, certaines équipes de chercheurs envisagent tout simplement de remplacer les optiques réfractives et réflectives, par des composants diffractifs, afin de réaliser des systèmes légers, peu coûteux et compacts.
L’imagerie à partir d’optiques binaires est prisée dans le domaine des rayons gamma et des rayons X où la matière est très absorbante. Cela rend en effet délicat la réalisation de lentilles réfractives qui impose la variation des épaisseurs optiques importantes ou bien l’utilisation de miroirs où l’empilement de couches diélectriques réfléchissantes peut être problématique. Ainsi, l’utilisation d’optiques binaires permet de limiter l’absorption du rayonnement tout en apportant une fonction de focalisation.
Dans cet article, les composants optiques binaires considérés sont les seuls « ingrédients » optiques pour former une image, avec un focus sur les optiques binaires focalisantes dont les propriétés d’imagerie sont proches de celles des optiques conventionnelles. Le formalisme de formation d’image sera rappelé dans un premier temps pour introduire les fonctions de mérite associées (ouverture, fonction de transfert, fonction d’étalement de point...). Plusieurs exemples d’optiques binaires focalisantes sont ensuite détaillés. Pour chacun, les équations utiles à leur modélisation sont décrites, ainsi que des exemples d’application à l’imagerie.
Enfin, un tableau comparatif est exposé récapitulant les différentes optiques binaires présentées avec leurs caractéristiques.
La notion d’optique binaire est étendue en annexe au domaine des optiques multi-niveaux pouvant être réalisées avec un unique masque de photolithographie, parents proches de la famille des optiques binaires.
Cet article constitue le premier volet d’une série de deux articles, il traite des aspects conventionnels d’imagerie, tandis que le second article [E 4 046] explore des approches moins conventionnelles basées sur des optiques binaires dites auto-imageantes.
Le lecteur trouvera en fin d’article un tableau des sigles et notations utilisés.