La spectro-imagerie (en anglais « spectral imaging »), née de la combinaison de l'imagerie et de la spectrométrie, a pour objet de générer des images résolues spectralement, ou, de manière équivalente, des spectres résolus spatialement. C'est donc une généralisation de l'imagerie en couleurs, à cette différence que le nombre de composantes spectrales associées à chaque pixel de l'image n'est plus limité à trois, mais peut aller au-delà du millier. Lorsque ce nombre est faible, autour de la dizaine, on parle plutôt d'imagerie multispectrale, et d'imagerie hyperspectrale quand le nombre de bandes dépasse quelques dizaines. Aujourd'hui, le terme de spectro-imagerie est devenu pratiquement synonyme d'imagerie hyperspectrale, et c'est dans ce sens que nous l'emploierons. La limite entre le domaine multispectral et le domaine hyperspectral n'a toutefois pas encore de définition précise et acceptée par tous les auteurs, même si la plupart s'accordent à ajouter qu'un instrument doit délivrer des images dans des bandes spectrales étroites et contiguës pour pouvoir être qualifié d'hyperspectral. La dénomination peut aussi varier avec la communauté d'utilisateurs. C'est ainsi qu'en astronomie, on trouvera couramment les termes de spectroscopie 3D, spectroscopie intégrale de champ ou spectroscopie à champ intégral (« integral field spectroscopy » en anglais), et imagerie chimique (chemical imaging« » en anglais) en biologie ou en chimie.
Les domaines d'application des spectro-imageurs sont en effet très vastes, puisqu'on en trouve aussi bien dans des microscopes qu'au foyer des plus grands télescopes. On trouvera dans le premier chapitre de cet article un rapide survol des principales utilisations actuelles de l'imagerie hyperspectrale.
Encore plus vaste est l'éventail des dispositifs permettant d'acquérir à la fois l'information spectrale et l'information spatiale. Cette diversité est due en partie à celle des techniques spectrométriques, mais aussi aux différentes manières de balayer une image. En effet, rares sont les instruments qui acquièrent en une seule exposition l'ensemble de l'information spectrale et spatiale. Il est donc le plus souvent nécessaire d'introduire un balayage temporel, balayage qui peut concerner la dimension spectrale, mais aussi la dimension spatiale. C'est ainsi que l'on obtient une classification des spectro-imageurs selon leur mode d'acquisition spatiale. On distinguera donc quatre grandes familles d'instruments :
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les instruments en mode « monopoint » (« whiskbroom » en anglais), pour lesquels le champ de vue instantané se réduit à un point ;
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les instruments en mode « à champ linéaire » (« pushbroom » en anglais), pour lesquels le champ de vue s'étend à une dimension ;
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les instruments en mode « à trame pointée » (« staring », ou « framing » en anglais), pour lesquels le champ de vue s'étend à deux dimensions et reste fixe ;
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les instruments en mode « à trame défilante » (« windowing » en anglais), pour lesquels le champ de vue s'étend à deux dimensions mais balaye la scène continûment dans une direction.
C'est cette distinction que nous avons adoptée pour présenter notre article, puisque le deuxième chapitre sera consacré aux instruments en mode monopoint, le troisième aux instruments à champ linéaire défilant, le quatrième aux instruments en mode à trame pointée, et le cinquième à ceux en mode à trame défilante. Ces quatre chapitres ont surtout pour but de faire comprendre les principes instrumentaux, de manière simple, sans entrer de manière excessive dans les détails de conception et de réalisation. Nous indiquons tout de même, à la fin de chaque chapitre, les conditions d'utilisation les plus propices pour chacun de ces modes d'acquisition, et, dans le chapitre de conclusion, nous donnons un tableau récapitulatif des points forts et des points faibles des principes instrumentaux décrits dans cet article.